Blés tendres d'hiver Bio
Les variétés rustiques à envisager ?

Chloé Monget
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Le 12 juin, la Chambre d'agriculture de la Nièvre (CA 58) organisait la visite de ses essais de blés tendres d'hiver Bio rustiques réalisés dans une parcelle d'Emmanuel Brossard à Varennes-lès-Narcy. 

Les variétés rustiques à envisager ?
Emmanuel Brossard (tee-shirt rouge) souhaite cultiver des variétés anciennes et locales comme le Gros Bleu ou le Blanc d'Arnay.

Emmanuel Brossard (Huilerie Brossard) accueillait les essais de la Chambre d’agriculture de la Nièvre (CA 58) de blés tendres d’hiver Bio rustiques dans une de ses parcelles à Varennes-lès-Narcy, pour la seconde année consécutive. Afin de mettre en évidence les résultats obtenus, une visite de ces derniers était organisée le 12 juin par la CA 58.

Au total 10 variétés étaient présentées dont 6 variétés modernes adaptées à l’agriculture biologique : Tillsano, LD Voile, Royal, RGT Capexo, LG Abilene, Energo ; et quatre variétés populations anciennes : Blanc du Morvan, Rouge d’Alsace, Rouge de Champagne, Blé de la Saône. Toutes ces variétés ont été choisies, par la CA 58, pour : le rendement, le taux de protéine, la résistance aux maladies, mais aussi la hauteur de paille, le pouvoir couvrant et l’efficience à l’azote.

Axes de recherches

François Bonal, conseiller en agriculture biologique à la CA 58, détaille : « Nous recherchons des variétés rustiques capables de produire des blés meuniers en conditions difficiles et sans fertilisation. Nous recherchons également le pouvoir couvrant et la hauteur de paille afin de concurrencer les adventices. Afin de correspondre à ces critères, nous avons choisi de travailler avec des variétés modernes adaptées à l’agriculture biologique mais aussi des variétés-populations anciennes. Toutefois, leurs qualités boulangères doivent être étudiées afin de déterminer si elles peuvent correspondre aux attentes des transformateurs car en théorie ces variétés sont moins aptes aux techniques de boulangeries modernes ». Avant la visite, il rappelle aussi que : « Les variétés anciennes ne correspondent pas à une conduite intensifiée au risque de les voir verser ou d’obtenir de la rouille. Elles sont plus adaptées aux terroirs difficiles et aux terres superficielles – toujours dans une conduite extensive. Nous sommes d’ailleurs en lien avec le Parc naturel régional du Morvan (PNRM) pour ces essais, avec l’implantation du Blanc du Morvan, car le PNRM étudie le développement de la filière boulangerie à partir de blé ancien originaire du Morvan. Dans ce contexte nous travaillons conjointement sur les variétés anciennes afin de voir si leur qualité est adéquate à la planification moderne en meunerie et si elles correspondent aux attentes ».

Économes et résilientes

Question pratique, Emmanuel Brossard souligne : « J’apprécie le côté atypique des variétés anciennes et elles permettent de travailler la réduction des intrants notamment pour la fertilisation. En utilisant une variété rustique sans fertilisation, j’ai économisé environ 175 euros / ha (pour une fertilisation à 350 euros /t basée sur les cours 2024). En parallèle, je pense qu’il est logique de réimplanter des blés régionaux, car ils sont adaptés à nos terroirs – plus qu’un blé venant de Beauce – et car ils présentent des rusticités qui semblent plus résilientes à nos contraintes climatiques. Pour moi, elles regroupent ce qu’est le fameux bon sens paysan. L’année dernière le blé ancien, non fertilisé, a été meilleur que mon mélange de blé traditionnel fertilisé ». François Bonal confirme : « En 2023 dans l’essai, nous avions relevé 32 quintaux avec 10,5 de protéines pour le Rubisko (variété moderne réputée pour son rendement), et 30 quintaux à 13 de protéines pour le Rouge d’Alsace (ancienne) et 22 quintaux pour le mélange d’Emmanuel (composé de variétés modernes typées conventionnelles) ». Emmanuel Brossard rajoute : « Cela était plutôt encourageant d’autant plus que le Rouge d’Alsace offrait une couverture plus importante pour concurrencer les adventices et une meilleure production de paille ». Enfin, François Bonal conclu : « Nous verrons à la récolte si ces éléments se vérifient pour 2024. Mais nous sommes confiants ».

Image supplémentaire
Le Blé de la Saône, à gauche, et le Rouge de Champagne, à droite. Pour mémoire, le Blé de la Saône peut atteindre 129 cm de haut, ce qui en fait avec le Rouge d'Alsace (127 cm) l'une des variétés les plus grandes de l'essai. Pour le Rouge de Champagne, il atteint 84 cm au 4 juin.