Santé
L’alimentation au service de l’activité physique

Isabelle Doucet
-

Le nutritionniste Jean-Luc Dubouis décortique le mécanisme de l’activité musculaire pour comprendre les besoins nutritifs à l’effort.

L’alimentation au service de l’activité physique
Jean-Luc Dubouis, nutritionniste. (Photo ID/TD)

Du muscle à l’assiette, le nutritionniste Jean-Luc Dubouis remonte le parcours nutritif de l’aliment pour comprendre le mécanisme de l’effort. Il dissèque notre fabrique de protéines pour en retirer tous les sucs afin de se préparer à une activité physique.
Le spécialiste propose « de partir des faits biologiques » pour comprendre toutes les allégations concernant la santé et l’alimentation.
Il s’intéresse ainsi aux muscles squelettiques - ceux qui s’accrochent au squelette – qui, en se contractant, font bouger les os. De forme allongée, ces muscles sont composés de fibres - ou cellules musculaires —, dans lesquelles les myofibrilles - ou molécules protéiques - se rapprochent lorsque le muscle se contracte sous l’effort. Cette activité musculaire est produite par l’ATP (1), une molécule énergétique qui mobilise les protéines pour que le muscle se contracte. Pour fournir un effort physique, il convient donc d’avoir les bons apports en protéines et en énergie. L’énergie musculaire (ATP) est produite par les apports en glucoses (sucres) et lipides (acides gras). Elle se mesure en calories. Les dépenses de calories à l’effort s’évaluent quant à elles en fonction du poids, de l’intensité et de la durée de l’exercice (2). « Plus on est lourd et plus on consomme d’énergie », résume le spécialiste. Il insiste : « Les calories dépensées permettent aux filaments protéiques de glisser les uns vers les autres et aux muscles de se contracter ».

Un apport de protéines

Pour alimenter le moteur musculaire humain, il conviendra donc de lui apporter des protéines. Toutes n’ont pas la même valeur, en fonction des acides aminés qui les composent et leur séquençage. Le nutritionniste est formel : la valeur biologique des protéines animales est supérieure à celle des protéines végétales car elles apportent plus d’acides aminés indispensables. Il cite « deux protéines animales géniales, qui apportent diversité, quantité et qualité » : l’albumine du blanc d’œuf et la caséine du lait et du fromage. Pour les personnes qui observent un régime alimentaire végétarien, il conseille de mélanger les végétaux, tels que pois chiches, semoules ou céréales. « Les protéines de soja sont presque aussi bien que les protéines animales car elles contiennent presque tous les acides aminés indispensables », note-t-il.
L’apport en protéines recommandé pour un adulte est de 1 g/kg et par jour. L’absorption s’opère en quelques heures. « Dans l’effort, la machine fonctionne plus vite, indique Jean-Luc Dubouis. Et plus on avance en âge et moins la machine à fabriquer des protéines marche. On se démuscle ». C’est la raison pour laquelle les personnes âgées ont besoin d’un apport de protéines supplémentaires, de l’ordre de 1,5 g/kg et par jour, comme pour les sportifs.

Donner de l’énergie

La contraction du muscle durant l’effort réclame de l’énergie et entraîne toute une série de mécanismes. Dans un premier temps, pour lancer l’activité, l’organisme puise dans l’ATP résiduel. Puis la créatine prend le relais, sur une durée limitée aussi. « Ce qui laisse le temps au troisième mécanisme de se mettre en route, c’est-à-dire le glucose stocké dans les muscles et le foie ». La quatrième source est les graisses, les acides gras et les triglycérides. « Cependant, 75 % de l’énergie est perdue en chaleur ».
Le nutritionniste délivre donc quelques conseils basiques comme des apports en eau suffisants. Un manque d’eau de 2 % (ce qui représente un litre pour un corps de 70 kg) diminue la performance de 20 %. « Il faut boire avant, pendant et après l’effort », conseille-t-il.
Pour ses apports en énergie, l’organisme a aussi besoin de sels minéraux. On les retrouve dans le calcium. Il en faut un gramme par jour, « en principe, on n’en manque pas », précise le nutritionniste. Les épinards, les oranges, les laitages et les eaux minérales en contiennent. Quant au magnésium, on le retrouve dans les bananes, les noix et le chocolat, et le sodium, dans les produits de la mer. Le fer, qui apporte l’oxygène à la myoglobine, est puisé dans les viandes rouges, le boudin, les lentilles pour leur fer végétal, et le potassium dans les fruits et légumes. « Sodium, potassium et calcium font que l’organisme marche bien », souligne Jean-Luc Dubouis.

Des vitamines et du sommeil

Pour faire fonctionner les muscles les apports de glucides sont aussi indispensables. Il est recommandé d’avoir « fait le plein » de glycogène avant l’effort, en consommant de l’amidon, que l’on retrouve dans le pain ou les pommes de terre. La prise d’un gel sucré ou d’une compote permet de se réalimenter durant l’effort. Pour refaire le plein après l’activité physique, les pâtes ou le riz sont des réservoirs d’amidon.
Le corps a également besoin de vitamines. Elles sont au service des enzymes qui facilitent la réaction chimique dans le muscle. Les vitamines B1, B2, B3 sont à puiser dans les céréales complètes, la viande, les œufs ou le poisson ; la vitamine C, dans les fruits et légumes ; la D dans les poissons tels que la sardine, le hareng ou le foie de morue, mais aussi les œufs. Enfin, on retrouve la vitamine E dans les huiles comme celles d’olive ou de tournesol.
À ces apports, un sommeil de qualité, permet « de mieux synthétiser le glycogène, rapporte encore le spécialiste. Il améliore la cicatrisation des fibres musculaires sollicitées pendant l’activité physique ».

Note : (1) Adénosine-triphosphate.
(2) Cette mesure s’appelle le MET ou Metabolic Equivalent of Task.