Témoignage
«J’ai mis un mouchoir sur ma fierté»
Quelques jours après la sortie du film Au nom de la terre, réalisé par Édouard Bergeon, nous sommes allés à la rencontre d’une agricultrice nivernaise qui a connu des difficultés par le passé mais qui aujourd’hui s’en est sortie.

C’est une parole libérée que nous n’avons pas l’habitude d’entendre. Laure(1), polycultrice éleveuse dans le département, est en EARL avec son mari sur une exploitation de 220 ha avec un atelier ovin de 70 brebis et 65 mères charolaises. Elle a accepté de témoigner sur son parcours chaotique, de son installation jusqu’à aujourd’hui « pour éveiller une conscience chez mes collègues, auprès du grand public mais aussi des politiques. Pour leur faire prendre conscience que nous ne sommes pas des empoisonneurs, mais que nous sommes aussi des consommateurs et des parents responsables, et que nous savons faire de la qualité » explique-t-elle en préambule de l’entretien. Le personnage de Pierre Jarjeau, joué par Guillaume Canet dans Au nom de la terre a fait écho à son propre parcours. C’était une raison supplémentaire de témoigner.
Laure commence son parcours d’installation entre 2005 et 2006. Dès le départ, elle doit se battre pour faire accepter son projet auprès des banques. « Il y avait un a priori négatif sur mon dossier car je suis une femme. Personne ne me l’a clairement dit mais on me l’a fait comprendre en me posant des questions sur la pertinence de mon projet. Des questions que mes collègues masculins n’ont pas forcément. Résultat, le jour du passage de mon dossier en CDOA, j’ai appris que ma banque ne me suivait plus. Il a fallu repartir de zéro » explique-t-elle. « Pour mon installation, j’ai repris à l’identique la ferme familiale en investissant dans un tracteur, et une fourche, et une pailleuse. Le plus gros poste fut le rachat des parts sociales de son père » poursuit-elle.
2013 : début des ennuis
C’est en 2013 que les ennuis de Laure débutent, dus en grande partie à des problèmes mécaniques qui lui ont coûté 30 000 euros. Le bilan de la campagne de moisson n’est pas bon et le volume des récoltes n’est pas au rendez-vous. L’agricultrice qui saisie sa comptabilité elle-même, s’aperçoit dès août 2013 qu’il va lui manquer entre 10 000 à 15 000 euros de trésorerie dès le printemps 2014 pour aller à la prochaine moisson. « J’ai alors contacté ma banque, je lui ai expliqué la situation. Il m’a été répondu que je m’alarmais un peu trop vite, que nous aurions le temps de voir au printemps… Au printemps 2014, la situation avait évolué dans le sens que j’avais prédit. J’ai donc recontacté ma banque qui m’a proposé des billets de trésorerie pour un montant total de 15 000 euros à rembourser sous trois moi. Notre situation financière peinant à s’améliorer, et voyant que nous devions de plus en plus faire appel à des crédits court terme pour assurer le paiement de nos factures, je décide de monter un dossier AGRIDIFF sans en parler à personne à l’automne 2015. Ce dernier est passé en commission en avril 2016. J’ai obtenu la prise en charge de mes cotisations MSA sur une année, une aide de 5 000 € et on m’a demandé de me rapprocher de la chambre d’agriculture afin de réaliser un audit sur mon exploitation.
« Ce dispositif m’a donné de l’air »
Laure effectue donc en février 2016 le versement demandé sur son compte. Mais ce qu’elle dénonce c’est la lenteur de la procédure. « J’ai déposé mon dossier le 8 décembre 2015 et j’ai reçu mes aides de 5 000 euros en août 2016, soit plus d’un après… D’une part dans ce genre de situation, l’administration est bien trop lente à réagir, et d’autre part on vous impose des charges alors que vous êtes déjà en difficulté, ce n’est pas normal » estime-t-elle. Son audit a néanmoins permis de s’apercevoir que ses difficultés étaient davantage liées à la conjoncture plutôt qu’à sa conduite d’exploitation.
« Ce dispositif m’a donné de l’air car durant cette période, je ne me versais que 200 euros de salaire, juste de quoi payer la partie qui n’était pas prise en charge pour la nourrice de mes deux enfants, mes assurances hors exploitation et mes factures de portable. Le complément de salaire était assuré par mon mari. Alors j’ai mis un mouchoir sur ma fierté et j’ai écrit à tous mes fournisseurs en leur demandant de me faire confiance. Il y avait deux solutions : soit ils me faisaient confiance et continuaient d’assurer les livraisons de fioul, d’aliment pour mes animaux et les dépannages mécaniques de mon matériel et ils me donnaient la possibilité de faire ma récolte dans de bonnes conditions et de vendre mes animaux rapidement, et j’avais une chance de les payer dans le temps, soit ils refusaient et l’on pouvait s’engager dans des procédures à n’en plus finir » estime l’exploitante. À sa grande surprise tous ses fournisseurs ont accepté de faire une avance sur trésorerie. « Ces derniers m’ont tendu la main à la différence de ma banque qui n’a pas su être présente durant cette période » regrette-elle.
2016 : l’année du soulagement
Paradoxalement sa situation s’arrange à la faveur d’un accident de travail : « Je sais que je ne devrais pas dire ça mais mon immobilisation m’a soulagé car ça m’a permis de prendre du recul, de ne pas me prélever de salaire, et donc de soulager mon compte professionnel, mais en plus de renflouer mon compte personnel… Car là encore le système est biaisé : je touchais 600 euros par mois de la part de la MSA et autant de la part de ma mutuelle, soit 6 fois plus que mon salaire de l’époque. Est-ce normal ? » s’interroge-elle.
«Je n’ai pas honte pour moi, mais honte de ce qui entoure mon métier car ce genre de système ne vous encourage pas à vous lever le matin » estime-t-elle. Dans le courant de cette année, elle a l’idée de se lancer dans la vente directe. « J’ai dû faire face aux réticences de mon père car il ne voyait pas le débouché que je pouvais obtenir. Il n’a pas été facile de me libérer de cette tutelle parentale mais il fallait trouver une solution » explique-t-elle non sans émotions. Sa première vente est une réussite car elle réalise une plus-value de 900 euros par rapport au circuit classique. Il a donc fallu pour Laure passer par l’achat d’une chambre froide. Là encore, malgré le fait qu’elle apporte noir sur blanc chaque plus-value de ses ventes, la demande de financement de la banque lui est refusée. « C’est le chien qui se mord la queue… Pour continuer mes ventes, il me fallait cette chambre froide, mais si la banque refusait, je ne pouvais évidemment pas prendre de risque avec la chaîne du froid… Je me retrouvais dans une situation où la seule activité sans trop de frais au départ qui était susceptible de me dégager un revenu était retoquée une fois encore par la frilosité bancaire ! » Obstinée, elle trouvera les fonds nécessaires (soit 3 000 euros) via un financement participatif sur la plateforme Miimosa, spécialisée dans le financement participatif des projets agricoles. « J’ai réussi à boucler mon projet en tout juste quinze jours. Parmi les donateurs : 80 % de ma clientèle naissante, 10 % de ma famille et d’inconnus et les 10 % restants : les professionnels qui m’entourent sur le terrain (mon assureur, ma comptable, mes techniciens cultures et élevage, mon vétérinaire). C’était réconfortant, car si c’est gens qui connaissent votre situation croient en vous, alors c’est qu’il y a encore de l’espoir ! » nous dit-elle le sourire aux lèvres.
« On se repose de nouveau la question de tout arrêter »
L’activité vente directe a pris de l’ampleur assez rapidement et Laure n’arrivait plus à s’en sortir entre son travail physique et administratif sur la ferme, ses enfants, sa maison. Avec son mari, ils ont longuement réfléchi. Où elle arrêtait la ferme et allait travailler à l’extérieur, ou son mari quittait son emploi de salariat pour venir la seconder. En contrepartie, afin de minimiser la perte de salaire, elle trouvait un emploi à mi-temps. Ils ont choisi la seconde option. Laure a trouvé un trois-quart temps qui lui convient parfaitement car lissé sur l’année. Elle est ainsi disponible pour les travaux de la ferme, pour ses enfants, tout en ayant un minimum de revenu assuré. « Cette stratégie me permet aujourd’hui de ramener un salaire, de m’occuper de mes enfants et de mieux gérer ma comptabilité. Je tiens à dire que je suis fière de m’être battue pour toutes les générations qui ont construit ce qui m’a été légué et pour la ou les générations qui nous succéderont peut-être. Je ne me sentais pas le droit de laisser tomber, et ça vaut le coup de se battre pour cette cause. Mais, aujourd’hui, je me trouve dans un dilemme car l’un de nos enfants est mordu par l’agriculture. Alors devons-nous encore nous battre en sachant qu’on risque de transmettre une exploitation en difficulté ou arrêter et faire autre chose ? De nos jours, au vu des conditions climatiques de plus en plus incertaines, et au vu du climat de plus en plus anti-agricole, faisons-nous un cadeau à nos enfants de nous battre pour leur transmettre nos exploitations familiales ? Actuellement nous vivons correctement mais nous n’avons pas le droit à l’erreur. Avec les aléas climatiques, je vais perdre encore cette année entre 15 000 à 20 000 euros en culture et 5 000 à 10 000 euros en élevage. Nous sommes de nouveau inquiets pour le futur. Mais même s’il m’arrive d’en parler avec mon fils qui m’interroge sur le sujet, notamment au vu de l’actualité cinématographique, à aucun moment le suicide ne m’a traversé pas l’esprit. J’ai la chance d’être très entourée, et très bien entourée par ma famille, ma belle-famille, mes amis qui sont pour l’essentiel hors agricoles, et les gens avec qui je travaille. J’ai la chance d’avoir une parole libre et j’apprends à mes enfants que j’aime par-dessus tout à avoir cette liberté deparole, mais aussi savoir écouter l’autre… Car on peut-être entourée, aimée, respectée… si ces personnes ne savent pas écouter et entendre votre appel au secours, vous êtes fichus ! Ma chance, c’est ma force de caractère alimentée par l’amour et le soutien que j’ai reçu au bon moment… et je me dis qu’il y a toujours une solution ! » conclut-elle avec le sourire.
Ce que traversent aujourd’hui les agriculteurs les épuise parfois, les décourage souvent… Mais face à des situations de tensions très nombreux sont ceux qui trouvent les ressorts d’un accompagnement technique, financier, humain ou familial permettant de passer le cap des crises successives affectent profondément les agriculteurs qui n’en demeurent pas moins des acteurs cruciaux des territoires ruraux. Ils attendent seulement reconnaissance, pour ce qu’ils donnent au pays et aux citoyens français : trois fois par jour, la certitude d’une assiette garnie quand sonne l’heure des repas.
(1) Le prénom a été changé à la demande de l’exploitante.
Laure commence son parcours d’installation entre 2005 et 2006. Dès le départ, elle doit se battre pour faire accepter son projet auprès des banques. « Il y avait un a priori négatif sur mon dossier car je suis une femme. Personne ne me l’a clairement dit mais on me l’a fait comprendre en me posant des questions sur la pertinence de mon projet. Des questions que mes collègues masculins n’ont pas forcément. Résultat, le jour du passage de mon dossier en CDOA, j’ai appris que ma banque ne me suivait plus. Il a fallu repartir de zéro » explique-t-elle. « Pour mon installation, j’ai repris à l’identique la ferme familiale en investissant dans un tracteur, et une fourche, et une pailleuse. Le plus gros poste fut le rachat des parts sociales de son père » poursuit-elle.
2013 : début des ennuis
C’est en 2013 que les ennuis de Laure débutent, dus en grande partie à des problèmes mécaniques qui lui ont coûté 30 000 euros. Le bilan de la campagne de moisson n’est pas bon et le volume des récoltes n’est pas au rendez-vous. L’agricultrice qui saisie sa comptabilité elle-même, s’aperçoit dès août 2013 qu’il va lui manquer entre 10 000 à 15 000 euros de trésorerie dès le printemps 2014 pour aller à la prochaine moisson. « J’ai alors contacté ma banque, je lui ai expliqué la situation. Il m’a été répondu que je m’alarmais un peu trop vite, que nous aurions le temps de voir au printemps… Au printemps 2014, la situation avait évolué dans le sens que j’avais prédit. J’ai donc recontacté ma banque qui m’a proposé des billets de trésorerie pour un montant total de 15 000 euros à rembourser sous trois moi. Notre situation financière peinant à s’améliorer, et voyant que nous devions de plus en plus faire appel à des crédits court terme pour assurer le paiement de nos factures, je décide de monter un dossier AGRIDIFF sans en parler à personne à l’automne 2015. Ce dernier est passé en commission en avril 2016. J’ai obtenu la prise en charge de mes cotisations MSA sur une année, une aide de 5 000 € et on m’a demandé de me rapprocher de la chambre d’agriculture afin de réaliser un audit sur mon exploitation.
« Ce dispositif m’a donné de l’air »
Laure effectue donc en février 2016 le versement demandé sur son compte. Mais ce qu’elle dénonce c’est la lenteur de la procédure. « J’ai déposé mon dossier le 8 décembre 2015 et j’ai reçu mes aides de 5 000 euros en août 2016, soit plus d’un après… D’une part dans ce genre de situation, l’administration est bien trop lente à réagir, et d’autre part on vous impose des charges alors que vous êtes déjà en difficulté, ce n’est pas normal » estime-t-elle. Son audit a néanmoins permis de s’apercevoir que ses difficultés étaient davantage liées à la conjoncture plutôt qu’à sa conduite d’exploitation.
« Ce dispositif m’a donné de l’air car durant cette période, je ne me versais que 200 euros de salaire, juste de quoi payer la partie qui n’était pas prise en charge pour la nourrice de mes deux enfants, mes assurances hors exploitation et mes factures de portable. Le complément de salaire était assuré par mon mari. Alors j’ai mis un mouchoir sur ma fierté et j’ai écrit à tous mes fournisseurs en leur demandant de me faire confiance. Il y avait deux solutions : soit ils me faisaient confiance et continuaient d’assurer les livraisons de fioul, d’aliment pour mes animaux et les dépannages mécaniques de mon matériel et ils me donnaient la possibilité de faire ma récolte dans de bonnes conditions et de vendre mes animaux rapidement, et j’avais une chance de les payer dans le temps, soit ils refusaient et l’on pouvait s’engager dans des procédures à n’en plus finir » estime l’exploitante. À sa grande surprise tous ses fournisseurs ont accepté de faire une avance sur trésorerie. « Ces derniers m’ont tendu la main à la différence de ma banque qui n’a pas su être présente durant cette période » regrette-elle.
2016 : l’année du soulagement
Paradoxalement sa situation s’arrange à la faveur d’un accident de travail : « Je sais que je ne devrais pas dire ça mais mon immobilisation m’a soulagé car ça m’a permis de prendre du recul, de ne pas me prélever de salaire, et donc de soulager mon compte professionnel, mais en plus de renflouer mon compte personnel… Car là encore le système est biaisé : je touchais 600 euros par mois de la part de la MSA et autant de la part de ma mutuelle, soit 6 fois plus que mon salaire de l’époque. Est-ce normal ? » s’interroge-elle.
«Je n’ai pas honte pour moi, mais honte de ce qui entoure mon métier car ce genre de système ne vous encourage pas à vous lever le matin » estime-t-elle. Dans le courant de cette année, elle a l’idée de se lancer dans la vente directe. « J’ai dû faire face aux réticences de mon père car il ne voyait pas le débouché que je pouvais obtenir. Il n’a pas été facile de me libérer de cette tutelle parentale mais il fallait trouver une solution » explique-t-elle non sans émotions. Sa première vente est une réussite car elle réalise une plus-value de 900 euros par rapport au circuit classique. Il a donc fallu pour Laure passer par l’achat d’une chambre froide. Là encore, malgré le fait qu’elle apporte noir sur blanc chaque plus-value de ses ventes, la demande de financement de la banque lui est refusée. « C’est le chien qui se mord la queue… Pour continuer mes ventes, il me fallait cette chambre froide, mais si la banque refusait, je ne pouvais évidemment pas prendre de risque avec la chaîne du froid… Je me retrouvais dans une situation où la seule activité sans trop de frais au départ qui était susceptible de me dégager un revenu était retoquée une fois encore par la frilosité bancaire ! » Obstinée, elle trouvera les fonds nécessaires (soit 3 000 euros) via un financement participatif sur la plateforme Miimosa, spécialisée dans le financement participatif des projets agricoles. « J’ai réussi à boucler mon projet en tout juste quinze jours. Parmi les donateurs : 80 % de ma clientèle naissante, 10 % de ma famille et d’inconnus et les 10 % restants : les professionnels qui m’entourent sur le terrain (mon assureur, ma comptable, mes techniciens cultures et élevage, mon vétérinaire). C’était réconfortant, car si c’est gens qui connaissent votre situation croient en vous, alors c’est qu’il y a encore de l’espoir ! » nous dit-elle le sourire aux lèvres.
« On se repose de nouveau la question de tout arrêter »
L’activité vente directe a pris de l’ampleur assez rapidement et Laure n’arrivait plus à s’en sortir entre son travail physique et administratif sur la ferme, ses enfants, sa maison. Avec son mari, ils ont longuement réfléchi. Où elle arrêtait la ferme et allait travailler à l’extérieur, ou son mari quittait son emploi de salariat pour venir la seconder. En contrepartie, afin de minimiser la perte de salaire, elle trouvait un emploi à mi-temps. Ils ont choisi la seconde option. Laure a trouvé un trois-quart temps qui lui convient parfaitement car lissé sur l’année. Elle est ainsi disponible pour les travaux de la ferme, pour ses enfants, tout en ayant un minimum de revenu assuré. « Cette stratégie me permet aujourd’hui de ramener un salaire, de m’occuper de mes enfants et de mieux gérer ma comptabilité. Je tiens à dire que je suis fière de m’être battue pour toutes les générations qui ont construit ce qui m’a été légué et pour la ou les générations qui nous succéderont peut-être. Je ne me sentais pas le droit de laisser tomber, et ça vaut le coup de se battre pour cette cause. Mais, aujourd’hui, je me trouve dans un dilemme car l’un de nos enfants est mordu par l’agriculture. Alors devons-nous encore nous battre en sachant qu’on risque de transmettre une exploitation en difficulté ou arrêter et faire autre chose ? De nos jours, au vu des conditions climatiques de plus en plus incertaines, et au vu du climat de plus en plus anti-agricole, faisons-nous un cadeau à nos enfants de nous battre pour leur transmettre nos exploitations familiales ? Actuellement nous vivons correctement mais nous n’avons pas le droit à l’erreur. Avec les aléas climatiques, je vais perdre encore cette année entre 15 000 à 20 000 euros en culture et 5 000 à 10 000 euros en élevage. Nous sommes de nouveau inquiets pour le futur. Mais même s’il m’arrive d’en parler avec mon fils qui m’interroge sur le sujet, notamment au vu de l’actualité cinématographique, à aucun moment le suicide ne m’a traversé pas l’esprit. J’ai la chance d’être très entourée, et très bien entourée par ma famille, ma belle-famille, mes amis qui sont pour l’essentiel hors agricoles, et les gens avec qui je travaille. J’ai la chance d’avoir une parole libre et j’apprends à mes enfants que j’aime par-dessus tout à avoir cette liberté deparole, mais aussi savoir écouter l’autre… Car on peut-être entourée, aimée, respectée… si ces personnes ne savent pas écouter et entendre votre appel au secours, vous êtes fichus ! Ma chance, c’est ma force de caractère alimentée par l’amour et le soutien que j’ai reçu au bon moment… et je me dis qu’il y a toujours une solution ! » conclut-elle avec le sourire.
Ce que traversent aujourd’hui les agriculteurs les épuise parfois, les décourage souvent… Mais face à des situations de tensions très nombreux sont ceux qui trouvent les ressorts d’un accompagnement technique, financier, humain ou familial permettant de passer le cap des crises successives affectent profondément les agriculteurs qui n’en demeurent pas moins des acteurs cruciaux des territoires ruraux. Ils attendent seulement reconnaissance, pour ce qu’ils donnent au pays et aux citoyens français : trois fois par jour, la certitude d’une assiette garnie quand sonne l’heure des repas.
(1) Le prénom a été changé à la demande de l’exploitante.