Chasse
La force de l'équilibre

Chloé Monget
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Considérée par certains comme un monde d’hommes, la chasse qu’elle soit à tir ou à courre, attire pourtant les femmes.

La force de l'équilibre
Virginie Prioux insiste : «  pour venir voir une chasse à courre, il suffit de prendre contact avec le maître d'équipage de celui près de chez vous. Les coordonnées se trouvent souvent sur internet ». CREDIT PHOTO : Virginie Prioux

« Ma mère, Marie-Hélène, qui a créé le Rallye Tempête (Pamfou en Seine-et-Marne) avec mon père, Pierre-François, a conduit les chiens pendant des années (aujourd’hui ils sont gérés par mon frère Philippe). Cela force le respect de certains à nous accepter dans ce milieu » pointe Virginie Prioux, exploitante agricole à Chamilly (ovins, bovins et cultures), membre du Rallye Tempête et participant à certaines chasses avec le Rallye Pique Avant Nivernais (Saint-Aubin-des-Forges) avant d’ajouter : « Cela étant, c’est assez naturel pour notre rallye (Tempête) d’avoir des femmes, puisqu’il est familial depuis le début ».

Pour elle, la chasse à courre n’est plus « un sport réservé aux nobles. Avant d’être exploitante, j’ai été professeure pendant 10 ans. Mon père est lui aussi professeur. Quant à mon frère et ma sœur (Cécile), qui font aussi partie de l’équipage, ils sont commerciaux. Aujourd’hui, dans les équipages, toutes les classes sociales sont représentées, et cela est très enrichissant. Il est dommage que certaines restent cloîtrées dans leurs préjugés et n’aillent pas plus loin ».

Une visée familiale

Virginie insiste d’ailleurs sur cet aspect : « avoir une diversité est un avantage indéniable notamment pour les plus jeunes qui apprennent à avoir une ouverture d’esprit grâce à cela. Pour ma part, mes enfants (Margot, 15 ans et Quentin, 13 ans) nous suivent à la chasse depuis leur plus jeune âge et ils apprennent de chaque membre. Si au départ ils étaient accompagnés, aujourd’hui ils sont seuls en forêt. Ils s’y débrouillent, ce qui est une bonne leçon pour s’en sortir dans la vie ». Elle poursuit avec un sourire : « en plus comme toute la famille chasse à courre, c’est aussi une excuse pour se retrouver ensemble tous les samedis ! ».

Restez humble

Outre cela, Virginie explique : « La chasse est une leçon d’humilité, et particulièrement la chasse à courre, car nous ne prenons pas à chaque fois. Les animaux sont rusés et nous induisent nous et les chiens en erreur. La chasse à courre c’est aussi apprendre à perdre ; là encore, comme dans la vie ».

Si tous ces éléments font en partie la passion de Virginie, elle accentue sur un point : « je suis là pour voir les chiens et les chevaux travailler ainsi que voir le gibier. Sans l’amour des animaux, on ne peut pas chasser ». Pour expliquer son point de vue elle fait un parallèle avec son métier d’éleveuse : « cette vision de la chasse peut paraître étrange, mais c’est le même principe que pour l’élevage : on nourrit et panse nos bêtes pour finalement les emmener à l’abattoir. Mais, on les aime quand même ».

Vol ce l’est(1)

Malgré la bonne volonté de certains chasseurs et chasseresses, les dégâts de gibier sont de plus en plus nombreux (390 exploitants indemnisés par la FDC 58 en 2020-2021 contre 292 en 2018-2019). À cela, Virginie Prioux réagit : « Il y a une population de sangliers de plus en plus importante ces dernières années dans la Nièvre. Et, les chasseurs, eux, sont de moins en moins nombreux. Certes, la période de chasse a été rallongée cette année, mais cela n’est pas encore suffisant. Je ne recommanderai jamais assez aux exploitants de chasser également, afin de réguler la population sur leurs terres. Sans cette prise d’initiative, c’est la nature qui va régler le problème avec des maladies, ce qui n’est pas souhaitable puisque cela peut avoir des conséquences malheureuses (maladies transmissibles au bétail ou à l’homme, par exemple). Que ce soit seul ou en groupe, nous devons agir tous ensemble chasseurs et exploitants. Tout est une question d’équilibre maintenu ».

Note : (1) Terme de Vénerie désignant l’empreinte laissée par un animal au sol.

Bien s'entourer
Virginie Prioux et sa famille. Pour contacter le Rallye Tempête : Marie-Hélène et Pierre-François Prioux au 01 64 31 87 89 ou au 06 07 42 27 46 ou rallyetempete@gmail.com. Pour le Pique Avant Nivernais : 03 86 38 10 31. CREDIT PHOTO : Virginie Prioux

Bien s'entourer

L’exploitation de Virginie Prioux est en pleine forêt des Bertranges : « Je savais que je pourrais subir des dégâts de gibiers dans mes parcelles en m’installant ici. Je me suis donc adaptée : j’ai clôturé l’intégralité des terres et ai électrifié la clôture. Cela est un investissement tant financier que personnel puisqu’il faut l’entretenir très régulièrement. Certes, parfois je retrouve des cerfs dans mes prés, mais ce système me permet de contenir la majorité du gibier à l’extérieur de mes parcelles. Après j’ai aussi conscience que tous les exploitants ne peuvent pas faire cela, d’où l’intérêt de chasser ». L’exploitation de Virginie s’étend sur 93 ha dont 5 ha de cultures.

À pied ou à cheval
Aurélie Pregermain fait partie du Rallye des Amognes fondé en 1955.

À pied ou à cheval

Aurélie Pregermain, 36 ans, responsable de magasin de peinture à Nevers, accompagne à pied sur certaines chasses à tirs et est membre du Rallye les Amognes (Contact - Marc et Sylvie Pignot : marcsylviepignot@gmail.com) . « La chasse, qu’elle soit à tirs ou à courre, prend ses racines dans l’amour des animaux, dans les valeurs humaines et les traditions. Les femmes y ont leur place, car je pense que pour la chasse à courre, par exemple, elles ont une sensibilité et une finesse particulière. C’est aussi une question de transmission de valeurs. Car qui dit femmes, dit enfants. Ils sont l’avenir et si la chasse disparaît, comment pourra-t-on réguler les populations d’animaux ? C’est une question qui se pose non seulement pour les exploitants agricoles mais également pour la sécurité de tous, comme sur les routes de nos campagnes. La chasse dans son ensemble est méconnue. Je pense qu’il est important que chacun puisse échanger afin de comprendre les contraintes qui l’encadrent, comme pour la vénerie où l’on ne choisit qu’un animal par chasse ».

 

Un nombre croissant
Alexandre Pregermain, 11 ans, accompagne ses parents (Aurélie et Maxime-Henri) sur les chasses à pieds ou à courre.

Un nombre croissant

Les femmes sont de plus en plus nombreuses à avoir leur permis de chasse dans le département de la Nièvre

2010-2011 : 1.9 % (173 femmes)

2014-2015 : 2,5 % (225 femmes)

2019-2020 : 3,8 % (288 femmes)

2021-2022 : 4,2 % (304 femmes)

Chiffres fournis par la Fédération départementale des chasseurs de la Nièvre.

Une fête dédiée
Crédit photo : Ville de Fontainebleau / FDC 77

Une fête dédiée

Nature & Vénerie en fête, est un événement dédié à la chasse à courre, à la nature, aux trompes, et aux produits du terroir. Elle réunit 2 500 chiens, 150 chevaux. Des spectacles et des démonstrations (chiens de berger, chiens d’arrêt, monte amazone, attelages, fauconnerie, archerie, concours de tirs, cross par équipages, etc.) ont lieu en continu. Le 21 et 22 mai à Fontainebleau. Tarif : 7 euros, gratuit pour les moins de 12 ans. Informations : https://natureenfete.com/