FDSEA 89
Ils sont venus et ils ont vu…
Le désastre annoncé est tel, que la FDSEA de l’Yonne vient d’organiser trois visites terrain à l’intention de l’administration, afin de constater de visu la réalité de la situation et l’inquiétude grandissante du monde agricole
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Gel et grêle dans les vignes, impossibilité de récolter l’herbe, obligation de rentrer les animaux et de les nourrir, grêle et excès d’eau en arboriculture, une moisson qui s’annonce déjà comme catastrophique compte tenu d’un manque de qualité et de quantité, pénalisée de surcroit par des risques sanitaires… Aux quatre coins du département, le constat se fait chaque jour un peu plus lourd, accentué par la chute des cours. C’est pour que l’administration prenne réellement la dimension du désastre agricole annoncé, que la FDSEA a organisé vendredi dernier trois visites de terrain à l’attention du directeur de la DDT 89, Didier Roussel et de son adjoint, Philippe Jager, ainsi que du responsable de la Direction Départementale des Finances Publiques, Jean Pierre Jallabert.
«A ce point là, jamais !»
Tout au bout de la parcelle, les animaux semblent comme réfugiés sur un ilôt de verdure. Tout autour, la terre est labourée, striée, ravagée par le piétinement et l’herbe a quasiment disparu. Conséquence de l’excès de pluviométrie enregistré le mois dernier. Une situation inédite, pour Jean-Bernard Petit, éleveur allaitant en charolais aux portes d’Avallon : «installé depuis 1983, j’avais déjà connu des situations similaires, mais à ce point là, jamais !» Le Gaec de Chassigny totalise une centaine d’hectares de prairies permanentes, dont une partie drainées, mais le scénario se répète un peu partout : «sur cette parcelle, qui est sans doute la pire, j’estime les pertes de récolte d’herbe entre 70 et 80%, mais sur l’ensemble, on peut parler d’un peu plus de 50% de dégâts…» Sorties le 1er mai, plus tard que d’ordinaire, faute de portance suffisante des sols, les vaches ont du rentrer à l’étable le 1er juin et viennent seulement de réintégrer les pâtures, mais le mal était fait : «les deux tiers sont passés sous leurs pattes. Quand il pleut, une bête qui n’est pas bien marche encore plus, accentuant d’autant le piétinement…» Sous le hangar, du fourrage pressé et rentré de la veille : «il aurait du l’être il y a plus de 15 jours ! Et pourtant, l’herbe était prête de bonne heure cette année. On était pratiquement à l’optimum fin mai, avec l’espoir de faire du volume et du bon foin…» La météo en a décidé autrement. Pour l’heure, Jean-Bernard Petit pense réinstaller un râtelier au pré et donner de la paille mélassée à ses vaches, faute de mieux, hypothéquant sur un éventuel resemis d’herbe. Obligé pour cela de rentrer une nouvelle fois ses animaux…
«On commence à ne plus croire en notre métier»
La visite s’est poursuivie en Puisaye chez John Beeuwsaert, installé depuis 2 000 en polyculture avec 75 ha en prairie permanente : «Nous sommes diversifiés, avec de la vente directe de charolais, mais cette année il n’y aura ni prix ni rendement, autour de nous certains devront arrêter leur activité, il faudrait sauver ceux qui resteront» Dans son hangar, l’exploitant montre deux seaux remplis pour l’un d’orge récolté en 2015, et pour l’autre de la récolte 2016 : «Le poids spécifique était de 70 en 2015 avec un calibre de 90, on atteint à peine 50 de PS cette année pour un calibre de 15». Une large part de la récolte sera classée en mouture, d’où un manque à gagner important. L’agriculteur reconnaît qu’il sera contraint d’abandonner une production : s’il s’agit de l’élevage, que deviendront les prairies qui ne peuvent être mises en culture en raison de la proximité d’un cours d’eau ?
Sur l’exploitation, un salarié à temps plein devrait partir en retraite dans un an mais ne sera peut-être pas remplacé, la solution serait une préretraite avec pour cela un plan d’accompagnement de l’État. «C’est la troisième mauvaise année, après un manque de rendement en 2014 et une baisse des prix en 2015. Quand on va livrer le grain à la coopérative, l’ambiance est lourde, on ne s’attarde pas à discuter comme cela se fait d’ordinaire». Les pois d’hiver sont redevenus beaux mais il y en a peu, quant au lupin il est broyé et les grains de colza sont petits. Les demandes de la profession sont passées en revue par Francis Letellier, président de la FDSEA de l’Yonne : faire classer l’ensemble du département en calamités, recourir à des exonérations de taxe foncière non bâtie, prise en charge de tous les emprunts y compris Agilor. Pour le cas des demandes à déposer en mairie, celles-ci doivent être faites 15 jours après l’évènement naturel et 15 jours avant la récolte. Jean Pierre Jallabert, responsable à la DGFIP, rappelle qu’il est possible également de demander une remise à titre gracieux, au cas par cas.
Dans le Sénonnais, la qualité est plombée partout
à Saint Clément, dans le Sénonnais, chez Étienne Henriot, les constatations sont également alarmantes. Installé en Gaec depuis 1978, l’exploitant pratique l’assolement blé-colza-maïs-orge d’hiver et a abandonné le tournesol et les pois en raison des oiseaux. La prestation récolte est ici en sous-traitance. Cette année la qualité est plombée partout : sur la première journée la récolte de l’orge d’hiver est classée à 10 % seulement en qualité brassicole, et la moyenne est de 45 quintaux à l’hectare alors qu’en 2015 on atteignait les 80 quintaux, avec une moyenne de 65 à 70. En 2014, le rendement était meilleur mais les grains étaient marqués par la maladie. Sur la dernière journée rien n’a pu être classé pour la brasserie. Cette année des contrats d’orge de brasserie ont été revendus à temps, par chance, car ils ne pourront pas être honorés. Dans les champs, en bordure d’agglomération, les épis restent droits, par manque de poids dans les grains. Le recours aux fongicides permet de bien gérer les maladies, mais on constate un problème de fécondation, dû au manque de lumière et au froid, qui ont empêché les insectes pollinisateurs de remplir leur rôle. Selon Francis Letellier, il faudra 5 ans pour se remettre car actuellement «on vit à crédit». la Pac est un filet de sécurité dans les zones à faible potentiel que sont les zones intermédiaires. Ceux qui se sont installés en bio ressentent plus durement aussi la situation actuelle.
«A ce point là, jamais !»
Tout au bout de la parcelle, les animaux semblent comme réfugiés sur un ilôt de verdure. Tout autour, la terre est labourée, striée, ravagée par le piétinement et l’herbe a quasiment disparu. Conséquence de l’excès de pluviométrie enregistré le mois dernier. Une situation inédite, pour Jean-Bernard Petit, éleveur allaitant en charolais aux portes d’Avallon : «installé depuis 1983, j’avais déjà connu des situations similaires, mais à ce point là, jamais !» Le Gaec de Chassigny totalise une centaine d’hectares de prairies permanentes, dont une partie drainées, mais le scénario se répète un peu partout : «sur cette parcelle, qui est sans doute la pire, j’estime les pertes de récolte d’herbe entre 70 et 80%, mais sur l’ensemble, on peut parler d’un peu plus de 50% de dégâts…» Sorties le 1er mai, plus tard que d’ordinaire, faute de portance suffisante des sols, les vaches ont du rentrer à l’étable le 1er juin et viennent seulement de réintégrer les pâtures, mais le mal était fait : «les deux tiers sont passés sous leurs pattes. Quand il pleut, une bête qui n’est pas bien marche encore plus, accentuant d’autant le piétinement…» Sous le hangar, du fourrage pressé et rentré de la veille : «il aurait du l’être il y a plus de 15 jours ! Et pourtant, l’herbe était prête de bonne heure cette année. On était pratiquement à l’optimum fin mai, avec l’espoir de faire du volume et du bon foin…» La météo en a décidé autrement. Pour l’heure, Jean-Bernard Petit pense réinstaller un râtelier au pré et donner de la paille mélassée à ses vaches, faute de mieux, hypothéquant sur un éventuel resemis d’herbe. Obligé pour cela de rentrer une nouvelle fois ses animaux…
«On commence à ne plus croire en notre métier»
La visite s’est poursuivie en Puisaye chez John Beeuwsaert, installé depuis 2 000 en polyculture avec 75 ha en prairie permanente : «Nous sommes diversifiés, avec de la vente directe de charolais, mais cette année il n’y aura ni prix ni rendement, autour de nous certains devront arrêter leur activité, il faudrait sauver ceux qui resteront» Dans son hangar, l’exploitant montre deux seaux remplis pour l’un d’orge récolté en 2015, et pour l’autre de la récolte 2016 : «Le poids spécifique était de 70 en 2015 avec un calibre de 90, on atteint à peine 50 de PS cette année pour un calibre de 15». Une large part de la récolte sera classée en mouture, d’où un manque à gagner important. L’agriculteur reconnaît qu’il sera contraint d’abandonner une production : s’il s’agit de l’élevage, que deviendront les prairies qui ne peuvent être mises en culture en raison de la proximité d’un cours d’eau ?
Sur l’exploitation, un salarié à temps plein devrait partir en retraite dans un an mais ne sera peut-être pas remplacé, la solution serait une préretraite avec pour cela un plan d’accompagnement de l’État. «C’est la troisième mauvaise année, après un manque de rendement en 2014 et une baisse des prix en 2015. Quand on va livrer le grain à la coopérative, l’ambiance est lourde, on ne s’attarde pas à discuter comme cela se fait d’ordinaire». Les pois d’hiver sont redevenus beaux mais il y en a peu, quant au lupin il est broyé et les grains de colza sont petits. Les demandes de la profession sont passées en revue par Francis Letellier, président de la FDSEA de l’Yonne : faire classer l’ensemble du département en calamités, recourir à des exonérations de taxe foncière non bâtie, prise en charge de tous les emprunts y compris Agilor. Pour le cas des demandes à déposer en mairie, celles-ci doivent être faites 15 jours après l’évènement naturel et 15 jours avant la récolte. Jean Pierre Jallabert, responsable à la DGFIP, rappelle qu’il est possible également de demander une remise à titre gracieux, au cas par cas.
Dans le Sénonnais, la qualité est plombée partout
à Saint Clément, dans le Sénonnais, chez Étienne Henriot, les constatations sont également alarmantes. Installé en Gaec depuis 1978, l’exploitant pratique l’assolement blé-colza-maïs-orge d’hiver et a abandonné le tournesol et les pois en raison des oiseaux. La prestation récolte est ici en sous-traitance. Cette année la qualité est plombée partout : sur la première journée la récolte de l’orge d’hiver est classée à 10 % seulement en qualité brassicole, et la moyenne est de 45 quintaux à l’hectare alors qu’en 2015 on atteignait les 80 quintaux, avec une moyenne de 65 à 70. En 2014, le rendement était meilleur mais les grains étaient marqués par la maladie. Sur la dernière journée rien n’a pu être classé pour la brasserie. Cette année des contrats d’orge de brasserie ont été revendus à temps, par chance, car ils ne pourront pas être honorés. Dans les champs, en bordure d’agglomération, les épis restent droits, par manque de poids dans les grains. Le recours aux fongicides permet de bien gérer les maladies, mais on constate un problème de fécondation, dû au manque de lumière et au froid, qui ont empêché les insectes pollinisateurs de remplir leur rôle. Selon Francis Letellier, il faudra 5 ans pour se remettre car actuellement «on vit à crédit». la Pac est un filet de sécurité dans les zones à faible potentiel que sont les zones intermédiaires. Ceux qui se sont installés en bio ressentent plus durement aussi la situation actuelle.