Néonicotinoïdes
Pas de troisième dérogation pour les betteraves

Source : Actuagri
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Suite à la décision de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) de refuser toute dérogation à l’interdiction des néonicotinoïdes, le ministre de l’Agriculture a rencontré le 23 janvier les représentants de la filière betteravière. Il leur a indiqué qu’il n’y aurait pas de troisième dérogation.

Pas de troisième dérogation pour les betteraves
Le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, a rencontré le 23 janvier les représentants de la filière betteravière. Il leur a indiqué qu’il n’y aurait pas de troisième dérogation. Photo iStock/Josef Mohyla.

S’exprimant devant la presse à l’issue de la réunion avec la filière betteravière, Marc Fesneau a annoncé qu’il n’y aura pas de troisième demande de dérogation, de façon à éviter les incertitudes des débats juridiques. « Il fallait donc prendre des décisions en toute lucidité » a-t-il affirmé, « car les semis doivent se faire d’ici quatre à six semaines ». Cette annonce est un coup dur car la filière avait une stratégie de trois ans pour sortir des néonicotinoïdes en 2024, avec un plan qui permettait de réduire de 30 % les surfaces couvertes par des produits enrobés en néonicotinoïdes dès la prochaine campagne. Surtout, cette décision vient déstabiliser toute la stratégie de transition entamée par la filière depuis 2020, alors qu’elle s’apprêtait aujourd’hui à demander une troisième et dernière dérogation. Le ministre a fait part aux planteurs et aux industriels de « la volonté de l’État de maintenir la souveraineté, le potentiel et la puissance en termes de production de sucre et d’éthanol ».

Clauses de sauvegarde

Cependant, « il manque une année de travail de recherche », a souligné Marc Fesneau, en faisant référence au Plan national de recherche et d’innovation (PNRI), doté d’un budget de 20 millions d’euros et mis en place par son prédécesseur. Les premiers résultats étaient prometteurs. Les recherches sur la sélection de semences ou les plantes compagnes se poursuivront mais en attendant, toute la filière s’inquiète. Le ministre s’est lui-même ému des « grands risques que cette décision fait porter sur les outils industriels s’ils n’ont pas la matière première à transformer ». Pour tenter d’apaiser les tensions qui sont légitimes, le ministre s’est engagé à « activer au niveau européen les clauses de sauvegarde pour empêcher les distorsions de concurrence, éviter que cette décision n’aboutisse à l’importation de sucre et d’éthanol en provenance de pays qui ne respectent pas nos normes, ce qui constituerait une concurrence déloyale avec les producteurs, non seulement français mais européens ».

« Abasourdie »

Du côté des producteurs, « on se retrouve au pied du mur », s’est ému la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB) dans un communiqué. Ils ont toujours en tête la catastrophe de 2020 qui, en raison de la jaunisse, avait causé une perte moyenne de rendement de 30 % sur le plan national, avec des pointes à 70 % de pertes dans certaines régions. S’estimant en « plein désarroi », les producteurs conservent toutefois une lueur d’espoir, car le ministre s’est engagé à étudier un dispositif d’indemnisation des pertes dues à la jaunisse. « C’est une nécessité absolue pour rassurer les planteurs, à condition que ces pertes soient totalement prises en charge et de n’avoir ni franchise, ni plafonnement des aides », estime la CGB, « abasourdie par autant d’inconséquence » de la part de la CJUE qui ouvre ainsi la porte au sucre des pays tiers qui utilisent toujours des produits phytosanitaires interdits depuis des années en France et en Europe.