En Côte-d'Or, la FDSEA mesure les avancées et pointe ce qui coince
L'assemblée générale de la FDSEA 21 a reflété les questionnements qui traversent le syndicalisme majoritaire agricole et même, plus largement, l'importance de la notion d'engagement. C'était aussi le premier exercice du genre pour Antoine Carré, le nouveau président.

Le 23 avril dernier, Damien Greffin, vice-président de la FNSEA en charge du dossier de la transformation du syndicat agricole majoritaire, soulignait « qu'il n'y a plus de débat en interne sur la nécessité de mener ce dossier à bien. Les résultats mitigés des élections ont achevé de convaincre ceux qui étaient encore sceptiques. » L’objectif est donc aujourd'hui d’adapter la FNSEA à un contexte politique, géopolitique, économique et social en perpétuelle évolution. Ces questionnements, ils traversent l'organisation syndicale à tous les niveaux et l'assemblée générale de la FDSEA 21, le 25 avril à Saint-Julien, au nord de Dijon, s'en faisait l'écho. En présence de Yohann Barbe, producteur laitier vosgien et porte-parole de la FNSEA, et du nouveau président de la FDSEA 21, Antoine Carré, les résultats des dernières élections aux Chambres d'agriculture et, plus globalement, la place du syndicalisme agricole dans un contexte national et international incertain, mais également à la lumière des protestations agricoles de début 2024 ont alimenté les échanges. Une table ronde intitulée « Adapter notre action pour un syndicalisme encore plus efficace », à laquelle participaient également Thomas Lemée, le président des JA BFC et Yannick Salomon, secrétaire général de JA 21, résumait cette volonté.
Mobilisation remarquée de la Côte-d'Or
La force des manifestations et le niveau de mobilisation constatés dans les premières semaines de 2024 sont encore dans tous les esprits : « Le SOS géant réalisé à Maconge avec plus de 200 tracteurs rassemblés aura été une réussite médiatique, soulignait Antoine Carré, et lors d'une des soirées de mobilisation, on a compté jusqu'à 8 points de blocage à travers la Côte-d'Or ! » Un niveau de mobilisation remarqué et salué au niveau national. Sauf qu'ensuite, et malgré le sentiment d'un mouvement bien perçu et soutenu par la population dans son ensemble, beaucoup ont l'impression de ne pas avoir obtenu des résultats à la hauteur des attentes. La dissolution de juin n'ayant évidemment rien arrangé… Les sujets de mécontentement sont aussi très présents localement avec les difficultés liées à la gestion du Feader par la région : « le temps passe mais les choses n'avancent pas, déplorait Thomas Lemée. C'est une situation qu'on va payer pour des décennies… Il y a de l'argent, des agriculteurs qui ont des projets, et rien ne se passe, on reste coincés. » Face à cette situation, beaucoup souhaiteraient voir les FDSEA emmener la Région au tribunal administratif, sauf que ce n'est pas si simple, comme l'expliquait Antoine Carré : « Légalement, ce n'est pas possible pour un syndicat, cela doit être le fait d'un agriculteur, mais on peut comprendre qu'il est difficile de mener une telle action quand, en parallèle, on attend de ce même Conseil régional le paiement d'une aide… »
Où est le vrai pouvoir ?
Yohann Barbe, pour sa part, resituait les acquis des protestations paysannes : « On n'a pas obtenu tout ce qu'on voulait mais le plus insupportable, c'est qu'on sent que ce qu'on a obtenu, les pouvoirs politiques veulent le remettre en question. Emmanuel Macron cherche à nous affaiblir parce qu'il déteste la force et la structuration que nous représentons… » Yannick Salomon renchérissait : « Faire l'autruche, de la part des pouvoirs publics, c'est aussi pour eux, faire le pari d'une dissolution des volontés syndicales. » Un sentiment qui se retrouve dans toutes les problématiques agricoles, notamment celles touchant aux principes mêmes d'une agriculture productive. La FNSEA le constate sur les questions de réduction d'usage de produits phytosanitaires qui se décident en dépit de l'absence de solutions alternatives. « On nous pénalise tous les jours, expliquait Yohann Barbe. Moi, je veux bien aller défendre les molécules, mais le gouvernement doit pousser la recherche à nous trouver des solutions alternatives. Il y a aussi un sujet qui est devenu une évidence après la dissolution de juin : ce n'était plus les politiques qui décidaient, mais les hauts fonctionnaires. Certains élus politiques ont perdu la volonté de se battre pour les territoires. Ce n'est pas la FNSEA qui a donné les pleins pouvoirs à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), mais les politiques ! » Face à ces interrogations sur le rôle de la FNSEA, Antoine Carré concluait cette table ronde en rappelant néanmoins un élément important : « Il faut maintenir une pression syndicale. C'est facile de voir ce qu'on a obtenu, mais il faut aussi prendre en compte ce que nos actions ont permis d'éviter ».
Contrôles, Feader, photovoltaïques...
Pour son premier discours d'assemblée générale en tant que président de la FDSEA 21, Antoine Carré a tout d'abord rendu hommage à Fabrice Genin, décédé en novembre dernier et qui l'avait précédé dans cette fonction. Il est ensuite revenu sur plusieurs points qui posent aujourd'hui problème :
- Sur la Mission interservices agricole chargée de la mise en place d'un contrôle unique des exploitations, il ne mâche pas ses mots : « on nous a roulés dans la farine. Il y a, certes, un contrôle unique, mais les contrôles pourraient concerner deux fois plus d'exploitations. » Ce à quoi le Préfet de Côte-d'Or, Paul Mourier, a répondu : « le contrôle unique commence juste à se mettre en place, on doit encore travailler à l'élaboration d'une charte. Ne faisons pas le procès du contrôle unique ».
- Sur les mesures d'aide annoncées par la Région, dans le cadre de l'utilisation du Feader : « les critères pris en compte, précisait Antoine Carré, notamment en élevage, excluent de fait la plupart des exploitations de Côte-d'Or du dispositif ».
- Sur le photovoltaïque : « on constate des retards dans les raccordements, une baisse des prix de rachat, ce qui entraîne un risque de perte de rentabilité des installations et de gros problèmes de trésorerie. De plus, on s'aperçoit que la production d'énergie dépasse les capacités du réseau. En Côte-d'Or, une vingtaine d'installations injecte 80 % de ce qu'elles devraient injecter en raison de surtension sur un réseau saturé. C'est une obligation d'Enedis de nous permettre d'injecter dans le réseau ou de nous indemniser si ce n'est pas possible ». Sur ce point, le Préfet Paul Mourier a précisé qu'il avait rencontré Enedis et qu'une autre rencontre était prévue avec RTE : « Enedis s'est engagé à programmer avec la Chambre d'agriculture une réunion pour identifier les exploitations sur lesquelles il est le plus urgent d'agir ». Enfin le Préfet a reconnu qu'il y avait nécessité de créer des réserves d'eau, pour l'agriculture. « L'eau, concluait-il, est l'une de mes priorités pour les axes de développement de ce territoire ».