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économie

La croissance de retour en France ? Oui mais...

À mi 2015, l’économie française se porte certes mieux. Pour autant, peu de choses semblent acquises et les incertitudes demeurent nombreuses sur la pérennité de cette reprise.
Par Thierry Michel
La croissance de retour en France ? Oui mais...
( Réussir / Thierry Michel ) Pour Bercy (ministère de l’économie et des Finances), la bonne nouvelle d’une croissance économique meilleure que prévue pour le premier trimestre 2015 ne signifie pas que tout est redevenu rose. Reste à faire perdurer cette d
«France : la reprise enfin !» écrivait l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) mi-avril. «Drôle de reprise» soulignaient les analystes de BNP-Paribas fin mars. Il est bien vrai que la croissance économique de l’Hexagone, si elle existe bel et bien aujourd’hui, pose un certain nombre de questions.

Bonne surprise
Après tout, il n’y a pas de raison de bouder : longtemps annoncée à + 0,2 % seulement puis attendue à + 0,4 % à la veille de la publication de l’indicateur concerné, la croissance économique du premier trimestre s’est finalement établie, en France, à
+ 0,6 %. C’est aussi à comparer à une stabilité totale au quatrième trimestre de 2014 et à + 0,2 % pour l’ensemble de l’année dernière. Une nouvelle d’autant plus positive que certains grands organismes internationaux de conjoncture économique ont révisé à la hausse le potentiel de croissance du PIB hexagonal pour l’ensemble de l’année 2015. Au premier rang, on retrouve notamment la Commission européenne, si critique pour la France par ailleurs lorsqu’il s’agit d’analyser les réformes structurelles insuffisantes entreprises par le pays pour relancer son économie: début mai, Bruxelles prévoyait un + 1,1 % de croissance pour la France en 2015 et + 1,7 % en 2016. Mieux que Bercy !
Mais comme tout chiffre statistique, il convient de regarder comment s’est constituée ce début de reprise. L’Insee montre bien que le moteur de la croissance reste avant tout, et comme depuis très longtemps en France, la consommation des ménages, qui «accélère fortement» en ce début d’année. Même si cette dernière avait eu tendance à s’essouffler en 2014, elle reste le fer de lance de l’économie. Mais attention, l’alimentaire reste le parent pauvre de ce dynamisme et ce sont plutôt les postes de l’énergie, des biens fabriqués (automobiles notamment) et même des services qui tirent la consommation des ménages. En revanche, l’investissement et le solde commercial restent en territoire négatif. Les «exportations ralentissent alors que les importations accélèrent» écrit l’Insee. Ce manque de reconquête de parts de marché à l’exportation inquiète même sérieusement certains observateurs spécialisés.

Dépendance
Ce qui chagrine le plus les économistes, c’est que cette reprise ne se fait pas à partir de paramètres que la France maîtrise. Si il existe un mieux dans le pays, c’est parce que le prix du pétrole baisse, parce que l’euro baisse en raison de l’action monétaire de l’Union européenne et parce que les taux d’intérêts n’ont jamais été aussi bas. Autant de critères sur lesquels le pays n’a pas ou très peu prise. C’est ce que Hélène Baudchon, responsable des études économiques France, Belgique, Luxembourg chez BNP Paribas appelle une reprise qui «reste caractérisée par son manque d’allant». Autrement dit, pour peu que l’une de ces composantes bouge à la hausse, et c’est le fragile redémarrage de l’économie nationale qui peut être mis en danger.
Certains s’interrogent déjà sur les variations de prix du pétrole. Très bas depuis quelque temps, ils contribuent largement à l’embellie actuelle. Mais ils ont eu tendance à remonter sensiblement en ce mois d’avril (+ 6,5 % par tonne pour le pétrole Brent originaire de la Mer du Nord). Encore à 56 dollars le baril fin mars (pour une moyenne de 59,4 sur le mois d’avril), le Brent a atteint tout récemment 66 dollars. Certes, les organismes spécialisés dans l’étude du pétrole restent sur leur position d’un prix du pétrole relativement bas sur le long terme mais les soubresauts conjoncturels pourraient perturber les reprises économiques à la française qui ont besoin d’un cours bas pour exister. À surveiller donc et surtout, il faudra arriver à savoir à partir de quel niveau de cours le pétrole devient un «danger» pour le PIB national.

Indicateurs
La production industrielle, un secteur important pour la croissance économique, a connu une embellie au premier trimestre mais a tendance à s’essouffler et cela peut paraître comme l’une des fragilités chroniques de l’économie dans son ensemble.
Côté indices des prix, on relève une stabilité des prix des produits de grande consommation dans la grande distribution pour le mois d’avril 2015, en particulier pour la grande distribution alimentaire. Sur un an, les prix sont même en retrait de 1,2 % pour le secteur grande distribution. Pour ce qui est des prix à la consommation, l’indicateur de l’Insee montre une légère hausse de 0,1 % pour le mois d’avril (même mouvement sur un an). Les prix des produits alimentaires ont été stables entre mars et avril de cette année. Sur un an, on enregistre une hausse de 0,3 % de l’alimentation en général avec une poussée pour les produits frais (+ 6,2 %).
Dernier indicateur, celui des prix agricoles à la production : ils ont progressé de 0,4 % en mars par rapport à février. Sur un an, ces mêmes prix à la production ont baissé de 6,7 %.