La ferme du Bourg de pères en filles
Des projets et des envies plein la tête, Marilou et Manon Charvat ont repris la ferme familiale début 2023. En plus de l’élevage de bovins allaitants, elles ont lancé une pension équine et une activité de production d’osier.

Une nouvelle génération a pris possession de la ferme du Bourg à Valherbasse, plus précisément sur l’ancienne commune de Montrigaud. Après Robert Charvat et Hubert Charvat, éleveurs de père en fils, c’est au tour de Marilou et Manon Charvat d’apporter leur pierre à l’édifice familial. Les jeunes femmes, âgées respectivement de 28 et 30 ans, ont pris la suite de l’élevage de leur père Hubert, fraîchement retraité après plus de quarante années d’activité. Pas forcément évidente, l’installation des deux sœurs est toujours en cours. Depuis leur reprise en janvier 2023, Marilou et Manon Charvat ont lancé deux autres activités en complément de l’élevage de bovins allaitants.
Des chemins hasardeux
Marilou Charvat, 28 ans, n’échappe pas aux réflexions qui touchent sa génération : changement climatique, sens du travail, place dans la société… La jeune femme a eu mille vies avant de s’orienter vers la ferme familiale. Après des études en génie de l’environnement et quelque temps en tant que salariée au syndicat de la rivière de l’Herbasse, « je me suis rendu compte que je ne pouvais pas rester derrière un bureau », confie l’agricultrice. L’envie de reprise de la ferme émerge notamment après des expériences dans le milieu brassicole. « J’imaginais produire du grain au verre mais j’avais 22 ans et ça me paraissait trop ambitieux. Je ne voulais pas m’installer seule en agriculture. C’était un gros frein pour moi, témoigne Marilou Charvat. Finalement, j’ai suivi une formation de massage bien-être et j’ai travaillé dans plusieurs stations de ski ».
À l’hiver 2022-2023, la jeune femme a ouvert un cabinet partagé à Montrigaud. En parallèle, elle s’est associée à sa sœur pour reprendre la ferme familiale. De son côté, Manon Charvat 30 ans, a travaillé dans l’agroalimentaire avant de partir dans les sciences de l’éducation. Jusqu’à la reprise avec sa sœur, elle a travaillé en tant qu’accompagnante des élèves en situation de handicap en milieu scolaire. Au début, elle a conservé son activité à mi-temps mais, rapidement, elle s’est mise à plein temps sur la ferme avec sa sœur. Actuellement, elle suit un BPREA au CFPPA de Bourg-lès-Valence. Avec cette formation, la jeune femme pourrait bénéficier d’une dotation jeune agriculteur pour développer les nouveaux projets de la ferme.
La liberté d’entreprendre
Installé depuis les années 1980, Hubert Charvat a cessé son activité en janvier 2023. L’éleveur laitier a subi de plein fouet les crises laitières en 2009 et 2015. Il a adopté un « système particulier, hybride entre laitier et allaitant » rapporte Marilou Charvat. « Nous faisons circuler matins et soirs les mères dans les couloirs de tété. Ainsi, chaque mère nourrit plusieurs veaux. Nous élevons 1,8 veau par vache en simultané », explique la jeune agricultrice. Les veaux sont achetés à la coopérative Sicarev. « Nous manquons de surfaces pour avoir plus d’animaux. Nous possédons 40 hectares de parcelles dont 70 % en prairies naturelles et 30 % en prairies temporaires », expose Marilou Charvat.
L’avantage de conserver un petit cheptel, c’est notamment de « limiter la circulation de maladies ». Marilou et Manon Charvat souhaitent conserver la revente de la viande auprès de bouchers et en direct à la ferme. Toutefois, elles constatent que « les charges augmentent mais peu le prix de vente ». En parallèle, elles ont développé une pension équine en 2023 qui peut accueillir jusqu’à dix chevaux. L’occasion pour Marilou Charvat de nourrir sa passion pour l’équitation. Enfin, la ferme du Bourg s’est aussi lancée dans la production d’osier. Les agricultrices louent une parcelle depuis 2024 à Saint-Vérand en Isère. Marilou et Manon Charvat ont assuré leur première récolte de dix variétés différentes cet hiver. Le tri et la mise en bottes restent à faire. Un « marché de niche aux débouchés intéressants », selon elles. Leur production pourrait ainsi être valorisée en revente de boutures, en vannerie ou encore en architecture végétale. Cette reprise de la ferme familiale offre « un terrain de jeux dans lequel on sent un domaine des possibles assez vaste », s’enthousiasme Marilou Charvat.
S’ouvrir au public

Manon Charvat souhaite développer l’ouverture au public de la ferme à travers un projet de ferme pédagogique. « Les gens veulent savoir ce qu’ils mangent. Nous voulons être transparentes sur nos méthodes d’élevage. Il y a une méconnaissance du monde agricole », explique Marilou Charvat. Ce projet pourrait voir le jour cette année. En attendant, la ferme du Bourg a déjà pris l’habitude de s’ouvrir au public, notamment avec le Festigrange, un événement organisé par la commune de Valherbasse. L’année dernière, 400 personnes se sont retrouvées sous la grange de la ferme de la famille Charvat.