Témoignage
Les Bourguignons trop sûrs d’eux ?

Françoise Thomas
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L’ensemble des professionnels viticoles bourguignons s’empare des conclusions de cette étude. Aujourd’hui, entretien avec Marc Sangoy, président de la cave de Lugny et par ailleurs membre de la commission Marché et développement du BIVB.

Les Bourguignons trop sûrs d’eux ?

Est-ce que vous vous attendiez à cette notion d’un vocabulaire trop technique ?

Marc Sangoy : Non, nous avons en effet plutôt été surpris par le fait que nous employons des termes perçus comme trop techniques. Nous ne nous y attendions pas forcément. Il est vrai que cela doit aussi dépendre de la région d’origine de ces jeunes. Ceux habitant les zones viticoles sont plus habitués aux termes que nous utilisons. Il n’empêche que nous aurons à simplifier notre vocabulaire, et qu’il nous faut admettre que les notions d’appellations régionales, communales, de vins sans IG, etc., peuvent être compliquées à assimiler. Si le cépage chardonnay est souvent bien compris, notre classement pyramidal en Bourgogne peut être moins évident.

Quels autres aspects résultats de l’étude vous ont interpellés ?

M.S. : Je ne m’attendais pas non plus à ce sentiment de méfiance. Et parce qu’ils ne nous connaissent pas, ces jeunes consommateurs vont ailleurs plutôt que de venir découvrir nos produits. Serions-nous donc trop sûrs de nous ? Cela vaut la peine de se poser la question !

Il y a certes un fait générationnel : ils ont envie de découvrir d’autres choses, c’est donc à nous d’aller les chercher et de leur expliquer notre démarche. À nous également de profiter aussi du fait que le Mâconnais sort un peu son épingle du jeu en étant très certainement moins connoté grande Bourgogne. Nous avons plus à défendre nos appellations village et nos cuvées spéciales. Comme, pour la cave de Lugny, la Pie masquée. Avec elle, nous mettons plus en avant le fait que c’est une gamme éco-conçue, le fait que c’est un mâcon chardonnay vient en second plan.

Quelles autres actions mène déjà la cave de Lugny en direction de ces nouveaux et futurs consommateurs ?

M.S. : Nous développons beaucoup la partie œnotourisme, notamment avec les balades "biodiversité" en trottinette électrique dans les vignes. Ces clients-là sont à la recherche d’explications sur le patrimoine, ils viennent certes déguster du vin, mais aussi et surtout découvrir l’entourage du vin, la vie dans les vignes. Pour eux, le pourquoi et le comment sont donc tout aussi importants. Nous ne devons pas rester que sur l’appellation, mais bien apporter des explications sur tout ce qui est autour.

La table numérique à disposition dans la boutique de Lugny est aussi très consultée par notre clientèle de trentenaires et de quadragénaires. Ils ont les explications sur nos vins de façon plus simple et plus ludique. Et, puisque cela amène souvent d’autres questions plus techniques, rien ne vaut l’échange en direct avec les personnes sur place.

Nous n’avons pas de politique spécifiquement axée sur ce public-là à la cave, mais notre groupe jeunes au sein de la cave nous aide à trouver les mots et les façons de communiquer à cette génération. À venir, par exemple, il y a notre concert du 2 juillet avec le chanteur Gabriiel et le groupe afrofunk Supergombo. Avant de tout révolutionner, nous avons donc à prendre un peu de recul et réformer quelques éléments un peu usés.