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Débat

Dis, comment ça va ?

La Mairie d’Ouroux-en-Morvan a organisé une soirée d’échange autour du film « Au nom de la terre » réalisé par Édouard Bergeon. Le syndicat local FDSEA du canton de Montsauche-les-Settons, la Chambre d’agriculture, le Crédit Agricole et la MSA étaient présents pour engager un débat avec le grand public autour des difficultés du métier d’agriculteur.
Par FDSEA 58
Dis, comment ça va ?
Soixante-deux personnes ont participé à cette soirée d’échange.
La petite salle communale était comble. Soixante-deux personnes étaient présentes, des agriculteurs, des habitants et des résidents occasionnels, pour suivre l’histoire d’un exploitant (interprété par Guillaume Canet) en difficulté et de sa famille dans les années quatre-vingt-dix. Une histoire de reprise de la ferme familiale dans des conditions de marché dégradé dans laquelle certains agriculteurs se reconnaissent : gestion des risques et aléas, prix en baisse, tension avec le père cédant, manque de reconnaissance, responsabilité du patrimoine familial… Une histoire réaliste avec laquelle l’assemblée a pourtant pris de la distance pour mieux comprendre les trajectoires des exploitants nivernais aujourd’hui. Au contact d’une salle bienveillante en recherche d’information et d’explication auprès d’une profession qui suscite empathie et fierté.

Le mal-être paysan : qu’en est-il dans la Nièvre ?
Les causes de la détresse sont multiples et peuvent s’additionner : accident, maladie qui crée une cassure et une désorganisation dans le travail, aléas climatiques, sanitaires et de marché, problèmes familiaux (séparation, décès d’un parent par exemple), événements imprévus (incendie d’un bâtiment à l’image du film), pression de l’endettement et poids des responsabilités… «Lorsqu’on fait ce métier, on vit avec le risque et l’imprévu» témoigne Gilles Lemée, secrétaire adjoint de la Chambre d’agriculture.
Dans cette situation, comment détecter et accompagner les personnes en difficultés ? «Les organisations professionnelles de la Nièvre ont mis en place une association, Aid ‘Agri Nièvre qui est un réseau de détection et d’accompagnement concret. Vingt-cinq dossiers ont ou sont encore accompagnés par cette association» explique Stéphane Aurousseau, le président de la FDSEA. «La MSA est active sur le territoire au contact des personnes qui en font la demande» explique Marie-Laure Giraud. Pourtant, la détection est difficile : pudeur, sentiment de honte, isolement… Le plus grand frein : l’initiative de la personne. «Nous ne pouvons pas intervenir si l’exploitant n’envoie pas les signaux d’alerte et n’est pas en demande» constate Stéphane Aurousseau, président de la FDSEA de la Nièvre.

Le problème de fond : un métier trop faiblement rémunérateur
Au cœur des discussions, la question de la stratégie d’entreprise : le public questionne la trajectoire du personnage principal, qui, face aux difficultés de son élevage s’endette plus lourdement pour se lancer dans un atelier de volailles de chair. «L’agriculteur est souvent une femme ou un homme de projet, qui va de l’avant, en plus de l’adaptation au cadre réglementaire qui impose des mises aux normes. L’activité est donc structurellement très capitalistique : bâtiments, cheptel ou matériel… Ce qui induit de l’endettement. Ce dernier est toujours raisonné en fonction de la perspective de rémunération et du marché potentiel. L’endettement n’est pas problématique en tant que tel mais la question est plutôt de savoir ce qu’on dégage comme revenu avec cet investissement. Les compétences du chef d’exploitation, sa connaissance technico-économique font aussi la différence. Enfin et surtout, une grande part de la fragilité de nos schémas tient au prix, à la trop faible rémunération de certaines de nos productions et à l’asymétrie commerciale dans certaines filières» explique Stéphane Aurousseau.

Et les consommateurs dans tout ça ?
L’assistance s’est montrée en soutien de l’agriculture du département, bien consciente de la qualité de nos productions. «Le principal soutien que peut apporter le consommateur c’est celui d’acheter des produits français y compris au supermarché ou hors domicile (restaurant, cantine entreprise)» ajoute Stéphane Aurousseau.
Le film a donc été une belle occasion de rapprocher habitants et agriculteurs autour d’un enjeu commun : le visage de la ruralité de demain, dans un contexte macroéconomique incertain, mais avec tout le cœur des femmes et des hommes qui font le territoire.