Maïs
Maïs et sécheresse

Alexandre Coronel
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En peu de temps, l’horizon s’est assombri pour les cultures de printemps, en particulier pour les maïs : la sécheresse et la canicule hâtent le cycle de cette plante tropicale et entament son potentiel de rendement.

Maïs et sécheresse
Le maïs dispose de mécanismes physiologiques adaptatifs pour limiter l’évapotranspiration, quand la réserve en eau du sol est insuffisante, mais c’est au détriment de sa croissance.

Les conditions du printemps ont été favorables à des semis précoces pour le maïs et les températures chaudes propices à l’avancée de la végétation. D’après l’observatoire Céré’Obs de FranceAgriMer, 30 % des maïs français étaient en floraison au 4 juillet (contre 1 % à la même date en 2021). Les importants cumuls de pluviométrie enregistrés fin juin paraissent déjà loin, chassés par la sécheresse et la canicule. Pour les cultivateurs de maïs, l’heure est à l’expectative : comment les plantes vont-elles passer ce cap difficile, où se conjuguent fortes températures et absence de précipitation ? Comme en 2020, ces températures très élevées associées à l’absence de pluviométrie durant la période de mise en place des grains font craindre des pertes de rendement significatives, pertes dont la sévérité dépendra de l’intensité et la durée des stress. « Les maïs semés précocement, qui ont bénéficié de températures moins élevées et d’une réserve hydrique correcte pendant leur floraison s’en tirent plutôt mieux que les semis tardifs, dont la floraison coïncide avec le stress hydrique et thermique », analyse Emeric Courbet, technicien grandes cultures à la Chambre d’agriculture de Haute-Saône. Le maïs est en effet très sensible aux stress pendant la période encadrant la floraison, durant laquelle les soies s’allongent hors des spathes.

Régulation de transpiration

« Dans le Jura, les situations sont très diverses, relate Patrick Chopard, technicien à la Chambre d’agriculture du Jura : des surfaces non négligeables ont accès à l’irrigation, et dans la vallée du Doubs, sur les sols profonds, les remontées d’eau par capillarité soutiennent la croissance des maïs. Sur les terrains plus superficiels, c’est beaucoup plus compliqué ». En cas de déficit hydrique, les plantes régulent leur transpiration en fermant leurs stomates sous l’effet d’hormones de signalisation émises lors de la perception du stress par la plante. Cela se traduit par le symptôme d’enroulement des feuilles durant les heures de la journée à forte demande d’évapotranspiration. Ce comportement de survie a l’inconvénient de réduire la production de matière sèche durant la séquence de déficit hydrique, mais s’avère utile en cas de prolongement du déficit grâce à un fonctionnement au ralenti, à condition que la perte de croissance générée par la fermeture temporaire des stomates ne soit pas trop importante.

Moins catastrophique qu’en 2020

Sébastien Picaud, polyculteur-éleveur du côté de Saint-Lothain, près de Poligny, sur des sols hétérogènes des contreforts du Revermont, constate de visu l’impact du déficit hydrique qui se fait sentir. « On voit bien les veines de terre moins profondes, où les feuilles du maïs se sont mises en cornet. Jusqu’à présent le peuplement était relativement homogène avec de bonnes croissances et des pluies arrivées pile au bon moment, pour la fécondation des épis. S’il ne pleut pas rapidement, le remplissage des grains sera pénalisé, mais ça ne devrait pas être aussi catastrophique qu’en 2020 où la floraison plus tardive avait coïncidé avec la canicule, et où il manquait des grains, avec des épis difformes ». Près de Dole, à Annoire, Matthieu Barraux produit du maïs semence sous contrat, avec l’appui de l’irrigation, sur 25 ha. « Les lignées utilisées en multiplication sont beaucoup plus fragiles que les maïs hybrides cultivés par les agriculteurs pour le grain ou l’ensilage. L’irrigation est indispensable pour avoir une croissance soutenue. On craint toujours les températures extrêmes qui peuvent compromettre la fécondation des épis, par desséchement prématuré des soies ou des pollens. On a cette année l’avantage d’avoir toujours un peu de vent, ce qui favorise la pollinisation ».