Mélissa Galleron
Elle a lancé sa production de champignons sur le Vercors
À Saint-Martin-en-Vercors, Mélissa Galleron produit pleurotes et shiitakés. Des champignons qu’elle commercialise auprès de restaurateurs, magasins bios et sur des marchés locaux.
Mélissa Galleron se rêvait maraîchère. Mais en débarquant sur le Vercors aux côtés de son conjoint Thomas, venu reprendre avec son frère l’entreprise familiale spécialisée dans le tourisme à Méaudre (Isère), la jeune ingénieure agronome s’est résolue à trouver une activité davantage compatible avec le climat local. « L’objectif était de cibler une production que je puisse conduire toute l’année, en intérieur », résume-t-elle. Après avoir été conseillère en maraîchage à la chambre d’agriculture de Vendée, Mélissa a opté pour la production de champignons qu’elle a pu expérimenter dans un petit local. « En 2020, lorsque nous habitions à Méaudre, j’ai commencé à produire des pleurotes et shiitakés dans notre garage », raconte-t-elle. Hélas, les coûts de l’immobilier sur ce secteur du Vercors ne lui permettent pas d’acquérir les bâtiments nécessaires à la concrétisation d’un projet à plus grande échelle. Le jeune couple cherche alors côté drômois et trouve à Saint-Martin-en-Vercors le lieu idéal, une maison dotée d’une ancienne étable que la jeune femme va pouvoir transformer en champignonnière. Un lieu qu’elle a baptisé Ferme Primordia (1). « J’ai été accompagnée par la chambre d’agriculture de la Drôme pour mon installation avec DJA (2) qui est effective depuis février 2021. Après les travaux nécessaires, j’ai pu attaquer la production en décembre 2021 », précise Mélissa Galleron. Aujourd’hui elle dispose de 150 m² dédiés à son activité, dont 75 m² où poussent les champignons. Un espace est réservé à la production de pleurotes, l’autre à celle de shiitakés.
70 kg de champignons par semaine
Pour l’instant la jeune femme achète des substrats à base de paille prêts à produire, en provenance de l’Allier. Quand elle les reçoit, une partie seulement est mise à fructifier. Le reste est conservé en chambre froide pour étaler les récoltes. Pour passer à la phase de fructification, la productrice doit modifier les conditions d’environnement du substrat notamment en créant une atmosphère plus humide, plus fraîche et plus riche en oxygène. « Deux semaines après cette phase, on obtient la première volée [premier lot, ndlr] de champignons. C’est souvent la plus abondante. La plupart des producteurs vont jusqu’à trois volées par substrat », précise-t-elle.
Après une pause professionnelle pour maternité, Mélissa Galleron a relancé sa production fin 2023. Elle se fixe désormais pour objectif de produire 70 kg de champignons par semaine commercialisés auprès d’une quinzaine de restaurants, de Saint-Jean-en-Royans jusqu’à Villard-de-Lans, deux marchés hebdomadaires (La Chapelle-en-Vercors et Grenoble), des épiceries et magasins bios. Pour alléger le temps passé en livraisons, elle en alterne certaines avec les producteurs de fromages de la Chèvrerie du Bard installés sur la même commune et avec qui elle partage quelques clients. Elle compte aussi développer la transformation de ses produits (pleurotes au vinaigre, soupes, champignons secs…) et dispose à cet effet d’un petit atelier.
Produire son propre substrat
Reste également une étape importante : lancer la production de son propre substrat à partir de paille locale. Pour cela, il lui faudra pasteuriser cette paille puis réussir l’inoculation (3) (ou ensemencement) et enfin l’incubation, c’est-à-dire la phase de colonisation du substrat par le mycélium. L’enjeu étant que le substrat n’ait pas été contaminé par d’autres micro-organismes qui concurrenceraient le champignon attendu. Si cette étape est loin d’être évidente et que peu de producteurs s’y frottent, préférant la laisser aux mains d’une poignée de fournisseurs experts en la matière, Mélissa Galleron compte s’y essayer. « J’ai déjà fait quelques essais et je projette vraiment de fabriquer mon substrat même s’il y a un gros enjeu et qu’il ne faut pas se rater », poursuit la productrice.
Elle prévoit de produire des champignons dix mois sur douze. « Dans l’idéal, il faut garder la salle où l’on récolte à 16 °C. Ici, l’hiver, j’atteins plutôt 11 °C, donc les champignons poussent moins rapidement. L’été quand la température dépasse 18 °C, il devient compliqué de produire. Tant que je peux, je rafraîchis en aérant la nuit mais ensuite j’arrête ma production pour prendre des congés. Cela permet également un vide sanitaire bienvenu lorsque les températures grimpent. Au retour, il faut compter un mois pour remettre en route la production », explique la jeune femme.
Dans un coin de sa tête, elle conserve aussi son idée de départ : celle de produire des légumes. « J’ai 2 hectares de terre sur lesquels pourquoi pas diversifier mon activité avec un peu de maraîchage, précise Mélissa Galleron. Mais, même sous serre, je sais que la fenêtre pour produire ici sur le Vercors sera très limitée, d’où les champignons pour m’assurer un revenu ».
Note : (1) Un primordium (au pluriel primordia) est une ébauche d’organe d’une plante ou d’un champignon.
(2) DJA : dotation jeune agriculteur.
(3) À partir de mycélium incubé sur grains d’orge ou de millet.