Déclarations PAC
Le casse-tête des agriculteurs

Christopher Levé
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Avec la réforme de la PAC, certains agriculteurs, qui avaient l’habitude de faire leurs déclarations seuls, ont choisi cette année de passer par des organismes, comme la FDSEA, la Chambre d’agriculture ou le CerFrance, pour les aider à remplir ou contrôler leur dossier. C’est le cas de Luc Jacquet, céréalier à Fouronnes.

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Avec la réforme de la PAC, certains agriculteurs qui avaient l'habitude de remplir leurs dossiers seuls ont choisi cette année de passer par un organisme.

S’il a toujours fait sa déclaration PAC seul, Luc Jacquet, céréalier à Fouronnes, a fait le choix cette année de passer par la FDSEA de l’Yonne pour la faire contrôler avant de valider son dossier. « L’année dernière, j’ai fait une petite erreur d’étourderie qui a failli me coûter très cher. J’ai donc préféré cette année faire contrôler ma déclaration PAC par quelqu’un qui a l’habitude d’en faire, en l’occurrence une animatrice de la FDSEA de l’Yonne », confirme-t-il.
Pourtant, lui aussi à l’habitude de remplir des dossiers PAC. « Je suis installé depuis 25 ans. Même du temps de mon père, c’est moi qui la faisais. Mais cette année, avec la réforme de la PAC, la déclaration est plus complexe. Pour moi on s’éloigne de plus en plus de la vocation initiale de la PAC qui était à l’origine une compensation financière par rapport au prix du marché mondial. Aujourd’hui l’environnement entre pleinement en compte ».
Pour ce dernier, « en France, il n’y a plus grand-chose de commun avec les autres pays membres de la PAC. Désormais, chacun a son propre cahier des charges ce qui fait qu’il peut y avoir, dans certaines situations, une concurrence déloyale par rapport à nos collègues européens ».

Des aides en diminution

Luc Jacquet constate aussi que les aides ont diminué ces dernières années. « Depuis que je suis installé, j’ai perdu 25 % d’aides. Pour essayer de compenser tout ça, il faut prendre des MAEC, aller toujours plus loin, pour essayer de conserver un certain budget. Mais lorsque l’on a, comme moi, 124 ha en céréales, en zone intermédiaire, dans des terres à cailloux à faible potentiel, c’est un peu compliqué de joindre les deux bouts ».
S’il assure que les MAEC « ne sont pas un gros effort, cela peut bloquer sur des échanges de parcelles, sur une évolution normale d’une exploitation ».
Parmi les nouveautés de la réforme de la PAC, est à noter l’intégration du droit à l’erreur. Mais pour Luc Jacquet, l’erreur devrait être encore mieux prise en compte. « Qui ne peut pas se tromper ? L’année dernière, j’ai failli perdre 12 000 € d’aide simplement car je m’étais trompé en cochant la case orge de printemps à la place d’un orge d’hiver dans la déclaration. Une simple petite erreur d’inattention peut coûter très cher au paysan », conclut Luc Jacquet.

La date de dépôt des dossiers décalée au 31 mai

Le mercredi 3 mai au soir, le ministère de l’Agriculture a annoncé que les demandes d’aides de la PAC liées à la surface au titre de la campagne 2023 pourront être déposées jusqu’au 31 mai (la date limite était jusqu’alors le 15 mai). Cette décision fait suite à la nécessité d’accompagner de façon plus rapprochée les agriculteurs pour expliquer les nouveautés de la PAC 2023-2027. Mais aussi face à la difficulté de nombreux agriculteurs de remplir leur dossier sur un outil qui, lui aussi, a évolué. À noter que le décalage de la date ne concerne pas la télédéclaration des aides animales, qui reste fixée au 15 mai.

Billet d'humeur FDSEA

Une véritable usine à gaz

En 2023, faire son dossier PAC peut prendre des heures, car la nouvelle PAC demeure particulièrement complexe et difficile à appréhender. C’est pourquoi pour faire face aux difficultés rencontrées par les agriculteurs, le ministère a accepté que la date limite de déclaration soit décalée au 31 mai. C’est une demande qui a été portée par, la FNSEA, et nous pouvons que se féliciter de ce report. Il était indispensable de laisser un temps d’appropriation suffisant à tous les acteurs, que ce soit les agriculteurs et les organismes de conseil. Surtout que les difficultés que nous rencontrons viennent principalement des bugs informatiques et de l’inopérance du site TéléPac. D’ailleurs les bugs sont encore nombreux : RPG vides pour certains dossiers même après réinitialisation ; alerte informative 762 liée aux aides légumineuses positionnée à tort dans certains cas, et absente à tort dans d’autres cas ; impossibilité de valider une parcelle de chanvre ; blocage à l’onglet écorégime/BCAE8 pour certains dossiers ; écran de synthèse écorégime/BCAE8 incohérent (données non fiables, valeurs complètement erronées).

L’administration se cache derrière le droit à l’erreur, qui laisse la possibilité de corriger les déclarations après finalisation. La FDSEA de l’Yonne considère que ce droit ne doit pas concerner uniquement les éléments surfaciques, mais bien tous les éléments indiqués dans cette déclaration. Les agriculteurs n’ont pas à assumer les défauts de cette programmation. On ne peut que déplorer le manque de considération de l’État qui n’a pas été capable de mettre à jour TéléPac en temps et en heure. L’administration doit être aussi exigeante avec elle-même qu’avec les agriculteurs qu’elle contrôle.

Franck Pouillot, secrétaire général de la FDSEA de l’Yonne