Exploitations
Les nouveaux modèles d'exploitations

Actuagri
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Être agriculteur aujourd’hui repose sur des modèles de plus en plus diversifiés qui remettent en cause des organisations anciennes.

Un débat sur « l’essor des sociétés, métamorphose du monde agricole français » a permis d’éclairer les évolutions des modèles d’exploitations. Selon la MSA, 60 % des exploitations agricoles sont en sociétés, 20 % des agriculteurs sont même à la tête de plusieurs sociétés et 40 % restent des exploitations individuelles. Le développement de la forme sociétaire s’explique par la complexité de la profession agricole. « Le métier d’agriculteur ne consiste plus à savoir tout faire », a exposé François Purseigle, professeur à l’École polytechnique de Toulouse, « le chef d’exploitation exerce des fonctions de direction, de commerce, de délégation et d’exécution ». Depuis une dizaine d’années, on assiste à la banalisation du modèle sociétaire avec des entreprises agricoles qui sont de plus en plus complexes. Ces entreprises s’inspirent de ce qui est pratiqué dans les secteurs commerciaux ou industriels.

Des personnes issues d’autres milieux

Autre motif d’intérêt pour les sociétés : l’arrivée dans la profession de personnes Non issues du milieu agricole (Nima). Pour elles, la création d’une société peut être un outil pour entrer dans le métier, en évitant de confondre les biens de la famille et ceux de l’exploitation. « La confusion peut effrayer les repreneurs », estime François Purseigle, « or, ceux qui entrent dans le métier aujourd’hui pensent aussi à la sortie, et les conditions juridiques sont importantes. » Hervé Lejeune, inspecteur général de l’agriculture, ancien conseiller de Jacques Chirac est revenu sur les métamorphoses du modèle agricole français. « Depuis trente ans, on assiste à une baisse du nombre des exploitations, mais le revenu agricole se maintient en euros constants. Si on avait maintenu le nombre d’exploitations, le revenu individuel aurait chuté de 40 %. L’impensable est advenu, le processus d’agrandissement et de restructuration a eu lieu, malgré les vieux totems de l’agriculture familiale. » Hervé Lejeune reconnaît qu’il a lui-même défendu ce modèle familial mais il prône aujourd’hui de nouveaux outils pour faciliter le partage du foncier, citant les exemples de « Terres de Lien » ou de « Terrafine » mais aussi ceux des coopératives viticoles qui se lancent dans le portage du foncier pour assurer leurs approvisionnements. Autre « totem » qu’il dénonce, « la peur de manquer de terres ». « On constate une déprise agricole dans les zones de piémont, les marches de l’est et du Limousin. Que va-t-on faire de ces terres délaissées, surtout celles soumises à la sécheresse du sud massif central ? »

Adapter l’agriculture

Comment résister à l’attrait du photovoltaïque qui peut rapporter 2 000 à 4 000 euros l’hectare ? L’agriculteur devient énergie-culteur, là aussi le modèle sociétaire a son rôle à jouer. Jean-Louis Chandellier, directeur général adjoint de la FNSEA, a rappelé que le syndicalisme s’est ouvert aux Nima, aux installations tardives ou aux projets originaux. « Les agriculteurs ne se ressemblent plus l’un l’autre. Les modèles sont trop divers. Il faut des critères plus larges pour définir l’exploitation agricole. » En conclusion, Me François Robbe a déclaré que le besoin de sociétés est plus que jamais présent pour adapter l’agriculture aux nécessités du siècle : « Le modèle traditionnel, nostalgique de la ferme familiale des années soixante, est suranné. Le code rural, dont l’épine dorsale est les statuts du fermage est hostile à la société et favorise la famille, » avant de rappeler que le monde agricole attend de ses vœux une « grande loi foncière » pour aller vers des modèles de régulation nouveaux.