Agrivoltaïsme
Maintenant que le cadre est clair

Berty Robert
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Le pôle d’innovations en agroécologie Agronov a rassemblé les acteurs de l’agrivoltaïsme à l’occasion d’un événement qui faisait écho à l’évolution législative fixant un cadre précis pour la production d’électricité solaire sur des terres agricoles.

Maintenant que le cadre est clair
Ces premières Odyssées de l'agrivoltaïsme ont permis de nombreux échanges.

Le 9 avril, un décret gouvernemental a fixé un cadre précis pour le développement de la production d’électricité solaire sur les espaces agricoles, naturels ou forestiers. Cette clarification était attendue et elle a servi de point de départ aux Odyssées de l’agrivoltaïsme en Bourgogne-Franche-Comté, présentés le 4 juin par le pôle d’innovation en agroécologie Agronov, en partenariat avec les énergéticiens membres du pôle (TotalEnergies Renouvelables, EDF renouvelables, Engie Green et TSE). C’est dans les locaux de la coopérative Dijon Céréales, à Longvic, qu’étaient rassemblés à cette occasion un grand nombre d’acteurs concernés par cette question, au premier rang desquels, les agriculteurs. La Côte-d’Or est un département bien pourvu en démonstrateurs agrivoltaïques (Avec ceux de TSE et TotalEnergies à Verdonnet et Channay). On peut y ajouter le démonstrateur TSE d’Amance, en Haute-Saône et si seulement 50 000 exploitations agricoles étaient engagées dans la production énergétique en France, en 2018, elles sont aujourd’hui 90 000.

Une quarantaine de projets

« Le but de notre événement, indiquait Frédéric Imbert, président d’Agronov, c’est d’éclairer les pensées de chacun autour de ces sujets ». La nécessité de développer des installations agrivoltaïques est incontournable, comme le rappelait Bertrand Aucordonnier, de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe BFC), en raison d’une hausse de l’électrification des usages. En BFC, on comptait en avril une trentaine d’installations photovoltaïques sur sol agricole et une quarantaine avaient obtenu leur autorisation, principalement sur la Côte-d’Or, l’Yonne, la Nièvre la Saône-et-Loire et la Haute-Saône. L’une des interventions lors de ces « Odyssées » portait sur le cadre légal et réglementaire entourant l’agrivoltaïsme. Audrey Juillac, agricultrice dans le Lot-et-Garonne et présidente de la Fédération française des producteurs agrivoltaïques (FFPA) qui rassemble 3 000 agriculteurs, estime que le décret d’avril « est assez bien fait, mais il ne règle pas totalement la question de l’acceptabilité des projets. Il faudra se pencher sur la question du partage de la valeur et des enjeux de contractualisation sont encore à finaliser ». Elle constate aussi qu’aujourd’hui, les agriculteurs sont mieux guidés sur ces projets mais des problèmes récurrents de raccordement des installations au réseau persistent. Elle insiste enfin sur un point : « les projets collectifs ont beaucoup d’intérêt : ils permettent de souder un territoire, avec des acteurs de diverses productions agricoles ».

« Il faut des projets diversifiés »

Christophe Richardot, directeur général de Dijon Céréales et d’Alliance BFC, fait le constat de l’accélération des choses : « Nous avons eu des débats, nous nous sommes demandé si c’était bien notre métier. Il fallait que ce soit des projets collectifs, partagés sur plusieurs exploitations agricoles, que cela assure un revenu supplémentaire. On co-construit avec des énergéticiens. On amène les adhérents sur une contractualisation à 40, 50 ans. Le monde agricole marque ainsi son empreinte vis-à-vis des nouveaux besoins de la population. On responsabilise aussi nos adhérents face à des sociétés pas toujours sérieuses. Sur notre région, on relève 41 opérateurs mais, à nos yeux, il y en a 6 de sérieux ». Pour Aline Chapuliot (Engie Green), l’agrivoltaïsme est un défi de société : « On a 15 ans de recul sur le photovoltaïque, on sait faire techniquement, juridiquement, on est capable de passer à l’agrivoltaïsme. Il faut des projets très diversifiés en technologie et en taille car les problématiques agricoles ne sont les mêmes nulle part ». Pour Alexandre Margain (EDF), la nécessité de quintupler à brève échéance la puissance solaire en France rend évidente la montée en puissance de l’agrivoltaïsme mais en prenant les choses dans le bon ordre : « Avant, on faisait appel à un éleveur pour qu’il vienne pâturer entre nos panneaux, maintenant, on part des besoins de l’éleveur ou du cultivateur pour adapter nos installations. L’agriculteur apparaît comme un co-développeur du projet et l’énergéticien est soumis à une obligation de production agricole ». Naturellement, dans ce contexte d’accélération, les regards se tournent aussi beaucoup vers les responsables de réseau d’acheminement de l’énergie. Agriculteurs, énergéticiens et responsables de réseau vont devoir travailler ensemble. Mickaël Carlot, directeur du développement des projets chez TSE, en convenait : « L’agrivoltaïsme peut permettre d’aller vite pour répondre aux besoins d’électricité solaire en France, d’ici 2035, mais il est indispensable de prendre garde à la bonne répartition des projets sur tout le territoire. C’est ainsi qu’on préservera les équilibres entre productions énergétiques et productions nourricières agricoles, alors qu’on sait que les besoins en énergie solaire devraient occuper 1 % de la Surface agricole utile (SAU) française… »