Centenaire
L’agriculture française pendant les JO de 1924 (épisode 4)

Christophe Soulard
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Suite de notre série consacrée au visage de l'agriculture française en 1924, année des premiers Jeux olympiques à Paris, mais aussi de la création des Chambres d'agriculture.

 L’agriculture française pendant les JO de 1924 (épisode 4)
Illustration extraite du journal L'Agriculture Nouvelle du 26 juillet 1924. (Crédit DR).

En cette fin du mois de juillet 1924, la sécheresse « ravage la côte méditerranéenne de Provence. La culture maraîchère y est, de ce fait, pour ainsi dire inexistante, alors qu’elle est si prospère dans la région de Barbentane, Châteaurenard et Saint-Rémy », rapporte l’Exclesior du 21 juillet. De nombreuses communes de Martigues à Marseille ont besoin d’un « débit minimum de 26 litres d’eau à la seconde ». Les communes touchées sont périodiquement rationnées « à raison de 5 litres d’eau par personne et par jour ». Au total, ce sont 10 000 habitants qui sont privés d’eau ou presque. La situation est cependant pire en Russie où la sécheresse a ravagé les récoltes dans le Sud-Est qui est la grande région productrice de céréales, indique Le Figaro économie du 27 juillet. « Les paysans, pris de panique, vendent leur cheptel à vil prix ». Pour atténuer leur désarroi sinon leur malheur, le Kremlin envoie aux paysans des « stocks destinés à l’exportation » ainsi que « du bétail afin d’éviter une baisse foudroyante des prix ».

Élevage rémunérateur

À l’heure où la mécanisation ne s’est pas encore développée, les chevaux de traits (avec les bœufs) restent le moyen. En effet, la France n’est en mesure de produire que 1 500 tracteurs par jour. La demande est forte, même si les presque sept millions d’agriculteurs que compte le pays n’ont pas tous les moyens d’en acquérir un. En attendant, L’Agriculture nouvelle se réjouit de voir réapparaître le concours central hippique de reproducteurs qui a été rétabli après dix ans d’interruption, pour cause de guerre et de reconstruction. Rassemblant l’élite de la population chevaline, l’évènement se déroule dans les locaux de la Foire de Paris au Champ de Mars. Il rassemble un millier d’animaux de dix-huit races différentes : du pur-sang arabe aux espèces asines, en passant par les demi-sang vendéen et charentais, les Postiers, les Ardennais, les Boulonnais ou encore les Traits bretons. Le rédacteur de l’article, André Leroy de l’Institut national agronomique, confirme que « l’élevage de gros chevaux est encore rémunérateur en raison des conditions actuelles de notre marché ». Le cheval de trait représente encore plus de 85 % des 3 millions de chevaux présents sur le territoire français en 1930. Outre le travail du sol, il sert aussi pour les loisirs (calèches) et au sein de l’armée qui en ont réquisitionné plus de 750 000 en 1914… Le besoin sera encore grand deux années plus tard puisque l’armée en emploie encore 153 000 quotidiennement dont 11 000 pour la gendarmerie. Race ovine en péril Le Petit Journal du 23 juillet s’inquiète à sa manière de la baisse du nombre d’éleveurs de moutons : « Après avoir connu la prospérité, il (l’élevage du mouton) subit la décadence » et cela « inquiète les Pouvoirs publics », annonce-t-il sous le titre évocateur : « Il nous faut des moutons, il nous faut des bergers ». L’auteur de l’article, Hippolyte Gomot, sénateur du Puy-de-Dôme, s’inquiète : « la race ovine est en péril (…) elle a besoin d’un secours énergique et immédiat ». Le parlementaire fait l’éloge de la Bergerie de Rambouillet dont la formation donne « toutes les garanties désirables ». En effet, son objectif est « de créer des hommes connaissant bien le mouton et les soins à lui donner, capables de comprendre les différents modes d’exploitation du troupeau et d’y collaborer ». L’article nous apprend que 12 élèves sont sortis de cette école en 1922 et autant en 1923. Le sénateur appuie la demande et double le temps des études pour le faire passer de cinq à dix mois, à partir de l’année 1925. Quant à la rubrique « La vie agricole » du Figaro du 27 juillet, elle rapporte que depuis le 1er octobre jusqu’à fin mai, il est entré en France « 403 998 hectolitres de vins italiens contre 23 128 pendant la même période de 1922-1923. Dans les mêmes mois, l’Espagne nous a envoyé 1 974 767 hectolitres contre 824 786 pendant la campagne précédente. Cette situation inquiète les milieux viticoles méridionaux ».