Millésime 2024
Le BIVB revoit les volumes à la hausse
Lors de la conférence de presse du 17 novembre précédant la vente aux enchères des vins des Hospices de Beaune, le BIVB a fait un point économique. Après avoir craint des volumes équivalents à la terrible année 2021, les dernières estimations s'avèrent légèrement meilleures.
La Bourgogne a été particulièrement arrosée cette année. Elle a subi des précipitations records avec des augmentations de 42 % en Côte-d’Or et même de 46 % dans l’Yonne, par rapport aux moyennes. Avec des températures élevées, le gradient Nord Sud se retrouve également du côté des importantes attaques de mildiou sur feuilles et sur grappes. Les pertes de récoltes ont été particulièrement importantes dans le Chablisien, le Châtillonais et même en Côte de Nuits et de Beaune, excepté pour les blancs qui ont mieux résisté. La Saône-et-Loire s’en sort miraculeusement bien. Le vent du nord et les jours ensoleillés et secs ont permis à la Bourgogne de néanmoins produire partout « des vins savoureux », rassurait François Labet, le président délégué du BIVB. Il remerciait tous les salariés et vignerons qui n’ont pas ménagé leurs peines, y compris les week-ends. Il ne fallait rater aucun passage ou mal faire son traitement cette année. Dans ce contexte difficile, le domaine des Hospices de Beaune, dirigé par sa régisseuse, Ludivine Griveau, a néanmoins réussi à finaliser sa conversion en agriculture biologique. Un exploit salué. Alors que les déclarations de récoltes sont encore à affiner, François Labet affinait également la prévision de récolte finale pour le millésime 2024. Elle a été revue légèrement à la hausse même si elle ne devait pas dépasser les 1,135 million d’hectolitres. C’est mieux qu’en 2021 (997 000 hl) mais bien loin des 1,9 million hl de 2023 et 1,75 de 2022. « Nous ne sommes pas dans la même situation qu’en 2021 […] pour les acteurs qui mettent au marché. Avec plus de stocks, cela permettra une belle régularité des prix », malgré le dynamisme des ventes.
Des hausses raisonnables ?
Une façon de ne pas inciter à la hausse des prix du vrac, paradoxalement. Ce que son confrère, le président du BIVB et négociant à Nuits-Saint-Georges, Laurent Delaunay, appelait aussi de ses vœux. « Après pratiquement 20 ans d’embellie, pour ne pas dire d’envolée des prix de la Bourgogne, […] il y a eu des conséquences sur les marchés », avec des hausses spectaculaires à la suite de spéculations des négociants pour se fournir en millésime 2021 et ensuite avec les hausses dues à l’inflation mondiale (énergies, matières premières…) post-crise Covid. En raison des temps d’élevage des vins de Bourgogne plus ou moins long selon les appellations et donc des faibles quantités disponibles à certains moments, mais aussi en lien avec la forte hausse des prix, le marché global des vins de Bourgogne était en repli de 7 %, rappelait Laurent Delaunay. Il se montrait plus optimiste : « la situation a complètement changé puisque le millésime 2024 arrive maintenant après les 2022 et 2023 », deux années généreuses en récolte. « On a des stocks, donc on peut espérer que les prix restent raisonnables », désireux de reconquérir des parts de marché perdues, alors que l’inflation est encore présente, tout comme la déconsommation des vins qui ne tire pas la tendance générale des marchés.
Des marchés qui redémarrent
Reste que la Bourgogne surnage dans ce marasme et ses marchés viennent de repasser en positif au global. « C’est la bonne nouvelle que je viens vous donner », se réjouissait le président du négoce bourguignon. La Bourgogne est repassée en positif sur les sept premiers de l’année 2024 en France et à l’export. + 3,2 % en volume avec la grande distribution et + 2,4 % en valeur, confirmant que des hausses sont toujours possibles. À l’export aussi, avec + 4,6 % en volume et + 3,7 % en valeur. « Au niveau mondial, les marchés restent amoureux de la Bourgogne ! Ils gardent une appétence pour nos vins. On peut l’attribuer au fait que les prix sont redevenus raisonnables ». Les marchés sont toujours tirés par l’export, comme le prouvent les chiffres aux États-Unis : + 7,4 % en volume et + 14,6 % en valeur. De très bons chiffres qui concernent principalement les vins blancs et les appellations régionales. Le Canada est dans la roue des États-Unis, + 9,4 % en volume et + 8 % en valeur. En revanche, Royaume-Uni et Japon ne font pas preuve d’un même dynamisme avec un « redémarrage plus mitigé car ils sont plus à la peine ». Les marchés "outsiders" asiatiques sont en revanche en plein boom, + 16 % depuis le début de l’année en volume et + 15 % en valeur, avec un redémarrage de la Chine à + 35 % en volume !
Quel effet Trump ?
La question qui taraudait tous les journalistes — et les opérateurs bourguignons — était de savoir si l’élection de Donald Trump avait joué un rôle pour anticiper les achats avant d’éventuelles taxes. Même si personne ne peut savoir si le futur Président américain appliquera son programme isolationniste, protectionniste et à quel niveau il pourrait augmenter les taxes sur les importations, Laurent Delaunay relativisait avec une analyse différente de la situation qui prévalait lors du précédent mandat de Trump. Le conflit commercial étant lié alors au différend entre l’Europe et les États-Unis autour du litige des aides entre Airbus et Boeing. « La taxe de 10 ou 20 sur tous les produits renchérirait nos vins sur le marché américain, mais d’une certaine manière, c’est un moindre mal, car tous les produits seront impactés de la même manière et il n’y aura pas de distorsion de concurrence comme on avait pu connaître lorsqu’il y avait une taxe spécifique en 2019-2020, mais qui n’avait pas impacté les vins italiens », donnait-il en exemple. Même si ce différend commercial Boeing/Airbus peut revenir à tout moment, compte tenu des difficultés de Boeing qui a essuyé de nombreuses pannes et crises médiatiques impactant son carnet de commandes. À anticiper donc pour ne pas miser tout sur les seuls États-Unis…