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Vendanges

A Bailly, on ne «coince» pas la bulle…

Comme de tradition, les Crémants ont ouvert le bal des vendanges et aux Caves Bailly-Lapierre, l’activité depuis une semaine, bat son plein.

Par Dominique Bernerd
A Bailly, on ne «coince» pas la bulle…
Œnotourisme ou pas, aux Caves Bailly-Lapierre, tout le monde est sur le pont, le temps des vendanges !

En ce lundi après-midi, l’activité prend doucement un rythme de croisière au centre de pressurage des Caves Bailly-Lapierre. Il y a quatre jours que les vendanges ont débuté et que les adhérents de la coopérative ont repris le chemin du Col du Crémant. Altitude 206 mètres et à l’arrivée, quatre pressoirs pouvant prendre en charge simultanément jusqu’à 40 tonnes de raisins en provenances de toutes les communes de l’appellation Grand Auxerrois. Bernard arrive de Chitry. A peine le temps de descendre du tracteur que les caristes entament le bal : les fourches peseuses déchargent en un tour de main la précieuse cargaison qui, identifiée et enregistrée, ira rejoindre d’autres caissettes sur les lignées. Bordereau en main, le vigneron peut repartir, non sans avoir repris d’autres bacs personnalisés à son nom, fraîchement nettoyés après un passage précédent. Depuis l’automatisation du process en 2011, la pénibilité du travail n’est plus qu’un lointain et mauvais souvenir, rappelle Emmanuel Hamon, directeur général de la coopérative: «le métier de bagnard, c’est terminé ! Avant on vidait tous les bacs à la main, c’était de la folie… !» Au total, deux équipes de 8 à 10 personnes qui travailleront en période de pointe en alternance jour et nuit. En fonction du rythme des arrivages, les raisins seront dirigés vers l’un des quatre pressoirs de 6, 8 et 12 tonnes. Des pinces robotisées prennent en charge 2 bacs à la fois, qu’un tapis emmène jusqu’au retourneur : «les raisins vidés sont ensuite dirigés alternativement à droite et à gauche vers les deux portes du pressoir et là encore, on mesure les avantages de l’automatisation, car si en début de vendanges, on mettait autrefois 45 minutes pour remplir manuellement un pressoir de 12 tonnes, en fin de saison, c’était plutôt de l’ordre d’ 1 heure 30, la fatigue aidant ! Aujourd’hui, on tourne autour de 35 à 40 minutes en permanence…» Et pour apporter encore plus de souplesse et moins abîmer les baies, des moteurs électriques ont remplacé les verrins du système d’origine afin d’éviter tout choc inutile lors du basculement. 

 

Bouchons annoncés en haut du Col du Crémant

Un cycle complet s’effectue en à peine 90 minutes, l’objectif étant de presser le raisin au plus vite, une fois arrivé sur la plateforme, de sorte d’éviter tout risque de macération précoce pouvant altérer la qualité de la vendange. Les pressoirs pneumatiques ayant eux aussi l’avantage de presser les raisins sans les brusquer. Depuis deux ans, un système permet de maintenir à température les moûts afin d’éviter tout risque de démarrage de fermentation, comme l’explique Emmanuel Dumont, le directeur industriel des Caves Bailly-Lapierre : «sinon, on ne peut plus débourber. On a eu de mauvaises surprises, entre autres en 2006, où des raisins étaient rentrés trop chauds et facilitaient la fermentation. Aujourd’hui, on peut en abaisser la température jusqu’à 15°…» Une fois pressés, les jus iront rejoindre par un système de gravitation naturelle, 50 mètres plus bas, la fraîcheur des caves taillées dans la roche. Un autre travail va pouvoir commencer, sous l’égide de l’œnologue maison, Sylvain Martinand : «en fait, mon premier rôle, c’est d’essayer de faire en sorte qu’on parte à la bonne date de vendanges, même si la décision finale est collégiale. L’idéal étant d’avoir à la fois un parfait état sanitaire, avec le meilleur équilibre sucre acidité et tout le monde prêt à démarrer…» Le timing est d’autant plus délicat que le décret régissant l’appellation crémant impose certaines conditions : «on ne peut pas vendanger en dessous de 9° potentiels et pas au-delà de 11,5°. Et quand vous êtes dans une structure importante, avec des récoltes sur deux semaines, si vous commencez, à 11°, à la fin vous n’êtes plus dans les clous… !» Pour l’heure, le scénario est presque idéal, avec un état sanitaire plutôt bon et des rendements satisfaisants, sans commune mesure avec les deux années catastrophe qu’ont vécu les vignerons icaunais en 2012 et 2013. Dans quelques jours, les vins tranquilles rejoindront les crémants au bal des vendanges et l’activité du centre de pressage battra son plein. Il est 17 heures et le flux des tracteurs s’accentue. Bientôt l’heure de pointe. On parle même parfois de bouchons et d’embouteillages en fin de journée du côté du Col du Crémant, ce qui après tout, n’a rien d’incongru pour une cave coopérative viticole… !