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Conjoncture

La reprise économique est en panne

Les derniers chiffres mesurant l’activité économique du pays ne sont pas encourageants. Tour d’horizon.
Par Thierry Michel
Alors que le 14 juillet vient de célébrer le Débarquement et le début des commémorations du centenaire de la grande guerre, c’est une autre guerre qui se déroule dans l’Hexagone depuis maintenant quelques mois, entre tentative timide d’amorcer une relance et persistance des effets de la crise économique. Le discours présidentiel lors de la fête de la Révolution française a révélé les limites de l’exercice : échec sur l’inversement de la courbe du chômage, peu d’annonces concrètes nouvelles qui pourraient insuffler un tant soit peu d’optimisme auprès des ménages et quelques idées vagues sur les caps à venir pour 2015 et 2016. Et les analyses de conjoncture régulièrement publiées n’augurent rien de bon.

[INTER]Vous avez dit croissance ?[inter]
Si la France n’est plus dans la spirale négative qu’elle a connu, rien n’indique pour autant qu’elle repart vers le haut. Que ce soit les indicateurs composites avancés de l’OCDE, qui permettent d’anticiper des retournements de cycles économiques et signalant toujours des signes de ralentissement, ou des indices plus ciblés (climat des affaires des entreprises en recul en juin, consommation des ménages en baisse), le morose s’installe. Et quand un chiffre paraît bon, c’est un trompe l’œil selon les principaux analystes. Exemple : le rebond des dépenses de consommation des ménages en mai ? C’est juste une question liée à une consommation supplémentaire d’énergie en raison du mauvais temps. Pas de quoi faire rebondir l’économie donc.
Ce que le cabinet Xerfi-Prévisis, spécialiste des analyses de conjoncture, résume ainsi : une Allemagne qui ne joue pas le jeu du rééquilibrage en Europe, une déflation que l’on continue de sous-estimer et qui ne veut surtout pas dire son nom et une consommation en panne. Conclusion : ça coince pour la reprise hexagonale, sans relance prévue de l’investissement avant 2015. Les entreprises ont bien du mal à se projeter dans l’avenir et leurs carnets de commandes en pâtissent. L’activité industrielle est [I]«coincée»[i], le secteur de la construction [I]«torpillée»[i], les services tournent [I]«au ralenti»[i] et le commerce est bien difficile.
Côté des ménages, le sentiment est très net désormais que la situation est de plus en difficile et que la fin de l’année ne semble pas apporter de mieux. Le pouvoir d’achat des ménages, notamment, va continuer de souffrir. Les mini-annonces présidentielles sur la baisse de certains impôts et les ventes de fin d’année seront de vrais tests pour la consommation nationale.

[INTER]Et à l’extérieur ?[inter]
Le hic dans ce paysage peu enjoué, c’est que la situation n’apparaît pas comme franchement meilleure hors des frontières du pays et hors Union européenne. Et elle est pour le moins contrastée. Les indicateurs composites avancés déjà évoqués montrent un ralentissement de l’activité économique dans la plupart des grands pays dits émergents, dont il faut avoir à l’esprit qu’ils sont en général les principaux moteurs de la croissance au niveau de la planète. Et si la Chine arrive à tirer son épingle du jeu, les économies indienne ou brésilienne, par exemple, sont plus à la peine. Côté pays développés, on parle de [I]«sérénité»[i], selon certains observateurs, et d’éviter l’euphorie selon certains autres. C’est dire toute la difficulté à bien comprendre la conjoncture actuelle. En tout cas, l’OCDE a fait part d’un [I]«commerce mondial de marchandises en recul dans la majorité des grandes économies au premier trimestre 2014»[i].
Les matières premières semblent une fois de plus de bons témoins du fonctionnement de l’économie mondiale. Le pétrole vit sans soubresaut notoire depuis le début de l’année, ce qui reflète bien l’atonie de l’économie-monde. Le cours du cuivre, si volatil il y a encore quelques temps et composante majeure dans le développement de la Chine et des pays émergents, semble plafonner après des envolées démesurées. Quant aux matières premières agricoles, elles résument à elles seules la difficulté de l’économie. Après un début d’année correcte, les cours des principaux produits cotés ne cessent de s’éroder et de reculer depuis avril 2014. Rien ne laisse présager, sauf accident notoire, un retournement de situation sur ce secteur.
Pour la France, rien ne dit non plus que les timides réformes annoncées - pacte de responsabilité pour l’essentiel - seront suffisantes pour donner la bonne impulsion, surtout si tous les acteurs concernés ne jouent pas à fond le jeu. Il y a aussi fort à parier que face au nouveaux prélèvements fiscaux de cette année, les baisses d’impôts récemment annoncés ne pèsent pas lourd. Ce qui amène les principaux conjoncturistes à revoir les prévisions de croissance économique, et pour cette année et pour l’année prochaine.