Dégâts
Du jamais vu !

Chloé Monget
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La Nièvre connaît des conditions climatiques difficiles depuis quelques semaines, avec un pic de précipitations la semaine du 21 juin engendrant des conséquences pour toutes les productions.

Du jamais vu !
Cliché d'une des parcelles de la famille Violette dans la Vallée du Mazou le 21 juin. Crédit photo : Christian Violette.

Les précipitations ne s'arrêtent plus dans la Nièvre, avec une situation se compliquant encore un peu plus durant la semaine du 21 juin. Un contexte qui engendre des coupures d'électricité, des blocages d'axes routiers, etc. Au total, 390 interventions des pompiers ont été relevées dans le département (en date du 21 juin). Les agriculteurs, de leurs côtés, subissent aussi les conséquences de ces précipitations accrues ; petit tour d'horizon. 

Conséquences à la moisson

La famille Violette (EARL Du Buisson à Narcy) « installée dans la vallée du Mazou depuis cinq générations... nous n'avons jamais vu cela » stipule Christian Violette. Il détaille la situation : « tous les prés de la vallée sont submergés, les colzas ont les pieds dans l’eau et les orges de printemps se couchent ». Il précise : « l'herbe est couchée et en train de pourrir... on ne pourra sûrement pas la faucher. Pour le colza, les champignons se développent rapidement sur les siliques qui noircissent à cause de toute l'humidité accumulée ». Loin de ne pas avoir été prévoyante, la famille Violette avait éloigné l'implantation des colzas des zones qui risquaient d’être touchées par la rivière, mais la situation est tellement exceptionnelle que cela n’a pas suffi. Christian Violette poursuit : « le 19 juin nous avons eu 30 mm, puis 55 mm d'eau le lendemain... Cela peut être absorbé, mais pas quand vous avez des sols déjà saturés ». Au total, il répertorie environ 8 ha sous l'eau : « Nous verrons vraiment l'impact financier au moment des moissons. Mais il est certain qu'il y en aura un. En attendant, il faudrait que ceux qui font les études pour la gestion de l'eau prennent en compte les historiques des inondations trentenaires, cinquantenaires, centenaires... On n’arrête pas l’eau ! »

Stocks entamés 

Plus loin, à Ourouër, la famille Vincent connaît une situation à peu près similaire, comme l'évoquent Amélie et Chloé Vincent : « Nous avons 25 ares de prés dans l'eau. Au départ, l'inondation concernait un seul champ, mais l'eau a traversé la route en touchant donc un second avec 90 cm d'eau à certains endroits (au 21 juin). Outre le fait d'avoir les pieds dans l'eau – ce qui n'est agréable ni pour nous ni pour nos animaux ; quid du bien-être animal ? – nous ressentons déjà les conséquences de cette situation. Nos animaux sont nourris au foin, entamant ainsi notre stock d'hiver que nous ne pourrons très probablement pas compenser avec ce qui sera récolté cette année. En parallèle, nous relevons déjà une baisse de production de lait de 15 à 20 %, à cause de l'alimentation et des conditions dans lesquelles nous sommes, ce qui va impacter notre production de glace ». Amélie et Chloé pointent d'ailleurs : « si la vente au magasin reste pour le moment stable, il y a un manque sur l'événementiel pour notre chiffre d'affaires ; nombre de manifestations s'annulant les unes après les autres à cause de la pluie... Enfin, pour les cultures, l'orge de printemps ne se développe pas... Notre père qui est là depuis 40 ans, n'a jamais connu ça. Et pour notre première année d'installation, nous aurions espéré mieux pour nous lancer ! ». À 1 km de là, au Gaec Deroche (Cognan Bas), la situation n'est pas plus glorieuse, avec une stabulation inondée trois fois, des prés sous l'eau et une route n'ayant pas résisté aux intempéries. Une situation « désolante pour un 21 juin » selon Jean-Marie Deroche, associé du Gaec. 

Comment tenir bon ?

Du côté des maraîchers, le son de cloche est identique, à l'image de ce que vit Jean-Marie Lambert, un des associés du Potager d'ici (Nevers) : « toutes les parcelles de la Baratte sont sous l'eau. Certaines serres des trois maraîchers présents ici sont inondées, avec des cultures baignant dans l'eau. Nous constatons une prolifération de pucerons et d'autres problématiques sanitaires comme le mildiou. C'est une catastrophe comme les haricots verts de juillet : il n'y aura pas. Nous avons eu 130 à 150 mm de pluie en 3 jours (19, 20, 21 juin) et les prévisions météorologiques n'annoncent pas d'anticyclone prochainement... cela pose de nombreuses questions : pourra-t-on implanter nos cultures d'automne ? Pourra-t-on récolter celles arrivées à terme comme les salades, et dans quel état ? Nous pourrons chiffrer les pertes financières dans une dizaine de jours ». Pour lui, les intempéries nivernaises sont le témoin du reste de la France : « tout l'Hexagone connaît une situation difficile et toutes les cultures sont impactées. Les exploitants ont manifesté en janvier pour les revenus, et je crois qu'avec toutes les pertes que nous allons connaître cette année à cause de ces conditions climatiques, il va vraiment falloir revoir la question de la rémunération car on ne va pas tenir ».