Travaux agricoles
Des entreprises de plus en plus sollicitées
Faire appel à une entreprise de travaux agricoles est une tendance en constante augmentation. Les motivations sont diverses. Elles traduisent un changement de mentalité mais aussi des arbitrages entre investissements matériels et recours à des prestataires. Chez nous aussi, cette tendance se confirme.

« De plus en plus d’exploitations agricoles ont recours au travail à façon, c’est-à-dire à des prestataires de services extérieurs pour réaliser tout ou partir de leurs travaux… » Ce constat, c’est le sociologue François Purseigle qui le dressait, le 17 décembre dernier, lors d’une conférence de presse. Accompagné de trois autres chercheurs (Julien Brailly, Bruno Legagneux et Geneviève Nguyen), le sociologue avait livré début septembre une synthèse de travaux menés sur la sous-traitance agricole, au sein du Centre d’études et de prospective du ministère de l’Agriculture. Elle montrait qu’entre 2000 et 2016, le nombre d’exploitations ayant recours aux Entreprises de travaux agricoles (ETA) a doublé en France, représentant un chiffre d’affaires global de 4 milliards d’euros. Les chercheurs expliquent ce fait par un contexte favorable dans lequel les attentes sociétales imposeraient d’avoir de plus en plus recours à des matériels, des qualifications ou des technicités spécifiques. A cela s’ajouteraient aussi les préoccupations des agriculteurs pour l’environnement ou leur santé, mais aussi, la multiplication de controverses et de conflits de voisinage… Au-delà de ces critères, le calcul économique entre les investissements nécessaires en matériel, mais aussi les coûts d’entretien et de stockage de ce matériel, d’un côté et, de l’autre, le coût de prestations extérieures, fait parfois pencher la balance en faveur de ces dernières. Tout est fonction du modèle économique choisi mais, indéniablement, les ETA ont aujourd’hui le vent en poupe. Cela se vérifie aussi dans notre région.
Si les entrepreneurs régionaux interrogés dans cet article ne notent pas une explosion de la demande, celle-ci reste très forte, et évolue aussi dans sa nature.
Une demande qui évolue dans sa nature
Traduction d’une évolution du rapport à leur travail pour beaucoup d’agriculteurs, le recours aux ETA reflète aussi le poids des attentes sociétales sur l’agriculture. C’est notamment ce que confirme Michel Meuriot. Implanté en Côte-d’Or, à Chailly-sur-Armançon et adhérent à la Fédération nationale entrepreneurs des territoires (FNEDT), il réalise tous types de travaux agricoles, du semis à la récolte, dans le secteur géographique de Pouilly-en-Auxois et emploie six salariés, dont cinq à temps plein et une employée administrative à mi-temps. Il constate l’évolution des demandes qu’on lui fait : « En ce qui me concerne, je n’ai pas remarqué une activité beaucoup plus importante qu’habituellement ces dernières années, mais j’ai une clientèle d’habitués, pour lesquels je réalise des travaux de récolte et, plus ponctuellement, d’autres travaux lorsqu’ils sont confrontés à une panne mécanique ou des impératifs météorologiques. Il y a des évolutions dans les tâches qu’on nous réclame. Certaines sont des incontournables, comme les récoltes (moisson, ensilage). Je note quand même des sollicitations un peu nouvelles, notamment dans les semis de céréales. Je dispose d’un matériel qui me permet de semer trois types de céréales en même temps, ou des couverts végétaux, ou de faire de l’apport d’engrais localisé sur la ligne de semis. Cela me fournit une polyvalence qu’on me demande de plus en plus ». Aux yeux de cet entrepreneur, c’est d’abord cette attente de polyvalence qui devrait s’imposer à l’avenir dans son métier. « Notre clientèle elle-même est amenée à s’adapter aux attentes différentes du marché, donc, logiquement, nous devons pouvoir fournir des prestations de plus en plus différenciées et adaptées. C’est, par exemple, le cas sur des semis de couverts végétaux. On doit suivre cette évolution ».
Comparaisons de coûts
À Saulieu, Johan Rose est associé, avec son frère Yann, au sein d’une ETA fondée il y a quatre ans à la suite de la reprise d’une entreprise basée à Autun, en Saône-et-Loire. Pour cette jeune structure, l’augmentation des sollicitations est forcément une bonne nouvelle : « Parmi tous les travaux que nous réalisons, l’épandage de fumier prend une part très importante. Nous faisons également pas mal de pressage en bottes rondes, un peu de semis, mais cette dernière activité est plus aléatoire en quantité. Certaines années, on en fait beaucoup. Et puis il y a les moissons évidemment, mais avec le parcellaire très morcelé qu’on a ici, ça réclame beaucoup d’organisation pour les plannings ». La clientèle répond présente ici aussi et le jeune entrepreneur constate qu’il gagne des clients. « On a beaucoup d’appels pour des renseignements, qui se traduisent souvent par des prestations, même un an après. Beaucoup se renseignent sur nos tarifs et ensuite, ils comparent avec les coûts que cela représente s’ils le font eux-mêmes. Ils évaluent si cette solution de la prestation extérieure vaut le coup ou pas ». Depuis quatre ans, l’activité de l’ETA Rose n’a cessé d’augmenter, du fait aussi que l’entreprise se développe sur plusieurs secteurs d’activité. « On s’est développés sur le transport de paille où il y a un boulot impressionnant, et puis aussi sur le transport de sapins. De manière générale, il y a quelques clients pour lesquels ont fait énormément de travaux et beaucoup d’autres pour lesquelles les tâches sont plus ponctuelles. On voit quelques agriculteurs qui font tout faire par des ETA. C’est assez nouveau ». Même constat d’un niveau d’activité soutenu du côté de Matthias Fèvre, jeune agriculteur installé en juin dernier sur une exploitation implantée au sud de Dijon, à Brazey-en-Plaine. Aux côtés de l’exploitation, figurent une structure de méthanisation et une ETA. Les trois structures (ferme, méthanisation et ETA) sont interdépendantes et complémentaires. « Nous effectuons beaucoup de travaux liés à la pomme de terre (plantage, buttage, fanage et arrachage) sur un gros secteur qui s’étend de Dole à Longvic et, depuis l’an dernier, on a investi dans un automoteur pour faire de l’épandage de digestat de méthanisation. On est très sollicités mais il y a aussi de plus en plus de concurrence. La difficulté pour des ETA comme nous, c’est que tous les clients veulent réaliser leurs travaux en même temps. Il faut parvenir à bien gérer tout ça. Nous faisons aussi des prestations de transport d’oignons avec nos bennes. On ne manque pas de travail… La principale motivation avancée par nos clients c’est qu’en faisant appel à nous, ils diminuent leurs investissements en matériel ».
Ces arbitrages sont-ils conjoncturels ou structurels ? C’est là tout la question qui déterminera, à l’avenir, la place prise par les ETA dans le paysage agricole régional.
Si les entrepreneurs régionaux interrogés dans cet article ne notent pas une explosion de la demande, celle-ci reste très forte, et évolue aussi dans sa nature.
Une demande qui évolue dans sa nature
Traduction d’une évolution du rapport à leur travail pour beaucoup d’agriculteurs, le recours aux ETA reflète aussi le poids des attentes sociétales sur l’agriculture. C’est notamment ce que confirme Michel Meuriot. Implanté en Côte-d’Or, à Chailly-sur-Armançon et adhérent à la Fédération nationale entrepreneurs des territoires (FNEDT), il réalise tous types de travaux agricoles, du semis à la récolte, dans le secteur géographique de Pouilly-en-Auxois et emploie six salariés, dont cinq à temps plein et une employée administrative à mi-temps. Il constate l’évolution des demandes qu’on lui fait : « En ce qui me concerne, je n’ai pas remarqué une activité beaucoup plus importante qu’habituellement ces dernières années, mais j’ai une clientèle d’habitués, pour lesquels je réalise des travaux de récolte et, plus ponctuellement, d’autres travaux lorsqu’ils sont confrontés à une panne mécanique ou des impératifs météorologiques. Il y a des évolutions dans les tâches qu’on nous réclame. Certaines sont des incontournables, comme les récoltes (moisson, ensilage). Je note quand même des sollicitations un peu nouvelles, notamment dans les semis de céréales. Je dispose d’un matériel qui me permet de semer trois types de céréales en même temps, ou des couverts végétaux, ou de faire de l’apport d’engrais localisé sur la ligne de semis. Cela me fournit une polyvalence qu’on me demande de plus en plus ». Aux yeux de cet entrepreneur, c’est d’abord cette attente de polyvalence qui devrait s’imposer à l’avenir dans son métier. « Notre clientèle elle-même est amenée à s’adapter aux attentes différentes du marché, donc, logiquement, nous devons pouvoir fournir des prestations de plus en plus différenciées et adaptées. C’est, par exemple, le cas sur des semis de couverts végétaux. On doit suivre cette évolution ».
Comparaisons de coûts
À Saulieu, Johan Rose est associé, avec son frère Yann, au sein d’une ETA fondée il y a quatre ans à la suite de la reprise d’une entreprise basée à Autun, en Saône-et-Loire. Pour cette jeune structure, l’augmentation des sollicitations est forcément une bonne nouvelle : « Parmi tous les travaux que nous réalisons, l’épandage de fumier prend une part très importante. Nous faisons également pas mal de pressage en bottes rondes, un peu de semis, mais cette dernière activité est plus aléatoire en quantité. Certaines années, on en fait beaucoup. Et puis il y a les moissons évidemment, mais avec le parcellaire très morcelé qu’on a ici, ça réclame beaucoup d’organisation pour les plannings ». La clientèle répond présente ici aussi et le jeune entrepreneur constate qu’il gagne des clients. « On a beaucoup d’appels pour des renseignements, qui se traduisent souvent par des prestations, même un an après. Beaucoup se renseignent sur nos tarifs et ensuite, ils comparent avec les coûts que cela représente s’ils le font eux-mêmes. Ils évaluent si cette solution de la prestation extérieure vaut le coup ou pas ». Depuis quatre ans, l’activité de l’ETA Rose n’a cessé d’augmenter, du fait aussi que l’entreprise se développe sur plusieurs secteurs d’activité. « On s’est développés sur le transport de paille où il y a un boulot impressionnant, et puis aussi sur le transport de sapins. De manière générale, il y a quelques clients pour lesquels ont fait énormément de travaux et beaucoup d’autres pour lesquelles les tâches sont plus ponctuelles. On voit quelques agriculteurs qui font tout faire par des ETA. C’est assez nouveau ». Même constat d’un niveau d’activité soutenu du côté de Matthias Fèvre, jeune agriculteur installé en juin dernier sur une exploitation implantée au sud de Dijon, à Brazey-en-Plaine. Aux côtés de l’exploitation, figurent une structure de méthanisation et une ETA. Les trois structures (ferme, méthanisation et ETA) sont interdépendantes et complémentaires. « Nous effectuons beaucoup de travaux liés à la pomme de terre (plantage, buttage, fanage et arrachage) sur un gros secteur qui s’étend de Dole à Longvic et, depuis l’an dernier, on a investi dans un automoteur pour faire de l’épandage de digestat de méthanisation. On est très sollicités mais il y a aussi de plus en plus de concurrence. La difficulté pour des ETA comme nous, c’est que tous les clients veulent réaliser leurs travaux en même temps. Il faut parvenir à bien gérer tout ça. Nous faisons aussi des prestations de transport d’oignons avec nos bennes. On ne manque pas de travail… La principale motivation avancée par nos clients c’est qu’en faisant appel à nous, ils diminuent leurs investissements en matériel ».
Ces arbitrages sont-ils conjoncturels ou structurels ? C’est là tout la question qui déterminera, à l’avenir, la place prise par les ETA dans le paysage agricole régional.
Une question de génération
Fernando da Costa, président de la FNEDT Bourgogne Franche-Comté et entrepreneur implanté dans la Nièvre. Il constate une évolution favorable dont il se réjouit, logiquement : « Globalement, je peux confirmer cette montée en puissance du recours aux ETA. Je pense que cette évolution peut s’expliquer en partie par un « turn-over » générationnel dans les exploitations agricoles. Certains jeunes agriculteurs n’ont pas les mêmes schémas de raisonnement que la génération précédente, par rapport à la prestation de services. Ce qui joue également, c’est l’augmentation du prix des machines qui peut freiner certains dans l’investissement nécessaire. A titre d’exemple, récemment, on a constaté des hausses de l’ordre de 6 % dans le secteur des remorques et de plus de 2 % dans les tracteurs ». Ce changement de mentalité vis-à-vis de la prestation de services, Fernando Da Costa ne l’observe pas que chez les agriculteurs : il le constate aussi au sein des collectivités territoriales qui font appel aux entreprises du secteur. S’il ne nie pas la progression favorable de l’activité, le président de la FNEDT conserve la tête froide : « On voit aussi que les trésoreries sont souvent tendues dans les exploitations. Les prestations de services s’en trouvent aussi parfois freinées. Nous demeurons confiants, mais prudents pour l’avenir… ».