Blé tendre
Forum blé tendre Saône-Rhône le 21 septembre à Beaune

Propos recueillis par Berty Robert
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C’est à Beaune que va se tenir, le 21 septembre, le Forum blé tendre Saône-Rhône, organisé par Arvalis et Intercéréales, avec de nombreux partenaires. Il portera en grande partie sur l’adéquation entre l’offre et la demande en Bourgogne Franche-Comté. Jacques de Loisy, du Comité régional des céréales et Damien Racle, responsable de la commercialisation chez Bresson, expliquent ce qu’ils en attendent.

Forum blé tendre Saône-Rhône le 21 septembre à Beaune
Dans un contexte où beaucoup d'acteurs de la filière blé tendre cherchent à sécuriser leurs approvisionnements, Jacques de Loisy espère que ce forum pourra permettre à des producteurs régionaux de nouer des contacts intéressants.

Dans quel contexte s’inscrit ce forum pour la production de blé tendre en Bourgogne Franche-Comté ?

Jacques de Loisy : « Dans ce cadre du Comité régional des céréales (CRC), nous avons à cœur de valoriser notre production. Au-delà des aspects liés à sa quantité ou à sa qualité, nous devons aussi avoir des clients en face de nous. On sait, depuis toujours, que le marché est fluctuant. Depuis quelques années, nous faisons face à des aléas climatiques et des aléas de marchés récurrents. Un autre paramètre se met également en place, et qui s’applique à l’ensemble de la filière céréalière : la nécessité de décarboner la production. Dans ce contexte, pouvoir produire et consommer local est aussi important pour nous que notre capacité à répondre à des besoins plus lointains. Le but, c’est d’éviter de voir arriver dans notre région quelques centaines de milliers de tonnes venant d’ailleurs. Il y a six ans que nous travaillons sur cette question avec France Export Céréales et lors du forum du 21 septembre, nous pourrons présenter les résultats de travaux menés en ce sens depuis deux ans avec le soutien d’Arvalis et des services de l’État. L’étude que nous présenterons permettra de fournir à tous les maillons de la filière une meilleure idée de la caractérisation de tous les éléments concernant l’adéquation offre-demande ».

Existe-t-il aujourd’hui des éléments qui montrent une tendance favorable pour une meilleure adéquation offre-demande en BFC ?

J.d.L. : « Sans trahir le secret des travaux qui seront révélés le 21 septembre, je peux citer deux exemples assez importants pour la BFC :

- Il y a le projet d’une importante unité de transformation qui est en train de se concrétiser à Chalon-sur-Saône, en Saône-et-Loire, pour un marché de blé dit « améliorant ». Ce qui est significatif, c’est que ce marché avait été un peu délaissé dans notre région, ces dernières années en raison des directives nitrates et des coûts des fertilisants. Si un marché de consommation locale se développe grâce à cette future unité de transformation, cela vaut le coup de s’y intéresser à nouveau.
- La question des blés bio est aussi à scruter de près. La production s’est beaucoup développée, au moins en termes de surfaces cultivées, en BFC, mais, aujourd’hui, on constate qu’il n’y a pas d’adéquation offre-demande, parce que l’offre est supérieure à la demande. Il convient donc d’être attentif à cet élément. Beaucoup de producteurs bios sont aujourd’hui dépités en raison de la baisse des cours et les stocks sont relativement importants, en BFC et au plan national.
Ces deux éléments illustrent bien le sens des travaux que nous menons ».

Pour les producteurs régionaux, quel est l’intérêt de ce forum ?

J.d.L. : « On espère que les producteurs viendront nombreux au forum. C’est important qu’ils puissent s’exprimer et prendre connaissance des éléments de marchés. Ce forum c’est l’occasion de nouer des discussions, avec des acteurs qui cherchent à sécuriser leurs approvisionnements. C’est aussi à cela que doit servir notre événement : mettre en relation les producteurs et les industriels. Aujourd’hui, toutes les occasions d’avoir des informations sont importantes, pour l’ensemble des maillons de la filière».

Le positionnement géographique de la BFC est-il un atout dans cette logique ?

J.d.L. : « La consommation régionale d’alimentation humaine n’est pas négligeable, mais nous avons aussi une masse importante de consommation pour l’alimentation du bétail. Le positionnement géographique de la BFC fait que la Saône rejoint le Rhône : nous avons un débouché à l’export qui va sur le pourtour méditerranéen en Europe et en Afrique du Nord. Il y a là des segments de marchés sur lesquels on se doit de travailler. C’est le cas, par exemple, en Afrique du Nord. Compte tenu des conditions actuelles, certains de ces marchés pourraient être à notre portée, en fonction de ce que nous produisons actuellement ».

Vous allez ouvrir le forum. Quel message souhaitez-vous passer à cette occasion ?

J.d.L. : « Plus que jamais le monde change, tout va très vite, et je pense qu’il faut que l’ensemble des maillons de la filière échangent. Lors du forum, nous aurons plusieurs tables rondes qui pourront susciter de nombreuses questions. Il faut vraiment que les gens se rencontrent, échangent et parlent sur ces problématiques, c’est tout l’intérêt d’un tel forum et c’est comme cela qu’on pourra progresser ensemble. Jusqu’à présent, il n’y a jamais eu de réunion sur ce thème en BFC, c’est une première que je souhaitais depuis longtemps. Il est essentiel que les producteurs s’approprient cette journée. Cela permet d’avoir une réflexion sur son exploitation et notamment sur les moyens d’en optimiser la rentabilité ».

 

Damien Racle (Bresson) : « Les producteurs doivent de plus en plus répondre à des attentes précises »

Damien Racle (Bresson) : « Les producteurs doivent de plus en plus répondre à des attentes précises »

En charge de la commercialisation céréales et oléagineux au sein de l’entreprise de négoce côte-d’orienne Bresson qu’il codirige avec sa sœur, Damien Racle porte un intérêt particulier au forum du 21 septembre :

- La problématique de l’adéquation offre-demande est-elle une vraie préoccupation dans votre quotidien ?

- « Répondre à la demande a toujours été le nerf de la guerre pour les professionnels du négoce. Nous sommes dans la préoccupation permanente de parvenir à cibler ce que veulent les consommateurs finaux. Comme les débouchés sont nombreux, il faut segmenter les produits, pour pouvoir répondre à des demandes très diversifiées, en ultra-local, en régional, en national et à l’export. Dans le domaine industriel, on a aujourd’hui face à nous un très grand nombre de filières, avec des spécificités particulières (CRC, norme NF, cahier des charges propres à certains industriels) ».

- Votre travail consiste-t-il, en partie, à sensibiliser les producteurs à cette segmentation croissante des marchés ?

- « C’est notre travail et on le fait depuis des années. Chez Bresson, on a vite pris conscience que faire du blé pour faire du blé n’était pas la bonne réflexion. Depuis dix ans que je suis dans l’entreprise, j’encourage sans cesse les producteurs à s’engager dans les filières. On sait que, dans quelques années, le blé standard que l’on produit actuellement, on ne le produira plus, ou alors avec des débouchés très limités et une valeur insuffisante. L’évolution de la réglementation a tiré le blé français vers le haut. Être dans les filières, c’est aussi avoir un coup d’avance sur les évolutions réglementaires à venir ».

- Le forum du 21 septembre est-il pour vous un outil permettant de faire passer un certain nombre de messages aux producteurs ?

- « Oui, parce que tout le monde n’est pas conscient de la difficulté de suivre les évolutions des marchés du blé. Ils se font et se défont à la faveur de demandes spécifiques d’industriels. Il faut que les producteurs aient conscience que leur blé va aller dans des secteurs bien particuliers. Il va leur falloir, de plus en plus, répondre à des attentes précises ».

- Dans le domaine du blé tendre, avons-nous, en Bourgogne Franche-Comté, de vrais atouts ?

- « En BFC, nous avons toujours eu un profil assez particulier. À l’époque où il y avait beaucoup moins de variétés qu’aujourd’hui, les industriels, les meuniers de départements parfois lointains venaient chercher du blé en Côte-d’Or et autour parce qu’ils savaient qu’ils allaient trouver des caractéristiques physico-chimiques supérieures à ce qu’ils pouvaient avoir dans leur région d’origine. Aujourd’hui, il y a beaucoup plus de variétés, mais ce qui compte, c’est la manière dont on travaille, le cahier des charges. Le potentiel de répondre aux attentes des industriels, on ne l’a pas perdu ».