Pour Frédéric Bobin, éleveur du Morvan nivernais, la biosécurité se décline par trois éléments principaux. Il revient sur son expérience pour les présenter.
Installé à Brassy, dans la Nièvre, en 1996 sur 190 ha (dont 17 ha de culture – triticale, et le reste en prairies temporaires) avec 90 vaches (50 Charolaises et 40 Aubrac environ), Frédéric Bobin, 46 ans, a toujours eu la biosécurité à l’esprit pour conduire son exploitation. Il insiste : « C’est incontournable dans notre métier si on souhaite avoir un peu de tranquillité d’esprit. Et je pense qu’il faut s’y intéresser dès l’installation, afin de ne pas arriver à des situations impossibles que ce soit pour le cheptel ou nous-même ». Plus en détail, Frédéric explique que, pour lui, la biosécurité forme un ensemble de trois strates.
Modernité et propreté
La première se concentre sur les bâtiments : « L’agencement est primordial. En effet, s’il n’est pas optimisé, on peut souffrir physiquement. On pense rarement à cela quand on est jeune, mais lorsque l’on vieillit certains gestes deviennent difficiles. Pour donner un exemple, j’ai décidé de monter un nouveau bâtiment avec un parc de tri et un couloir de contention pour faciliter le chargement, notamment pour les Aubrac qui sont parfois peu enclines à monter dans les camions. Cela permettra aussi de simplifier les manipulations lors des traitements vétérinaires ou encore les pesées. Sur ce point, je pourrais ainsi avoir une certaine tranquillité d’esprit car je pourrais enfin m’assurer du poids de mes animaux à la sortie de mon exploitation lors des ventes ». Si aujourd’hui il dispose d’un bâtiment assez moderne, et est en attente de la construction d’un nouveau, il revient sur ses débuts : « J’ai démarré avec des écuries qui n’étaient pas adaptées à mon activité et qui n’étaient pas modernes. L’accès à la modernité n’est certes pas donné, mais il existe aujourd’hui des leviers notamment avec le photovoltaïque. De plus, les retombées de ce genre d’investissement sont importantes car avec une meilleure situation sanitaire on a potentiellement moins de pertes sur les animaux et un confort accru pour soi ». Pour compléter cela, Frédéric rappelle que le nettoyage est incontournable, et forme la seconde strate de ce qu’est la biosécurité : « Outre l’entretien quotidien des litières, je nettoie et désinfecte totalement mon bâtiment, du sol au plafond, tous les ans. Travailler dans un univers propre permet d’avoir les idées claires et d’offrir un lieu de vie sain pour les animaux ; c’est la base ». Si ces deux pans de la biosécurité sont donc à prendre en compte, il en développe un troisième, moins matériel.
Liens indispensables
Afin de connaître les points potentiels à encore améliorer, Frédéric a réalisé un diagnostic biosécurité, avec le GDS 58 : « pour une fois, voilà un service totalement gratuit… donc autant en profiter ». Il poursuit : « Cette démarche permet d’avoir une idée précise d’où se trouve l’exploitation en termes de gestion des risques sanitaires, et sans s’arrêter là, le GDS offre des pistes d’améliorations ; possibles ou non à mettre en place c’est une autre histoire, mais au moins on a des informations utiles. Niveau temps, il faut environ une journée pour l’inspection par le GDS, ce qui n’est pas grand-chose. À mon sens, ce regard extérieur est très appréciable d’autant plus qu’il est fait sans jugement, sans ultimatum, et qu’il n’y a aucune conséquence si on ne met pas en place les leviers conseillés ». Si pour lui le conseil professionnel doit être sollicité, il met en exergue un autre type de lien à activer : « Il faut s’inspirer de ce que font les autres professionnels. Certes, tous n’ont pas le même aplat financier, mais c’est en échangeant, en cherchant et en s’informant que l’on peut trouver des alternatives ; la curiosité est indispensable si l’on veut perdurer. Pour donner un exemple, ici à Brassy, nous sommes deux ou trois voisins à se réunir pour savoir ce que l’on peut améliorer. On s’échange des idées et on essaye de les adapter chez nous. De plus, socialement, ces liens sont très appréciables car ils permettent de sortir un peu la tête du guidon. Même si cela n’est pas forcément le premier point auquel on pense quand on parle de biosécurité, pour moi, la bonne santé psychologique des exploitants rentre totalement dans ce champ ; sans eux, il n’y a pas d’exploitation. Pour ma part, j’aime mon métier, mais à petite dose d’autant plus quand on constate que la trésorerie reste limitée même si on fait plus de chiffres (en cause l’augmentation des charges). De ce fait, parfois, il faut savoir dire stop pour se préserver ». Frédéric conclut : « la biosécurité est indispensable. Et, même si on fait de notre mieux, il y a toujours des choses à améliorer dans une exploitation. Une liste de priorités peut aider à avoir une vision d’ensemble et à long terme des choix à faire. Cela offre une visibilité, permettant de se sentir moins asphyxié par toutes ces questions. En cas de soucis, il ne faut pas hésiter à demander conseil ou de l’aide à ses voisins ainsi qu’aux organismes professionnels. L’isolement est le pire des ennemis dans ces cas-là donc ne restez pas seul ».