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Jeunes agriculteurs

L’heure de passer à l’action

JA21, réuni en assemblée générale le 16 février, est à l’initiative de la manifestation syndicale qui s’est déroulée ce mercredi à Dijon.
Par Aurélien Genest
L’heure de passer à l’action
François-Xavier Lévêque a souligné un certain nombre d’incohérences «à la française».
Sacrée atmosphère vendredi dernier à Sombernon. Devant les difficultés récurrentes du métier et des orientations politiques «incompréhensibles», les Jeunes agriculteurs de Côte-d’Or ont décidé de monter au créneau. Les responsables du syndicat ont profité d’une belle mobilisation et de la présence de plusieurs politiques et élus pour faire passer un certain nombre de messages la semaine dernière lors de leur assemblée générale. Leur colère s’est notamment traduite par une action ce mercredi 21 février à Dijon (lire notre prochaine édition).

Trop de fermes dans le rouge
Le président François-Xavier Lévêque a lancé ce rendez-vous en résumant le difficile quotidien des agriculteurs : «La dernière campagne est à oublier. Nous cumulons une nouvelle fois l’ensemble des aléas climatiques. Les prix ne cessent de fondre, les charges n’arrêtent pas de grimper et le soutien de l’état continue de diminuer. Trop nombreuses sont les exploitations en difficulté à ce jour dans ce département». L’année 2017 a sonné la fin d’un «système politique à bout de souffle» avec l’arrivée d’Emmanuel Macron : «dans un premier temps, un plan d’investissement d’un milliard d’euros par an a été annoncé. Nous arrivons bientôt en mai et nous ne voyons toujours rien arriver. Espérons qu’il y ait deux milliards la seconde année». Le président des JA a évoqué les États généraux de l’alimentation : «je ne vais pas critiquer cette action qui n’en est qu’à son début. Une meilleure répartition des marges et un prix fixé en fonction des coûts de production : cela donne envie. Mais quand vous rencontrez le député européen Michel Dantin, qu’il vous donne en exemple la filière abricots et qu’il vous dit que cela va marcher, permettez-vous de rester sceptique quant à son application. Nos prix de vente, eux, sont principalement décidés à la bourse de Chicago».

Incompréhensions multiples
François-Xavier Lévêque a déploré les accords de libre échange impliquant l’import de 99 000 tonnes de viandes bovines d’Amérique : «Notre gouvernement se mobilise pour une meilleure répartition des marges, mais annonce dans le même temps la fin de la filière des bovins viande avec ce genre de décision. Ces viandes sont gonflées aux hormones et nourries au OGM, nous sommes scandalisés. Il y a aussi des soja OGM qui vont arriver par les ports et qui mettront à mal la filière du soja garanti sans OGM qui était en train de naître en France». Les dérives du gouvernement, à l’image de la future interdiction du glyphosate, trouvent leur explication dans une certaine désinformation : «nous devons faire face à ce problème tous les jours. Les émissions de télévision contre nos métiers, et sur nos chaines publiques, ne nous aident vraiment pas. Elles répondent, soit disant, aux attentes des Français. Dans le même raisonnement, il serait grand temps de monter une commission sur l’utilité des députés, car beaucoup de Français se demandent pourquoi ils sont aussi nombreux à l’assemblée».

Les dossiers des zones défavorisées simples (plusieurs communes du 21 doivent encore intégrer le zonage), du parc national (zoom sur les futures contraintes agricoles), des DPB (baisse inquiétante de leur montant depuis dix ans), des MAEC herbagères (certains montants vont devoir être remboursés d’ici la fin de l’année), et de la baisse des installations en Côte-d’Or (seulement 60 l’an passé ) ont fait l’objet de discussions lors de cette assemblée.

Au plus haut rang, rien ne va plus

Le vice-président Antoine Carré a repris la citation de Vincent Lavier, qui avait mis en avant l’existence d’«aléas politiques» fin janvier lors des vœux de la profession : «Ce terme est parfaitement juste, les exemples sont malheureusement nombreux. Nous avons un ministre absent, transparent et lâche. Stéphane Travert vient d’annuler pour la deuxième fois en peu de temps sa visite dans le département. Il est inadmissible et insupportable que l’agriculture ne soit pas prise en considération dans un pays comme la France, réputé jusqu’à présent pour son excellence en matière de production. Notre président de la République nous a mis un ministre de l’écologie qui, lui, saura s’occuper des agriculteurs... Mais quand aurons-nous droit à une politique raisonnée, scientifique et concrète, une politique qui mette en avant la production et la rentabilité ? Je m’adresse à tous les élus présents dans cette salle : on ne peut pas gouverner un pays en se basant uniquement sur des attentes sociétales. La profession doit être consultée avant toute annonce ou toute prise de décision. Je rappelle qu’il n’y a pas de fondement scientifique ni de raisonnement logique dans les attentes sociétales. Des exemples ? Les gens veulent du bio mais sont contre le labour. Les gens sont en faveur du semis direct mais personne ne veut plus entendre parler de glyphosate. Les gens veulent de la qualité et du local, mais une fois devant les rayons, il n’y a que le bas prix qui compte». Antoine Carré a également déploré les «nombreux contrôles depuis le début d’année» : «ils sont perçus comme un acharnement. Nous voudrions un peu plus de souplesse et à l’inverse, un peu plus de rigueur et d’informations au sujet de la conditionnalité». Une question «fondamentale» se pose d’après le Jeune agriculteur : «la France veut-elle encore de son agriculture ?». Une chose est sûre : JA ne lâchera rien : «nous appelons à la mobilisation ce mercredi à Dijon pour dénoncer les accords du Mercosur, appuyer la reconnaissance des zones à faibles potentiels et demander un rééquilibrage des DPB à hauteur de 250 €minimum pour tous les producteurs de tous les départements. Si nous ne bougeons pas maintenant, alors que toute la France est prête à le faire, nous perdrons toute crédibilité. Comme le disait l’Allemand Bertolt Brecht : celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu».