Zones défavorisées simples
Leur territoire est oublié
La révision des ZDS est pour le moment fatale à plusieurs communes de la vallée de l’Ouche et de l’arrière-côte.

Le nouveau périmètre des zones défavorisées simples fait grincer des dents en Côte-d’Or. La dernière version n’intègre toujours pas certaines communes de l’arrière-côte et de la vallée de l’Ouche pourtant sujettes à de nombreuses contraintes géographiques (climat, pente, mauvaise productivité de la terre, milieu naturel...). Les agriculteurs concernés redoutent la perte de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) qui représente un pourcentage parfois très important de leurs revenus. L’accès à des majorations pour les aides à l’installation et à l’investissement passe également par ces ZDS. Trente-cinq exploitations agricoles ont aujourd’hui leur siège social dans cette zone de Côte-d’Or non reconnue. Un certain nombre de fermes «extérieures» possèdent des terres sur ce même territoire et pourraient également y laisser des plumes.
Réunion à Bretenière
Le problème reste le même : le produit brut standard de la viticulture augmente les résultats de cette petite région et font sortir les exploitations agricoles du dispositif. La FDSEA et toute la profession martèlent depuis des mois sur le sujet, mais sans réelle avancée. Une énième réunion s’est encore déroulée ce lundi à la Maison de l’agriculture en présence des parlementaires. En ce qui concerne le calendrier des ZDS, le gouvernement fait savoir que le tracé définitif ne serait pas dévoilé avant la validation par la Commission à Bruxelles prévue «au printemps». Les nouvelles cartes sont censées entrer en vigueur au 1er janvier 2019. Pour rappel, cette réforme a été rendue obligatoire au niveau européen à la suite des critiques de la Cour des comptes européenne en 2003: celle-ci avait estimé qu’une «hétérogénéité trop importante existait entre les États membres» et que le maintien de certaines zones n’était pas «justifié».
Encore un espoir ?
Stéphane Travert compte demander, auprès de la Commission européenne, la «prise en compte d’un critère de continuité territoriale» pour faire «réintégrer» les communes qui perdront leur éligibilité, si celles-ci sont situées dans une zone entièrement classée. Le ministre de l’Agriculture a promis que les exploitants amenés à sortir du nouveau zonage «bénéficieraient de mesures d’accompagnement destinées à les aider à faire face à leur nouvelle situation».
Eux-aussi sont concernés
Laurent Brocard et David Doyer ( photo 1 ), éleveurs à Chaudenay-le-Château et Chaudenay-la-Ville, sont tous les deux dans le même cas de figure : leur siège social a beau être en zone ZDS, l’attribution de leur ICHN est menacée car plus de 20% de leurs surfaces herbagères sont situées dans l’arrière-côte. «Pour ma part, 50 hectares de mes prairies sont à Crugey, une commune qui est juste à côté de chez moi» indique Laurent Brocard, élevant seul un troupeau de 70 mères charolaises, «cela représente 33% de ma surface. D’après la réglementation et si rien ne change, cela m’interdit l’ICHN qui représente environ 7 000 euros pour mon exploitation». David Doyer, en Gaec avec son épouse Sarah, atteint la barre des 40%, avec des terres à Thorey-sur-Ouche et Crugey : «le problème est identique et pour nous, la perte serait de
14 000 euros par an. C’est vraiment du grand n’importe quoi. Les résultats de la viticulture faussent tout le calcul, l’information a été remontée à maintes reprises au plus haut rang sans le moindre changement. Ce n’est pourtant pas difficile à comprendre». Les deux éleveurs suivent le dossier des ZDS de très près depuis maintenant trois ans. Mais rien n’évolue à l’approche de la date fatidique : «tous les critères biophysiques requis sont pourtant présents dans notre secteur. Les potentiels des terres ne dépassent pas les 55q/ha. Nous sommes dans de la roche, il n’y a pas plus de 20 centimètres de terre. Nous aurions plusieurs hectares de vignes ici, nous pourrions un peu plus comprendre cette situation, mais ce n’est pas le cas». Si le dossier n’évoluait pas favorablement ces prochaines semaines, un sérieux coup de frein serait à prévoir au sein de leur exploitation. Laurent Brocard aborde un certain nombre de difficultés déjà rencontrées et n’hésite pas à partager son dernier bilan, datant du 30 juin 2017 : «c’est le plus mauvais que j’ai eu depuis mon installation en 1995, j’ai perdu plus de 5 000 euros. Imaginez ce que ce sera s’il n’y plus l’ICHN». Le son de cloche est le même pour David Doyer, ayant l’impression «de se battre contre des moulins à vent».
«Quelque chose d’impensable»
Le Gaec de Bessey (photo 2 ), à Bessey-en-Chaume, n’ose même pas imaginer ne plus toucher l’ICHN, elle qui représente un montant annuel d’un peu plus de 15 000 euros pour cette exploitation de polyculture-élevage comptant 150 mères Charolaises et Limousines. «Inutile de dire que la perte serait extrêmement importante pour nous» lance Vincent Parigot, en compagnie de son frère Frédéric. L’éleveur de 46 ans suit l’évolution du dossier ZDS depuis plusieurs mois sans voir la moindre avancée : «une visite du ministre était même prévue chez nous, à Bessey, lors du congrès de l’AGPB à Dijon. Mais il n’y a finalement rien eu car Stéphane Travert ne s’est pas déplacé. Nous nous sentons clairement exclus. Dans notre secteur, des gens concernés, il n’y a pas tant que ça en réalité, car dès que l’on passe de l’autre côté de Bligny-sur-Ouche, la zone rentre dans les ZDS. Ici à Bessey-en-Chaume, nous sommes pourtant sur des terrains superficiels. J’aurais aimé les montrer au ministre. Notre secteur est aussi sensible à la sécheresse, cela devient compliqué dès qu’il ne pleut pas pendant quinze jours. Nous avons affaire à quelque chose d’impensable. Si les cours de la viande et des céréales n’allaient pas aussi mal, le moral irait certainement mieux. Aujourd’hui, tout va dans le mauvais sens, j’en veux pour preuve les projets d’importations de viandes d’Amérique qui sont une honte. J’espère que le dossier des ZDS va évoluer favorablement, car ça ne sera pas possible autrement».
Ils ne comprennent pas
Le Gaec Jacotot (photo 3 ), à Mavilly-Mandelot, risque très gros avec cette révision du zonage des zones défavorisées simples. «Pour nous, l’ICHN représente 21 000 euros annuels. Si on nous enlève ça, ce sera forcément très compliqué. Le coup de frein serait énorme pour notre exploitation» lance Cyril Jacotot, en compagnie de son frère Olivier et de sa mère Colette, près de leur troupeau de 155 vaches charolaises. Les deux frères ont participé à l’action syndicale du 21 février à Dijon, sans succès : «nos élus et responsables politiques ne semblent pas être très intéressés ni concernés par l’agriculture, c’est bien dommage. On nous laisse dans une situation incompréhensible. La viticulture fausse tous les chiffres. Si le secteur dans lequel nous sommes n’est pas défavorisé, je ne comprends plus rien. Les terrains sont très pauvres. En grandes cultures, quand nous faisons 45 ou 50q/ha en blé, c’est une bonne année. Nous sommes face à un énorme paradoxe car des communes ayant des potentiels bien moins faibles que les nôtres sont dans le nouveau zonage. En plus, nous sommes en zone Natura 2000, c’est dire...». Dans l’attente de nouvelles décisions, les éleveurs du Gaec Jacotot prennent leur mal en patience et tentent de s’informer au mieux, sans vraiment bien comprendre ce qui est en train de leur arriver, à l’image des autres éleveurs de l’arrière-côte et de la vallée de l’Ouche.
Réunion à Bretenière
Le problème reste le même : le produit brut standard de la viticulture augmente les résultats de cette petite région et font sortir les exploitations agricoles du dispositif. La FDSEA et toute la profession martèlent depuis des mois sur le sujet, mais sans réelle avancée. Une énième réunion s’est encore déroulée ce lundi à la Maison de l’agriculture en présence des parlementaires. En ce qui concerne le calendrier des ZDS, le gouvernement fait savoir que le tracé définitif ne serait pas dévoilé avant la validation par la Commission à Bruxelles prévue «au printemps». Les nouvelles cartes sont censées entrer en vigueur au 1er janvier 2019. Pour rappel, cette réforme a été rendue obligatoire au niveau européen à la suite des critiques de la Cour des comptes européenne en 2003: celle-ci avait estimé qu’une «hétérogénéité trop importante existait entre les États membres» et que le maintien de certaines zones n’était pas «justifié».
Encore un espoir ?
Stéphane Travert compte demander, auprès de la Commission européenne, la «prise en compte d’un critère de continuité territoriale» pour faire «réintégrer» les communes qui perdront leur éligibilité, si celles-ci sont situées dans une zone entièrement classée. Le ministre de l’Agriculture a promis que les exploitants amenés à sortir du nouveau zonage «bénéficieraient de mesures d’accompagnement destinées à les aider à faire face à leur nouvelle situation».
Eux-aussi sont concernés
Laurent Brocard et David Doyer ( photo 1 ), éleveurs à Chaudenay-le-Château et Chaudenay-la-Ville, sont tous les deux dans le même cas de figure : leur siège social a beau être en zone ZDS, l’attribution de leur ICHN est menacée car plus de 20% de leurs surfaces herbagères sont situées dans l’arrière-côte. «Pour ma part, 50 hectares de mes prairies sont à Crugey, une commune qui est juste à côté de chez moi» indique Laurent Brocard, élevant seul un troupeau de 70 mères charolaises, «cela représente 33% de ma surface. D’après la réglementation et si rien ne change, cela m’interdit l’ICHN qui représente environ 7 000 euros pour mon exploitation». David Doyer, en Gaec avec son épouse Sarah, atteint la barre des 40%, avec des terres à Thorey-sur-Ouche et Crugey : «le problème est identique et pour nous, la perte serait de
14 000 euros par an. C’est vraiment du grand n’importe quoi. Les résultats de la viticulture faussent tout le calcul, l’information a été remontée à maintes reprises au plus haut rang sans le moindre changement. Ce n’est pourtant pas difficile à comprendre». Les deux éleveurs suivent le dossier des ZDS de très près depuis maintenant trois ans. Mais rien n’évolue à l’approche de la date fatidique : «tous les critères biophysiques requis sont pourtant présents dans notre secteur. Les potentiels des terres ne dépassent pas les 55q/ha. Nous sommes dans de la roche, il n’y a pas plus de 20 centimètres de terre. Nous aurions plusieurs hectares de vignes ici, nous pourrions un peu plus comprendre cette situation, mais ce n’est pas le cas». Si le dossier n’évoluait pas favorablement ces prochaines semaines, un sérieux coup de frein serait à prévoir au sein de leur exploitation. Laurent Brocard aborde un certain nombre de difficultés déjà rencontrées et n’hésite pas à partager son dernier bilan, datant du 30 juin 2017 : «c’est le plus mauvais que j’ai eu depuis mon installation en 1995, j’ai perdu plus de 5 000 euros. Imaginez ce que ce sera s’il n’y plus l’ICHN». Le son de cloche est le même pour David Doyer, ayant l’impression «de se battre contre des moulins à vent».
«Quelque chose d’impensable»
Le Gaec de Bessey (photo 2 ), à Bessey-en-Chaume, n’ose même pas imaginer ne plus toucher l’ICHN, elle qui représente un montant annuel d’un peu plus de 15 000 euros pour cette exploitation de polyculture-élevage comptant 150 mères Charolaises et Limousines. «Inutile de dire que la perte serait extrêmement importante pour nous» lance Vincent Parigot, en compagnie de son frère Frédéric. L’éleveur de 46 ans suit l’évolution du dossier ZDS depuis plusieurs mois sans voir la moindre avancée : «une visite du ministre était même prévue chez nous, à Bessey, lors du congrès de l’AGPB à Dijon. Mais il n’y a finalement rien eu car Stéphane Travert ne s’est pas déplacé. Nous nous sentons clairement exclus. Dans notre secteur, des gens concernés, il n’y a pas tant que ça en réalité, car dès que l’on passe de l’autre côté de Bligny-sur-Ouche, la zone rentre dans les ZDS. Ici à Bessey-en-Chaume, nous sommes pourtant sur des terrains superficiels. J’aurais aimé les montrer au ministre. Notre secteur est aussi sensible à la sécheresse, cela devient compliqué dès qu’il ne pleut pas pendant quinze jours. Nous avons affaire à quelque chose d’impensable. Si les cours de la viande et des céréales n’allaient pas aussi mal, le moral irait certainement mieux. Aujourd’hui, tout va dans le mauvais sens, j’en veux pour preuve les projets d’importations de viandes d’Amérique qui sont une honte. J’espère que le dossier des ZDS va évoluer favorablement, car ça ne sera pas possible autrement».
Ils ne comprennent pas
Le Gaec Jacotot (photo 3 ), à Mavilly-Mandelot, risque très gros avec cette révision du zonage des zones défavorisées simples. «Pour nous, l’ICHN représente 21 000 euros annuels. Si on nous enlève ça, ce sera forcément très compliqué. Le coup de frein serait énorme pour notre exploitation» lance Cyril Jacotot, en compagnie de son frère Olivier et de sa mère Colette, près de leur troupeau de 155 vaches charolaises. Les deux frères ont participé à l’action syndicale du 21 février à Dijon, sans succès : «nos élus et responsables politiques ne semblent pas être très intéressés ni concernés par l’agriculture, c’est bien dommage. On nous laisse dans une situation incompréhensible. La viticulture fausse tous les chiffres. Si le secteur dans lequel nous sommes n’est pas défavorisé, je ne comprends plus rien. Les terrains sont très pauvres. En grandes cultures, quand nous faisons 45 ou 50q/ha en blé, c’est une bonne année. Nous sommes face à un énorme paradoxe car des communes ayant des potentiels bien moins faibles que les nôtres sont dans le nouveau zonage. En plus, nous sommes en zone Natura 2000, c’est dire...». Dans l’attente de nouvelles décisions, les éleveurs du Gaec Jacotot prennent leur mal en patience et tentent de s’informer au mieux, sans vraiment bien comprendre ce qui est en train de leur arriver, à l’image des autres éleveurs de l’arrière-côte et de la vallée de l’Ouche.