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Prédation

L'élevage dans l'impasse ?

La mise à l’herbe est imminente pour les éleveurs Nivernais. Mais, cette année, ce moment est entaché par l'ombre de la prédation.

Par FDSEA 58, Section bovine de la FDSEA 58, JA 58 et Chambre d'agriculture de la Nièvre
L'élevage dans l'impasse ?
Une partie des brebis attaquées chez Clément Blandin et Aude Martin, avaient été exposées par ces derniers pour montrer leur désarroi.

Comme tous les ans, le printemps est synonyme de mise à l’herbe pour de nombreux élevages nivernais. Un instant libérateur pour les animaux et les éleveurs qui fait suite aux mois d’enfermement hivernal dans les stabulations. Censée être une période festive, elle ne l'est pas du tout cette année. La cause de ce flétrissement est simple : la prédation. Dans ce contexte la FDSEA 58, la section Bovine de la FDSEA 58, JA 58 et Chambre d'agriculture de la Nièvre s'inquiètent pour la préservation des veaux et des agneaux pour la campagne à venir, ce qui s'ajoute à un contexte sanitaire très préoccupant.

Mille-feuilles de problématique

En ce qui concerne la prédation, en 2024, du 15 janvier au 30 décembre, 126 constats ont été réalisés par l'OFB dont 61 déclarés LNE, avec 503 animaux concernés (ovins, bovins). Et, les premiers mois de la nouvelle année ne sont pas plus rassurants, avec pour la période du 31 décembre 2024 au 28 mars 2025, 47 constats OFB dont trois en attente de résultat (cinq déclarés « loup écarté », 4 causes indéterminées et le restant déclaré LNE). Au total, pour la même période, cela concerne 178 animaux. Des chiffres extrêmement préoccupants soulevant la question de la présence lupine dans le département qui à l'heure actuelle (en date du 3 avril) n'est pas reconnue à cause d'une méthode de comptage prenant en compte uniquement les relevés ADN de janvier à mars. Cette méthodologie n'est pas adaptée à des territoires de colonisation comme le nôtre où les prédateurs sont en constante mouvance. Malheureusement, pour obtenir un suivi renforcé, il est nécessaire qu'une meute fixe soit identifiée dans un territoire. Or les analyses ADN positives sont indispensables pour acter cela. Mais, pour avoir celles-ci, il faut un suivi renforcé… un serpent se mangeant la queue et emportant le travail d'une campagne dans son sillage. En sus, les seuls moyens de protection reconnus par l'État sont les chiens de protection et les filets. Ceux-ci ne concernent que l'élevage ovin, puisque pour le cheptel bovin rien n'est prévu (au 3 avril). Aujourd'hui, la crainte de nouvelles attaques pèse donc sur les épaules des éleveurs, avec comme poids supplémentaire à endosser des moyens de protection proposés peu efficaces… Tout cela engendre donc un dilemme : « sortir les animaux ou non ? ».

Un choix à faire

Malgré cela les responsables politiques ne semblent pas prendre la mesure du problème… ou ne veulent pas. Il n'y a pas aujourd'hui un temps de latence empêchant toute réponse rapide et efficace contre le loup (comme les tirs de défense simple). En parallèle, la population est totalement dans le flou devant cette problématique puisqu'ielle ne paraît pas avoir connaissance que la prédation impacte directement la qualité de leur produit et le bien-être animal, si chers au grand public. Il faut désormais que les consommateurs entendent que la prédation génère des animaux morts, déboussolés ou encore déchiquetés. Et cela passera forcément par des démonstrations de la profession. Il faudra aussi leur rappeler que tout cela n’est pas l’âme de l’élevage nivernais ! Cette âme existe bien et ancre ses racines dans un système herbager où la liberté des animaux dans les pâtures est la clé de voûte pour atteindre une viande de qualité que ce soit pour les ovins ou les bovins. Face à cette situation globale qui semble dans l'impasse pour l'élevage nivernais, une autre question se pose : quel sera l'avenir ? Là, deux chemins s'ouvrent : l'un menant à un monde où la prédation règne et où l'élevage de plein air n'est plus, l'autre s'élevant vers un univers sans prédation doté d'un élevage respectueux de l'environnement, de la biodiversité, des animaux élevés et des éleveurs. Le temps de la réflexion est terminé. Un choix doit être fait, et vite. L'engagement de la FDSEA 58, de la section bovine, des JA 58 et de la Chambre d'agriculture auprès des éleveurs au quotidien est bien réel. Il passe notamment par des rencontres, des aiguillages en matière de réglementation ou encore des formations (pour l'obtention de permis de chasse pour les tirs de défense simples). Cet engagement auprès de la profession ne s'arrêtera pas tant que la situation ne s'améliorera pas.

Plus de chiffres

Du 15 janvier 2024 au 30 décembre 2024, sur 126 constats réalisés par l'OFB, outre les 61 déclarés LNE, 7 dont la responsabilité du loup a été écartée pour sept, pour 3 la cause de la mort est non liée à une prédation et le restant est en cause indéterminée. Sur les 503 animaux sont concernés (ovins, bovins), sont dénombrés 253 morts et 250 blessés. Pour la période du 31 décembre 2024 au 28 mars 2025 : les 47 constats de l'OFB concernent 178 animaux (ovins, bovins), dont 91 morts et blessés 87.