Agriculture Biologique
Engraissement : une solution d'avenir ?

Chloé Monget
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Le 23 janvier, Bio Bourgogne-Franche-Comté proposait une demi-journée dédiée au système naisseur-engraisseur de génisses et de bœufs.

Engraissement : une solution d'avenir ?
Sébastien Girardet (au centre) a ouvert les portes de son exploitation (Gaec de Saint-Loup à Saint-Germain-Chassenay).

« La question de l’engraissement est travaillée pour diverses raisons, dont la valorisation des animaux pour la filière bio. Mais, il nous semblait nécessaire de montrer les autres impacts d’un tel système » souligne Damien Nicolas, conseiller élevage bio à Bio Bourgogne-Franche-Comté (Bio BFC). Ainsi, pour présenter tout cela, une demi-journée était organisée le 23 janvier, à Saint-Germain-Chassenay.

Consommation

La rencontre a débuté en salle, avec une dizaine de participants venus se renseigner sur le sujet. Pour démarrer Damien Nicolas a fait un point sur la consommation de viande bovine en France : « la consommation n’a pas spécialement baissé. Les pièces consommées ont évolué avec plus de hachés et de plats préparés. Pour la filière Bio, 75 % de la production part en haché. Aujourd’hui, la part de l’importation est d’environ 23 %, avec une hausse ces deux dernières années, malgré la réduction du cheptel français ». Damien Nicolas continue : « La demande est donc là, que ce soit auprès des consommateurs ou des abattoirs ; preuve en est, les démarches de certaines coopératives pour introduire des ateliers d’engraissement chez des céréaliers notamment. Si rien ne bouge, ces parts de marché partiront totalement à l’importation. L’engraissement peut donc être une solution pour répondre à cette demande grandissante et trouver une nouvelle valorisation aux animaux ».

Les impacts

Afin d’illustrer l’impact d’un tel système pour une exploitation, des études Inosys ont été mises en parallèle avec celle effectuée dans l’exploitation d’Adeline et Sébastien Girardet (Gaec de Saint-Loup à Saint-Germain-Chassenay) depuis 2019 par Bio BFC. Damien Nicolas insiste : « le système naisseur-engraisseur, requiert de diminuer le nombre de vêlages – ce qui est un pas parfois complexe à faire. Avec cette réduction, le montant des frais vétérinaires baisse aussi proportionnellement ». Sébastien Girardet complète : « le stress diminue également, puisqu’avec moins de vêlages, les bâtiments sont moins chargés et donc moins sujets aux pathogènes ». Damien Nicolas poursuit : « En gardant une base d’UGB et de SAU quasi identiques, on constate notamment une réduction des charges opérationnelles (CO), et surtout un gain au niveau de l’EBE/heures de travail d’astreintes et de saison (EBE/h TA & TS). Pour le Gaec de Saint-Loup, cela se traduit par un passage de CO d’environ 84 000 euros (pour 151 UGB et 150 SAU) à environ 90 000 euros (pour 169 UGB et 150 SAU environ). De son côté, l’EBE est passé de 103 600 euros à 136 705 euros. Quant à l’évaluation sociale, la réduction du temps de travail est estimée à 40 % d’heures TA & TS (de 3 500 heures à 2 100 heures), se traduisant également pour une multiplication par deux de l’EBE créé par h TA & TS. Bien évidemment ces chiffres supposent qu’il y ait une certaine autonomie notamment fourragère ». Sébastien Girardet précise : « Un peu de temps économisé permet de faire d’autres tâches au niveau d’autres ateliers ». Après ces chiffres, un point sur les émissions carbone a été développé par Lisa Aubry, conseillère élevage Bio à Bio BFC, via le système CAP' 2ER : « On se focalise sur la mesure des émissions en méthane, CO2 et protoxyde d’azote ». Elle rappelle : « Les exploitations (conventionnelles ou bios) sont presque les seuls systèmes stockant du carbone. Mais, dans les fermes bios, les leviers d’actions sur la réduction des émissions sont très réduits puisque les postes les plus émetteurs sont les cheptels et les engins ».

Sur le terrain

Ensuite, les participants se sont déplacés vers l’exploitation d’Adeline et de Sébastien Girardet (Gaec de Saint-Loup à Saint-Germain-Chassenay). Là, une visite était prévue pour revenir sur les pratiques du Gaec. Sébastien Girardet stipule : « Je ne sais pas si c’est la solution mais j’y trouve mon compte. Je suis passé à l’engraissement pour pouvoir profiter de mes enfants. Et, force est de constater que j’ai effectivement gagné du temps en ce qui concerne les vêlages ». Il ajoute : « au début, je n’étais pas sûr de mon choix, car les cours des broutards ont remonté au moment où je changeais d’approche ; j’ai pris le risque quand même. Pour moi, le système d’engraissement est plus sécurisant qu’un système avec broutards, car les prix sont moins sujets aux variations fortes et rapides des marchés. On peut également ajuster l’aliment, puisque l’on sait que l’on a un an pour se rattraper au niveau des poids. Je note aussi un autre avantage : la réduction d’utilisation de paille d’environ 25 % / an ». Afin d’arriver à un système à l’équilibre il évoque, la réduction du nombre de vaches, le tri nécessaire dans les naissances et le choix des taureaux : « j’ai totalement retiré le gène Q204X, car j’avais des problèmes de vêlages à chaque fois pour les animaux porteurs du gène, en plus de ne pas avoir d’occasions de les valoriser ; cela ne servait à rien de les garder. Pour la suite, je vais continuer à travailler assidûment à l’achat de reproducteurs génotypés afin de tendre vers les U (pour le moment je suis en R + ou R =). Je suis persuadé que pour avoir un certain prix, il faut faire de la qualité ». Il conclut : « On cherche des solutions pour s’en sortir financièrement, mais dès qu’un poste est dans le vert, on perd cette amélioration à cause des charges supplémentaires qui s’empilent. Toutes les hausses de charges amoindrissent le résultat de notre travail. Alors si on ne gagne pas trop notre vie en euros, autant gagner du temps ».

Photo supplémentaire
Depuis 2019, une étude de conversion en système naisseur-engraisseur est menée par Bio Bourgogne-Franche-Comté au Gaec Saint-Loup.