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Essais

« Le pouvoir des plantes »

Afin de trouver des leviers en agriculture biologique, la Chambre d'agriculture mène des essais, comme chez Emmanuel Brossard (Raveau) avec l'association blé-féverole. 

Par Chloé Monget
« Le pouvoir des plantes »
Crédit photo : Emmanuel Brossard
L'essai blé/féverole au 14 mars au « Champ des mulets » à Raveau.

Après des essais de variétés rustiques l'an dernier (renouvelé cette année), Emmanuel Brossard s'est lancé le défi de cultiver toutes les céréales en association avec des protéagineux dont un essai axé sur le blé associé à la féverole pour cette année. Pour l'épauler dans son suivi, il est accompagné par la Chambre d'agriculture de la Nièvre.

« Je pars du principe qu'en tant qu'être humain, nous sommes toujours meilleurs en groupe. Je suis persuadé que c'est pareil pour les plantes », souligne Emmanuel Brossard. « Sans cibler la symbiose à proprement parler, ces échanges constituent, à mon sens, le pouvoir des plantes. Et les essais sont là pour prouver que ces alliances culturales sont bénéfiques ». Emmanuel Brossard fait partie du GIEE Bio Logic 58 ainsi que du GIEE Innov Bio 58 et a déjà testé la culture associée de cameline/lentilles, ou encore les plantes compagnes comme le colza. Pour lui, ces associations permettraient deux éléments. « D'une part la perturbation des insectes ravageurs (indispensable pour préserver les cultures en agriculture biologique) et d'autre part l'implantation (réussie) de légumineuses dans mes assolements afin de ramener de l'azote au sol ». En complément, François Bonal, conseiller en agriculture biologique à la Chambre d'agriculture de la Nièvre et qui accompagne cet essai blé/féverole, souligne : « nous avons de plus en plus de demandes sur l'association de protéagineux (pois, féverole, lentilles, etc.) car ces cultures sont difficiles à réussir en pur à cause des maladies (bactériose, anthracnose, etc.) et des ravageurs (bruches notamment). En tant que Chambre d'agriculture, nous nous devons de chercher des leviers de réponses ».

Tester en plantant…

Chez Emmanuel Brossard, l'association blé/féverole a été implantée fin octobre, avec une densité particulière : 250 grains/m2 pour le blé et 25 grains/ m2 pour la féverole (contre 400 grains/m2 pour le blé et 50 grains/m2 pour la féverole de manière générale). « Nous avons trouvé un compromis afin que les deux cultures puissent se développer correctement », souligne François Bonal. « De plus, une densité moins importante pour les deux cultures engendre une moindre attractivité pour les ravageurs et les maladies ». François Bonal met également en avant d'autres avantages. « Les deux plantes ont un système racinaire différent : fasciculé pour le blé et pivotant pour la féverole. Il y a donc moins de concurrence racinaire. En plus, la féverole est autonome en azote grâce à ses nodosités, ce qui permet à l'azote disponible d'être plus facilement capté par le blé offrant à ce dernier des taux de protéines plus élevés. Enfin, la restitution de l'azote par la féverole se fera ressentir pour la culture suivante ».

L'essai blé/féverole implanté chez Emmanuel Brossard comporte quatre modalités : blé pur non fertilisé, blé pur fertilisé, blé/féverole non fertilisés, blé/féverole fertilisés. « Nous souhaitions voir tous les éléments possibles en la matière afin de tirer des conclusions supplémentaires ». La récolte est prévue autour du 20 juillet. En attendant, Emmanuel Brossard relève déjà que « tout semble bien se passer et cela devrait aller si nous n'avons pas d'événement climatique majeur d'ici là ».

Penser à tout

Pour Emmanuel Brossard, « il ne faut pas avoir peur de se lancer. Tester sur une petite surface et ensuite à plus grande échelle si les résultats conviennent. Mais avant toute chose, il faut veiller à ce que les plantes aient bien le même cycle et avoir en tête certains points tels que les débouchés possibles et le triage après récolte ». Un point sur lequel François Bonal insiste. « Certains collecteurs acceptent des associations de cultures non triées (blé/féverole ou encore triticale/pois fourrager), mais c'est souvent associé à un malus car ils intègrent le coût du triage ». Il ajoute : « il faut aussi savoir intégrer les associations de cultures dans sa rotation ; ce qui n'est pas toujours évident ». Si la recherche est donc au centre de cet essai d'association cultures, il n'en reste pas moins pour Emmanuel Brossard et François Bonal que les résultats devront être partagés avec le plus grand nombre. Dans cette optique collective, une visite de terrain sera organisée prochainement sur les terres d'Emmanuel Brossard à Raveau, par la Chambre d'agriculture de la Nièvre. En attendant, Emmanuel Brossard réfléchit déjà à d'autres associations : orge/pois, orge/gesse, avoine/lentilles, orge/lupin… Sans donc s'arrêter à la graine implantée, il semble d'ores et déjà faire germer d'autres idées dans un terreau bien à lui : son esprit.

Crédit photo : Emmanuel Brossard
L'évolution au 25 mars de l'association blé/féverole chez Emmanuel Brossard.