« Une présence territoriale plus que jamais nécessaire »
Emmanuel Bernard, président de la FDSEA de la Nièvre, revient sur les enjeux entourant les élections à la MSA, en lien avec son territoire.

La MSA, c'est un système de protection sociale, mais constatez-vous également un élargissement de ses terrains d'action ?
Emmanuel Bernard : "Oui, en particulier sur l'accompagnement. Il suffit de penser à des faits récents tels que la prédation sur les élevages et les problématiques FCO. Des sujets qui, évidemment, ne sont pas en lien direct avec la MSA, mais sur les plans humain et économique, ils ont des impacts. Les aspects sociaux et économiques sont intimement liés dans la vie des agriculteurs. L'année 2024 a été compliquée dans le département de la Nièvre, avec des aléas climatiques, mais le climat, c'est une composante de notre métier. C'est difficile à appréhender et on ne peut nier les effets du changement climatique mais composer avec fait partie de notre métier. Mais quand on additionne à cela une double épidémie, puisque la Nièvre est touchée par les deux variants FCO 8 et FCO 3, qui entraînent des dégâts considérables dans les élevages, et la prédation du loup, la MSA doit permettre d'amener une capacité à accompagner les gens dans les difficultés. Dans ces circonstances, le lien humain avec un élu MSA ou une assistante sociale, c'est le plus important."
L'importance de ce lien directe, de proximité, vous le voyez sur le terrain ?
E.B. : "On fait des diagnostics avec l'État sur la question du mal-être en agriculture, mais s'il manque un lien direct, on a du mal à appréhender les difficultés parce que chaque cas est particulier. Il y a quelques jours, dans une exploitation nivernaise, j'ai rencontré un jeune agriculteur qui a un problème avec son dossier Feader, il a été confronté à la FCO et il a eu une attaque de loup ! Dans un cas pareil, si on n'est pas capable d'avoir une approche « physique », parce que les gens ont besoin de parler, ça peut très mal finir."
Les agriculteurs sont habitués à « jongler » avec les difficultés mais qu'est-ce qui fait qu'à un moment, un soutien de la MSA peut être utile ?
E.B. : "Nous ne sommes pas égaux par rapport à la gestion des difficultés. Un chef d'entreprise est capable de faire face à une pointe de travail, à un problème de main-d’œuvre ou sur un chantier, mais à un moment donné, peut intervenir un événement auquel il n'était pas préparé, et c'est là qu'il peut se mettre à douter ou à perdre pied. La complexité de la diversité des sujets fait que, de temps en temps, on peut se retrouver confronté à un aspect qu'on ne maîtrise pas et cela peut fragiliser tout un édifice. Pour la MSA, l'enjeu, c'est de disposer, sur le terrain, d'un maillage qui permette, non pas de se substituer à la médecine ou au banquier, mais d'apporter un peu de sagesse, de recul, qui permettrait de se dire qu'il y a peut-être une solution à laquelle on n'aurait pas pensé au début."
La MSA s'implique de plus en plus dans des thématiques rurales et pas seulement agricoles, qu'en pensez-vous ?
E.B. : "Je le rappelle souvent : aucun agriculteur n'a fait carrière sans, parfois affronter des « pépins », de santé, financiers ou autre. Ça fait partie de la vie. On a, dans la Nièvre un développement des Maisons de Services qui vise à compenser le recul des services publics, que j'ai vécu aussi en tant qu'élu local. Cela aussi démontre que le numérique ne peut pas tout remplacer et que le lien humain reste nécessaire. Le numérique simplifie peut-être la vie de certains mais la complique aussi pour beaucoup d'autres. Au-delà des dimensions corporatistes et par secteur professionnel, je pense qu'il faut aussi développer des visions territoriales de l'accompagnement, en lien avec les situations des territoires ruraux. Dans les années qui viennent il faudra, avec la MSA, développer des approches autant territoriales que corporatistes sur toutes ces questions, d'accès aux soins ou d'accès au service public. La MSA doit être leader sur ces questions parce qu'elle représente encore le plus de monde sur nos territoires ruraux."
Certains voudraient voir disparaître ce modèle particulier de protection sociale. Que leur répondez-vous ?
E.B. : "Les gens de la Nièvre qu'on va élire dans le cadre de ce scrutin, devront apporter des réponses pour montrer que la MSA est un organisme où on peut joindre des gens, obtenir des rendez-vous. Il faut montrer que ça fonctionne. Quand on discute avec d'autres structures de protection sociale, on se rend compte que la MSA, sans être parfaite, fonctionne très bien. Vis-à-vis du monde agricole, que ce soit les employeurs ou les salariés, la solution n'est évidemment pas de tout casser. L'herbe n'est pas plus verte ailleurs ! Globalement, cette protection sociale a fait ses preuves. Il faut peut-être adapter le modèle de la MSA, mais surtout pas le casser. Je pense qu'avec la FDSEA de la Nièvre on est un peu plus forts, parce que nous sommes reconnus comme une force de proposition. Nous serons à la manœuvre pour proposer et aussi aider à la mise en place d'idées."
Exergue : « Il faut peut-être adapter le modèle de la MSA, mais surtout pas le casser »