À Thorey, c’est la cata’...

En 2016, les gelées avaient amputé la récolte de 40%, en 2017 elles n’ont rien laissé. À Thorey-sous-Charny (21) dans l’Auxois, Aurélien Febvre, jeune viticulteur bio en IGP Coteaux de l’Auxois, trouve la pilule amère. Aux premières observations, 95% des pieds de vignes ont été ravagés par les gelées. Une gelée persistante, durant plusieurs jours. «C’est désolant, cela partait si bien, on va se retrouver avec une année quasi blanche et une vigne à sauver pour ne pas hypothéquer l’avenir». Pour la vendanges 2017, rien à espérer. Après quinze jours de froid et des épisodes de gel intense sur un vignoble déjà en stress hydrique, la vigne a peu de chance de s’en remettre de si tôt. Sur le coteau «on a l’impression que le temps s’est arrêté» déplore Aurélien Febvre, qui mène avec beaucoup d’exigence ce vignoble que ses grands parents exploitaient avant lui.
Son père, avaient repris le flambeau d’une tradition familiale qui se perpétue depuis six générations. En s’installant en 2006 et après avoir fait ses premières armes de jeune œnologue comme responsable de production dans une appellation prestigieuse, Aurélien Febvre a donné une toute autre dimension au domaine familial. Les vignes les plus anciennes ont été rejointes par de nouvelles plantations «sur des terres reposées, des bois et des prairies, vierges de toute contamination chimique», ce qui est essentiel quand on veut produire en bio. L’âge du vignoble s’étage aujourd’hui entre 3 ans et 80 ans.

L’importance de l’effet millésime
Ces terres de coteaux ont été plantées en cépages chardonnay pour les blanc, pinot noir et gamaret (un cépage suisse) pour les rouge. En blanc, «le chardonnay exprime et reflète bien le terroir sur lequel il pousse». Le vignoble de Thorey-sous-Charny se situe entre 350 à 400 mètres d’altitude, il bénéficie «d’une climatologie tout à fait spécifique», précise le viticulteur. Les blanc sont donc à 100% chardonnay, tandis que les rouge sont le fruit d’un assemblage entre les deux cépages (pinot noir et gamaret). «L’avantage du cépage suisse, c’est qu’il résiste bien au champignon, ses raisins sont aussi plus colorés que ceux du pinot noir ou du gamay».
Les raisins vendangés, les vins sont ensuite élevés en fûts de chêne et, pour deux cuvées au caractère bien spécifique, dans des jarres en terre cuite pendant onze mois. «Les jarres n’apportent aucun arôme particulier et la terre cuite présente l’avantage d’être un matériau noble, qui respire, comme le bois. Les vins en jarre reflètent le goût et les caractéristiques des cépages et du terroir» précise Aurélien Febvre. Comme le chêne, la terre cuite laisse s’échapper «la part des anges».
Œnologue de formation, le viticulteur bio a su s’affranchir de tout artifice : «les raisins sont produits et vinifiés naturellement, sans filtration, ni collage... du raisin et c’est tout!», ce qui permet de produire «un vin naturel et vivant». Au final, cela permet «de ne pas ressembler à tout le monde et de se forger une vraie personnalité». Sur ce type de vignoble et du fait des pratiques de l’agriculture biologique, «l’effet millésime est très perceptible». Aurélien Febvre fait en sorte de conserver cette typicité qui plaît aux clients d’un domaine qui produit entre 15 000 et 20 000 bouteilles par an. Sauf en 2016 où il a fallu se contenter de 9 000 bouteilles et quant à 2017, cela risque d’être une année noire... comme la gelée.
Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, le jeune viticulteur s’est quand même attelé à l’organisation du 6ème marché itinérant paysans et artisans de l’Auxois, pour défendre et promouvoir l’économie locale. C’est l’occasion de faire mieux connaître toute la diversité et la richesse des productions locales à des consommateurs qui peuvent découvrir sur un même site de nombreuses propositions, aussi alléchantes qu’intéressantes et originales.