Moment clé
Salon de l'agriculture: les coulisses

Lucie Lecointe, FDSEA 58
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Politiquement, le Salon de l'agriculture est un moment clé pour la profession. Pour en comprendre les tenants et les aboutissants, Emmanuel Bernard, président de la FDSEA 58 revient sur l'événement. 

Salon de l'agriculture: les coulisses
Emmanuel Bernard aux victoires de la viande de bœuf label rouge. "Le message des anti-tout est inaudible, les chiffres de la consommation de viande le montrent".

Le Salon de l’Agriculture est un rendez-vous important pour la profession pour trois raisons : la première, la communication auprès des visiteurs, des médias et du public parisien. Ensuite, c’est un moment très précieux de discussion et d’influence entre profession agricole, administration et Ministres ; en effet, les représentants agricoles ont accès aux ministres eux-mêmes. "C’est là toute la valeur de notre travail de responsable professionnel", témoigne Emmanuel Bernard, vice-président de la FNB. Cette année, le Salon a aussi permis de rencontrer les candidats à l’élection présidentielle, afin de confronter les programmes des candidats avec les lignes syndicales défendues par le réseau et les associations spécialisées.

Des candidats qui méconnaissent les enjeux de la filière

"En tant que représentant de la Fédération Nationale Bovine, j’échange avec tous les candidats qui viennent, ces rendez-vous sont très préparés car le temps manque pour faire passer nos messages. Il faut être synthétique pour ne pas les noyer et favoriser la mémorisation ! L’objectif de la discussion est de confronter leur programme face aux demandes des éleveurs : modèle d’élevage, approvisionnement français en restauration hors domicile… Au-delà d’un consensus d’idée (sur la défense de notre modèle d’élevage par exemple), il s’agit de questionner le "comment on y arrive", explique Emmanuel Bernard. Il poursuit : "Il y a une vraie méconnaissance des enjeux de la filière, par exemple on leur apprend que la filière ruminants représente 500 000 emplois, c’est une filière majeure et ils en prennent conscience ! On essaie d’avoir une communication très positive ; on défend notre modèle d’élevage et aussi l’idée que le consommateur doit avoir le choix de manger de la viande ou pas ! Le message des antitout est inaudible, les chiffres de la consommation de viande le montrent"

La vérité au consommateur

La FNB et l’interprofession profitent également du Salon pour faire passer des messages sur l’information au consommateur, l’accès à l’information sur ce qu’il a dans son assiette : la protéine de synthèse, la viande artificielle ne peuvent pas s’appeler viande, cette décision a été votée avec Egalim1 et pourtant il manque encore les décrets d’application…

Le seul juge de paix est le consommateur

"Les consommateurs doivent avoir confiance, ce sont les seuls juges de paix" analyse Emmanuel Bernard avant d’ajouter :"C’est bien les consommateurs qui nous ont fait reprendre des parts de marché avec leur acte d’achat pendant le confinement ! Les crises de confiance sont terribles et nous ont laissés meurtris. Avoir des questions est très légitime : les consommateurs sont éloignés des systèmes de production et des méthodes d’élevage ; il se dit beaucoup de choses !"

Discussion libre au sein de la filière

"Les élus FNB ont rencontré les abatteurs et les grossistes : la parole est libre car il n’y a pas de cadre interprofessionnel ou syndical. Les dossiers sont travaillés d’une autre façon" pointe Emmanuel Bernard. "Certains distributeurs peinent à comprendre la décapitalisation : ils ont du mal à être approvisionnés et ne réalisent pas que cette baisse de l’offre est structurelle. Métro par exemple, voudrait augmenter son pourcentage d’approvisionnement en viande française, mais en étant passé pendant des années par de l’import, dans un contexte de raréfaction de l’offre, il n’est pas servi en priorité par son apporteur !"

Développer l'engraissement en France?

"Nous sommes le seul pays en Europe où il existe une réserve de potentiel d’engraissement ! On pourrait imaginer qu’une partie des volumes envoyés en Italie ou en Espagne pourraient être engraissés en France. Pour cela, une condition : c’est la contractualisation en intégrant les coûts de production ! Naisseurs et engraisseurs, chacun doit couvrir ses coûts de production ! Les abatteurs sont prêts à réfléchir à des projets d’engraissement pour combler leur demande. Il faudrait aussi sécuriser les abatteurs avec des acheteurs engagés, comme Métro par exemple…" souligne Emmanuel Bernard.