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Filière avicole

Un nouveau modèle économique pour le site Duc à Chailley

Sous pavillon néerlandais depuis le printemps dernier, la société Duc a revu son modèle de développement et va augmenter sa production de poulets standards sur son site historique de Chailley, en lien avec les nouvelles tendances de consommation.
Par Dominique Bernerd
Un nouveau modèle économique pour le site Duc à Chailley
Directeur général de Duc, Damien Calandre est venu présenter la nouvelle stratégie de l’entreprise aux administrateurs de la Chambre d’agriculture de l’Yonne, réunis en Conseil le 23 novembre dernier. Cinquante nouveaux bâtiments de ce type seront instal
Orientée depuis toujours sur le marché de la grande distribution, la société Duc a intégré à la fin de l’année dernière le groupe néerlandais Plukon, 2ème opérateur au monde de poulets abattus, avec 3 500 salariés, 7,6 millions de poulets abattus par semaine et un chiffre d’affaires qui devrait avoisiner cette année 1,7 milliards d’euros. Une entreprise «de dimension européenne», souligne Damien Calandre, nouveau directeur général de Duc, «avec un business model similaire au nôtre, mais à une autre échelle, s’adaptant aux modes de consommation des pays, mais toujours en privilégiant la vente vers les GMS». Deux types de produits se partagent aujourd’hui le marché  : le poulet entier, orienté à 62% label rouge, et la découpe, concernant essentiellement à 61%, des poulets standards, dits «classiques». Jugé trop segmenté et n’offrant pas beaucoup de marges de manœuvre, le premier se trouve supplanté aujourd’hui par la tendance à consommer de plus en plus de morceaux découpés  : «c’est une tendance incontestable, la croissance se fait avant tout sur du poulet standard et c’est sur ce produit que l’on a développé notre business model pour les 5 à 10 ans à venir».  Historiquement dédié à la production de poulet certifié, le site de Chailley va devoir adapter son outil industriel en conséquence et augmenter sa cadence d’abattage, pour la faire passer de 400 000 à 700 000 poulets abattus par semaine. Soit une cadence de
10 000 poulets à l’heure, contre 6 500 jusqu’alors, pour un investissement global de près de
18 millions d’euros. Un discours, reconnaît le directeur général, «a contrario des objectifs que se sont fixés les États généraux de l’Alimentation, mais c’est la loi du marché qui est la plus forte».

Une cinquantaine de poulaillers supplémentaires d’ici 2019
Si la consommation n’a cessé de croître ces dix dernières années, pour atteindre le chiffre de
27 kg/an/habitant, le paradoxe veut que l’on continue d’importer 50 % de la volaille consommée en France. Une situation qui va conduire le groupe à augmenter sa production et à construire à cet effet 50 bâtiments d’élevage supplémentaires sur le sol icaunais à l’horizon 2019. Ils sont actuellement 119 éleveurs, répartis sur tout le département, pour un peu plus de 200 bâtiments et une production hebdomadaire de
500 000 poulets. Source non négligeable d’utilisation de matières premières locales pour l’alimentation des animaux, comme le rappelle Jean-Pierre Chareyron, directeur production amont chez Duc  : «à l’année, cela représente notamment 63000 tonnes de blé, pour 9  000 ha, 20000 tonnes de maïs  pour 2500 ha, 3  500 tonnes d’avoine». Avec des besoins qui devraient augmenter de 30% d’ici 2019, compte tenu de l’objectif fixé. Si le développement en interne auprès des éleveurs existants sera privilégié, il sera fait appel également à des exploitants désireux de se diversifier  : «nous sommes sur des productions beaucoup plus sécurisées que les productions céréalières, car l’aléa climatique n’existe pas».

Une expérience de 22 ans

Installé en polyculture élevage sur les hauteurs de Noyers-sur-Serein, Franck Ménard s’est lancé dans l’élevage de poulets il y a 22 ans. Un choix qu’il ne regrette pas aujourd’hui, confronté aux aléas climatiques récurrents et aux mauvaises récoltes qui s’enchainent au fil des années
Pourquoi l’option élevage en 1995  ?
F. Ménard  : «Je me suis installé en 1989 avec mes parents, mais à 3 personnes sur 160 ha, il fallait trouver un revenu supplémentaire, car même si les prix étaient meilleurs à l’époque, on ne pouvait guère espérer 50 à 60 q/ha compte tenu de la qualité des terres du secteur. On a monté un premier bâtiment en 1995, suivi d’un second en 2001».

Et pourquoi l’aviculture  ?
«On avait visité quelques éleveurs qui paraissaient satisfaits et la filière semblait sérieuse, avec un débouché assuré, au regard des habitudes alimentaires des français. Déjà à l’époque, on parlait de 15 kg de viande de poulet par personne et par an et le chiffre n’a cessé de progresser. Le type de poulet produit me plaisait bien aussi, du 57 jours, de milieu de gamme. Le bâtiment était livré clés en mains par Duc, pour un investissement  de 140  000 € que j’avais calé sur 12 ans car malgré tout, on partait un peu dans l’aventure, la filière était jeune».

Votre production aujourd’hui et le temps de travail que cela représente  ?
«Les poulaillers font chacun 1  200 m2, pour une production théorique annuelle de 21 600 poulets et une durée d’élevage de 57 à 60 jours, avec un contrat de 5 bandes par an espacées par 10 jours minimum de vide sanitaire. Les poussins et l’alimentation étant fournis par Duc. Cela représente du travail quand même, il faut en être conscient, car même si c’est en grande partie automatisé, cela reste de l’élevage et qui dit élevage dit surveillance et temps de présence. En période de croisière, disons que cela me prend 1 heure par jour et pour une période globale de 2 mois d’élevage, on compte en moyenne une centaine d’heures plus autant au moment du vide sanitaire».

Si c’était à refaire  ?
«Aujourd’hui, avec le recul des 3 ou 4 années de mauvaises récoltes que l’on vient de subir et des bilans économiques négatifs qui s’y rattachent, je me dis que si je n’avais pas l’atelier avicole à côté, je ne sais pas où en serait ma situation financière. Peut-être ne serai-je même plus agriculteur ? Les marges sont petites certes, le revenu fiscal dépendant bien sûr de l’amortissement ou non du bâtiment, mais il faut aussi tenir compte de l’engrais organique apporté sur les terres et de la diminution du poste phytos».