Qualité de l'air
ParteN'Air, pour l'agriculture et l'environnement

L’azote est un fertilisant trop précieux pour qu'on se désintéresse des pertes par volatilisation. Les émissions d’ammoniac entraînent également une dégradation de la qualité de l’air et ont un impact sur la santé et l’environnement. Le projet régional ParteN’Air, lauréat 2023 de l’appel à projets AgriQAir de l’Ademe, vise à concilier plusieurs objectifs dans une optique « gagnant pour l’agriculture - gagnant pour l’environnement ». Précisions.

ParteN'Air, pour l'agriculture et l'environnement
Les particules sont classées selon leur diamètre. PM1 : particule avec un diamètre 1000 plus petit que 1 mm.

La qualité de l’air dépend de la présence dans l’atmosphère de polluants liés à l’activité humaine (transport, industrie, chauffage, agriculture…) ou d’origine naturelle (pollens, volcan, érosion, feux…). Les polluants de l’air ont une incidence sur la santé, l’environnement, mais aussi sur les rendements agricoles. Ils sont différents des gaz à effet de serre qui ont un impact sur le climat.

L’ozone, un polluant avec un impact sur les rendements agricoles et sylvicoles

À notre niveau, près du sol, l’ozone est produit l’été sous les effets du rayon du soleil à partir d’autres polluants. Ce gaz oxydant a un effet néfaste sur la santé et les espaces naturels et cultivés. Il provoque des nécroses sur les feuilles et une altération de la photosynthèse. L’étude Apollo menée par Chambre d’agriculture France, l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et l’Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) a estimé les pertes de rendement liées à l’ozone en Bourgogne-Franche-Comté (BFC) en 2030 à :

- 329 000 t en blé soit l’équivalent de près de 54 800 ha non produits avec un rendement de 60 q/ha,

- 745 000 t de matière sèche (MS) en prairie soit l’équivalent de près de 161 900 ha non produits avec un rendement de 4,6 t/MS.

L’ozone a également un impact sur la production sylvicole en particulier dans notre région sur le hêtre (-337 000 m3 en 2030) et le chêne.

Les principaux polluants atmosphériques émis par l’agriculture : particules et ammoniac.

Comme tout secteur d’activité, l’agriculture émet des polluants. En BFC, elle est responsable de 29 % des émissions des particules PM10 autant que le chauffage et le transport. Ces particules invisibles à l’œil nu peuvent contenir des substances dangereuses pour la santé. Plus elles sont fines, plus elles vont pénétrer dans le système respiratoire jusqu’aux alvéoles pulmonaires provoquant des pathologies respiratoires tels qu’asthme, allergies… mais aussi des atteintes cardio-vasculaires. Du fait de leur nocivité, elles sont classées « cancérigène certain » par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ). Le secteur agricole est le principal émetteur d'ammoniac (NH3), représentant 98 % des émissions en BFC. Il est émis lors de la minéralisation de l’azote organique contenu dans les déjections animales au niveau des bâtiments, des stockages ou lors des épandages. Les engrais minéraux azotés sont également source d’émission lors des apports au champ. Les retombées d’ammoniac provoquent une acidification, une eutrophisation des sols et des eaux de surface… Par ailleurs, selon sa concentration, l’ammoniac peut réagir avec d’autres polluants de l’air pour former des particules PM en particulier au moment des épandages de printemps.

Ammoniac dans l’air, une perte économique pour les agriculteurs.

Atmo-BFC, structure en charge de la surveillance de la qualité de l’air pour la région, a mesuré durant un an les niveaux en ammoniac sur 22 sites répartis sur l’ensemble de la région de typologie différente : urbain, industriel, à proximité de bâtiments d’élevage, de méthaniseur, au milieu de grandes cultures, de prairies… Cette campagne révèle que :

- les niveaux en ammoniac sont plus élevés en zone rurale en particulier lors des épandages d’engrais minéraux (février-mars) et organiques ;

- il y a des niveaux plus élevés sur les sites agricoles équipés de stockage non couvert ;

- les niveaux les plus élevés ont été observés à l’intérieur d’un bâtiment vaches laitières équipé d’une fosse sous caillebotis avec une saturation systématique des badges de prélèvement.

Au-delà de ses effets sanitaires et environnementaux, l’ammoniac volatilisé représente de l’azote non valorisé par les cultures. En BFC, les émissions d’ammoniac sont estimées à 39 000 t par an soit l’équivalent de 110 000 t d’ammonitrate 33 %.

Le projet ParteN’Air : gagnant - gagnant pour l’agriculture et la qualité de l’air

Financé par l’Ademe, ce projet collaboratif d’une durée de 2 ans a pour vocation de donner les compétences au secteur agricole sur les enjeux liés à la qualité sur l’air et plus particulièrement sur l’ammoniac pour faire évoluer les pratiques. Des supports de sensibilisation vont être créés et diffusés à destination des agriculteurs, conseillers, élus agricoles, apprenants. Des réunions techniques à destination des professionnels auront pour objectifs, à différents stades du projet, de sensibiliser aux enjeux, transférer les résultats des expérimentations et encourager la mise en œuvre des pratiques d’atténuation du risque.

Des essais aux champs pour obtenir des données locales

Depuis septembre 2024, un dispositif expérimental de suivi des émissions d’ammoniac est mis en place sur une culture de blé, en Côte-d'Or (site de Bretenière - Geda 21). Lors de chaque épandage de matière azotée, les kg d’azote volatilisés ainsi que le pourcentage de perte d’azote par hectare sont estimés. Plusieurs modalités d’épandage et de produits épandus seront testées : digestat et digestat sur biochar, ammonitrate et urée. La volatilisation de l’ammoniac est suivie pendant près de 20 jours après chaque épandage à l’aide de badges installés au-dessus du blé. Seront évalués les épandages d’automne, de février, puis de mars et avril. Le biochar obtenu par pyrolyse de biomasse a la capacité de retenir l’eau et d’absorber les éléments nutritifs. Cette modalité permettra de vérifier son intérêt vis-à-vis de la volatilisation de l’ammoniac. Les résultats finaux sont attendus pour ce mois de juin.

Un risque élevé de pathologies respiratoires pour les travailleurs agricoles.

Les travailleurs agricoles sont particulièrement exposés à l’inhalation de particules et de gaz tels que l’ammoniac et le sulfure d’hydrogène (H2S), en particulier lors du travail en milieu confiné. Ces expositions peuvent entraîner des pathologies respiratoires plus ou moins sévères. Le Réseau pathologies respiratoires agricoles national (Repran) organisera à destination des professionnels de santé un webinaire sur les risques respiratoires liés à l’exposition à l’ammoniac en exploitation agricole. Les Équipements de protection individuelle (EPI), en particulier les masques, seront présentés aux éleveurs lors d’une journée portes ouvertes. Le projet ParteN’Air, piloté par Atmo-BFC, associant plusieurs Chambres d’agriculture de BFC, et Repran basé à Besançon, constitue le premier volet d’ampleur au niveau régional pour sensibiliser et agir sur une problématique économique et environnementale importante à l’heure où l'on attend de l’agriculture qu’elle réduise ses émissions de polluants atmosphériques. Les enjeux économiques de la bonne gestion des fertilisants et de santé des éleveurs sont les clés d’entrée principales des acteurs de ParteN’Air pour une action « gagnant-gagnant ».

Contact Chambre d'agriculture 21 : Jérémie Blas (jeremie.blas@cote-dor.chambagri.fr)