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Amiante

L'ami qui hante...

Depuis 1997, l'usage d'amiante est interdit en France. Malgré tout, il est encore possible d'en trouver dans les toitures, les faux plafonds ou encore les gaines de ventilations. Mais, qu'implique sa présence et surtout, comment s'en débarrasser… dans les règles ?

Par Chloé Monget et Étienne Bourgy (CA 58)
L'ami qui hante...
Bâtiment agricole avec une toiture en fibro récent. Crédits photos : Isabelle DEGROOTE conseillère bâtiments CA89

Selon l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation et de la santé (Anses), « l'amiante est un minéral fibreux de la famille des silicates, minéraux très répandus dans la croûte terrestre. Présents naturellement dans les roches, les silicates extraits sont ensuite transformés en fibres minérales par un processus mécanique pour pouvoir être utilisées par l’industrie » (1). Ce matériau fut donc largement utilisé à partir des années 1860 dans l'industrie du textile puis dans celle du bâtiment à partir des années soixante-dix, dans l'Hexagone et à l'étranger. En effet, la fibre d'amiante présentait des avantages indéniables : coût d'extraction faible, résistance au feu, faible conductivité thermique et électrique, etc. De par ses qualités, elle fut utilisée dans la fabrication d'isolant thermique, de faux plafonds ou encore de plaques ondulés ainsi que de canalisations. Mais, en 1997, tout change lorsque l'amiante est classé cancérogène (2) par le Centre International de Recherche sur le Cancer et suivit par l'interdiction totale de son utilisation en France (3). Quelques années plus tard, une directive européenne interdit également son utilisation pour tous les pays membres à partir de 1er janvier 2005 (4).

Quels sont les dangers ?

Si l'amiante est donc proscrit dans les textes depuis longtemps, ce matériau est encore présent dans un certain nombre de bâtiments. Mais, quels sont les risques de l'amiante ? Pour répondre à cette question, la Ligue contre le cancer détaille (5) : « Lorsque l’amiante est endommagé, des microscopiques particules, invisibles à l’œil nu, sont dans l’air et peuvent être respirées. Plus la particule sera petite, plus elle pourra pénétrer dans les voies respiratoires. Plus la fibre est longue et fine, plus le corps humain aura de la difficulté à l’évacuer. Une fois arrivé dans les voies respiratoires, les particules peuvent interagir avec les cellules des organes où elles se trouvent (dont le larynx, les bronches, les poumons et la plèvre) ou avec des cellules sanguines qui peuvent alors les disséminer vers d’autres organes (dont les ovaires, le colon, le rectum, l’estomac) et développer des maladies. L’amiante peut être responsable de différentes pathologies, notamment au niveau pulmonaire. Les maladies surviennent généralement plusieurs années après l’exposition à l’amiante ». En résumé, c'est l'inhalation des fibres volatiles qui peuvent déclencher certaines maladies. À cause de cela, il est obligatoire de respecter certaines étapes avant toute intervention.

Dans quelles conditions ?

Dans un premier temps il faut réaliser obligatoirement un repérage avant travaux (RAT) depuis le 18 juillet 2019 (6) et pour le « bricolage » fait soi-même, il est fortement préconisé de réaliser un diagnostic par un professionnel avant toute intervention afin de cibler les endroits où se trouverait potentiellement de l'amiante. Sur ce point, il est indispensable de se renseigner avant tout choix d'une entreprise, car les diagnostiqueurs ainsi que les organismes réalisant les travaux doivent être certifiés (voir encadré pour les conditions de certifications).

Pour mémoire, l'organisme de travaux doit obligatoirement être différent du diagnostiqueur (7). Le diagnostic permettra notamment de déterminer le niveau de risque et donc les conditions dans lesquelles les travaux seront effectués. Ainsi, trois niveaux de risques existent  (8) : « Premier niveau : empoussièrement dont la valeur est inférieure à 100 fibres par litre ; Deuxième niveau : empoussièrement dont la valeur est supérieure ou égale à 100 fibres par litre et inférieure à 6 000 fibres par litre ; Troisième niveau : empoussièrement dont la valeur est supérieure ou égale à 6 000 fibres par litre et inférieure à 25 000 fibres par litre ». D'ailleurs, ces niveaux seront potentiellement mis à jour au fur et à mesure des travaux comme le stipule l'article Article R4412-99 : « les résultats de son évaluation des risques pour chaque processus dans le document unique d'évaluation des risques. Il le met à jour à chaque modification de processus entraînant un changement de niveau d'empoussièrement ou lors de l'introduction de nouveaux processus ». En fonction du niveau de risque, les moyens et les coûts d'intervention ne seront pas les mêmes.

Durant les travaux, les déchets devront (9) être ramassés au fur et à mesure et conditionnés dans des emballages étiquetés (10). Puis, ils devront être évacués vers des centres spécifiques (voir encadré), le chantier devra enfin être totalement décontaminé. En fin de chantier, les documents devront être fournis par les entreprises au donneur d'ordre sont le « Bon de suivi déchets amiante » (BSDA) et le « Rapport de fin de travaux » (RFT). Le premier permettra de suivre le traitement des déchets et le second d'attester l'enlèvement de l'amiante ; ils pourront être demandés en cas de vente du bâtiment.

Au vu de tout cela, il est clair que procéder à l'enlèvement d'une toiture amiantée, par exemple, n'est pas un projet à prendre à la légère, puisqu'il requiert une certaine prospection, notamment pour trouver les organismes certifiés adéquats. Du temps et du financement (en fonction de la nature des travaux) sont donc nécessaires. Si certaines conditions ne sont pas respectées à la lettre, des sanctions sont prévues (voir encadré).

Les grandes étapes

1 - Le diagnostic amiante

Il est obligatoire avant travaux afin d'établir les conditions et donc le coût de l'intervention. Le coût du diagnostic par une entreprise certifiée s'élève à environ 500 euros HT.

2 - Trouver une entreprise certifiée pour réaliser les travaux
Pour rappel, l'entreprise réalisant les travaux doit être totalement indépendante de celle ayant réalisé le diagnostic. En fonction de la nature des travaux, l'entreprise devrait avoir une certification dite « sous-section3 » (ou SS3) pour le démantèlement et le retrait d'amiante ou une certification dite « sous-section 4 » (ou SS4) pour le remplacement partiel d'éléments (aucun démantèlement ou retrait n'est compris avec cette certification). Le coût des interventions sera déterminé par la nature de ces dernières, mais le désamiantage d'une toiture fibrociment amiantée qui est compris entre 35 et 75 € HT/m².

3 - Fin de travaux

L'entreprise de désamiantage doit déposer, emballer, transporter et traiter en centre d'enfouissement agréé les matériaux amiantés. Une fois cela fait, elle doit fournir au donneur d'ordre deux documents :
Le Bon de suivi déchets amiante (BSDA) ou est mentionné les dates de dépose, transport, centre de traitement et qui a réalisé ces opérations.
Le Rapport de fin de travaux (RFT) est également fourni et transmit pour clôturer le chantier de désamiantage.

4 - Suivi des déchets et sanctions

Le BSDA permettra de suivre le traitement des déchets via la plateforme développée par le ministère de la Transition Écologique. Voir : https://trackdechets.beta.gouv.fr/
Plus d'infos sur :

https://entreprendre.service-public.fr/vosdroits/R66705

https://faq.trackdechets.fr/informations-generiques/les-fondamentaux/quest-ce-que-trackdechets

Sanctions

Pour mémoire, la déclaration sur le site « trackdechets.beta.gouv.fr » pour les déchets d'amiante est obligatoire. Si cela n'est pas fait ou si la déclaration est erronée, des sanctions sont possibles (et cumulables) : 4 ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende (personne physique) ou 750 000 euros d'amende (personnes morales) ; amende prévue pour les contraventions de 4e classe est d'un montant de 750 euros (personne physique) ou 3 750 euros (personnes morales).

D'autres sanctions sont prévues dans le cas de non-respect de la réglementation du traitement des déchets : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000006143752/ (voir sous section 2)

Les leviers financiers possibles

Afin d'éliminer l'amiante, des aides existent. Pour les particuliers, en fonction des ressources, l'Anah peut en octroyer une dans le cadre de la lutte contre le logement indique, sous certaines conditions (https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F1328).

Pour les professionnels, une subvention « Amiante », pour financer des équipements, existe pour les entreprises de moins de 50 salariés et dépendant du régime général (https://www.ameli.fr/nievre/entreprise/sante-travail/aides-financieres/subventions-nationales/subvention-amiante)

Outre les aides financières, des prêts spécifiques peuvent aussi être enclenchés dans le cadre de désamiantage à l'image du prêt à l'amélioration de l'habitat (PAH). Ce dernier est régi par certains critères : être occupant du logement (locataire ou propriétaire) au titre d'une résidence principale ou encore bénéficier d'une prestation familiale. Son montant est plafonné à environ 1 000 euros et ne doit pas dépasser les 80 % des dépenses engagées. Plus d'infos : https://www.msa.fr/lfp/logement/pret-amelioration-habitat

Enfin, le photovoltaïque permet de financer sur les 20 ans de contrat de rachat d'électricité, le remplacement de ces toitures amiantées.

Les conditions de certifications

En France, il existe uniquement trois organismes délivrant et contrôlant les certifications des entreprises : Afnor, Qualibat ou Global Certification. La certification se base sur la norme NF X 46-010 (août 2012) pour les « Travaux de traitement de l'amiante. - Référentiel technique pour la certification des entreprises. - Exigences générales ». Si les conditions de cette dernière sont satisfaisantes, l'organisme certificateur délivre ou maintient une certification, conditionnée par la norme NF X 46-011 (décembre 2014) « Travaux de traitement de l'amiante - Modalités d'attribution et de suivi des certificats des entreprises ». (Arrêté du 25 juillet 2022 fixant les conditions de certification des entreprises - article 1). Là, ils seront attestés soit SS3 pour les travaux de retrait ou d'encapsulage d'amiante et de matériaux, d'équipements et de matériels ou d'articles en contenant, y compris dans les cas de démolition ; ou SS4 pour les interventions sur des matériaux, des équipements, des matériels ou des articles susceptibles de provoquer l'émission de fibres d'amiante.

voir : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000025819070

Contacts utiles

Afin de trouver les professionnels adaptés, voici des répertoires utiles :

Les diagnostiqueurs : https://diagnostiqueurs.din.developpement-durable.gouv.fr/index.action

Pour vérifier la validité de leur certification : https://diagnostiqueurs.din.developpement-durable.gouv.fr/index.action

Pour les collecteurs : https://www.dechets-chantier.ffbatiment.fr/rechercher-centres.aspx?ville=58000&page=resultat#

Pour les centres de traitements : https://www.dechets-chantier.ffbatiment.fr/rechercher-centres.aspx

FAQ

Ai-je le droit de percer ou de découper des plaques contenant de l’amiante afin de rénover mon bâtiment ? Puis-je confier cette tâche à mon salarié ?

Non, sauf si vous répondez aux mêmes obligations que les entreprises qui exécutent ce type de travaux sur matériaux amiantés : suivi d’une formation spécifique au risque amiante, élaboration d’un protocole opératoire transmis l’inspection du travail avant travaux.

Ai-je le droit de déposer une toiture et/ou un pignon en fibrociment amianté en vue de les remplacer ?

Non, ces travaux de retrait, comme les travaux de démolition, sont susceptibles d’émettre des fibres d’amiante. Ils doivent être confiés à une entreprise certifiée.

Puis-je vendre un bâtiment contenant de l’amiante ?

Oui, il n’y a pas d’interdiction de vendre un bâtiment avec des matériaux amiantés. Par contre, il est interdit de vendre des matériaux amiantés, seuls, provenant de ce bâtiment.

Ai-je le droit de stocker des matériaux amiantés sur mon exploitation ?

Oui, vous pouvez les entreposer pour une durée maximale d’un an sur palette filmée, étanche et identifiée, et en assurer l’élimination dans une installation autorisée par le code de l’environnement.


Puis-je réutiliser des matériaux contenant de l’amiante comme remblais ?

Non, le fait de les déplacer et de les destiner à un nouvel usage est interdit. Ces matériaux devront obligatoirement être éliminés selon un circuit spécifique.

Notes

Image

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Bâtiment présentant une toiture en fibro « anciens ». Crédits photos : Isabelle DEGROOTE conseillère bâtiments CA89

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