Énergie
À la découverte de la méthanisation par biodéchets

Berty Robert
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Créé par quatre associés, dont deux agriculteurs, le site de méthanisation Avallon Bio Énergie est le seul en Bourgogne-Franche-Comté à ne fonctionner qu'avec des produits alimentaires provenant de la grande distribution ou d'industries agroalimentaires.

À la découverte de la méthanisation par biodéchets
Christophe Rousseau (de dos) a expliqué aux visiteurs tout le cheminement des déchets alimentaires qui font fonctionner le méthaniseur.

« C'est passionnant, mais il faut être un peu fou pour se lancer ! » Ces propos, c'est Christophe Rousseau qui les tenait alors qu'il menait une visite du site Avallon Bio Énergie, le 21 septembre dans le cadre des Journées nationales du biogaz. Agriculteur à Dommecy-sur-Cure, dans le sud de l'Yonne, il est un des membres fondateurs de ce site de méthanisation qui fonctionne depuis mars 2023 et dont la particularité est d'être le seul en Bourgogne-Franche-Comté (BFC), à produire de l'énergie à partir de biodéchets, là où la plupart des méthanisations fonctionnent avec des effluents d'élevage ou des Cultures intermédiaires à valorisation énergétique (Cive). Avallon Bio Énergie a été créé par deux associés agriculteurs et deux partenaires financiers (la société Ter'Green, qui a construit le site et Christophe Charbonnier, transporteur routier qui alimente ses camions au gaz). En méthanisation, la complexité des processus mis en œuvre nécessite de la pédagogie et c'est tout l'intérêt de ces Journées nationales du biogaz qui offrent au grand public l'opportunité d'en découvrir les rouages. 

100 tonnes par jour

De la pédagogie, Christophe Rousseau n'en manquait pas en expliquant chaque étape de la production de gaz. 100 t de matière entrent chaque jour sur ce site : des palettes de produits alimentaires à la date de consommation dépassée, des invendus de grandes surfaces, ou des produits de l'industrie agroalimentaire qui ont subi une rupture de la chaîne du froid. 120 jours plus tard, il en ressort un digestat riche en azote, qui sert à fertiliser les champs. Mais entretemps, une mécanique précise se met en place. Il faut d'abord trier ces matières pour en retirer le plastique. Avallon Bio Énergie dispose de deux machines dédiées à cette tâche dont une, qui parvient à trier les microplastiques. « Si ce tri n'est pas bien réalisé, souligne Christophe Rousseau, on se retrouvera avec du plastique dans les champs, ce qu'on ne veut évidemment pas ». Une fois les matières triées, elles sont incorporées en méthanisation, suivant des rations bien précises et équilibrées. « C'est comme un estomac, explique Christophe Rousseau : si on se gave de chocolat, ça nous rend malade. Si le méthaniseur est trop gavé d'une certaine matière, il ne peut pas bien fonctionner ». Toutes les matières alimentaires récupérées sont amalgamées dans une « soupe » qui est chauffée à 70 ° pendant une heure, pour être sûr qu'on ne va pas répandre dans les champs de la matière contenant de la salmonelle ou d'autres virus. Il faut aussi prévoir, en plus des biodéchets, un certain taux de matière sèche (entre 7 et 9 %) à l'intérieur du digesteur : le mélange ne doit pas être trop liquide.

Un suivi très précis

Tous les 15 jours, des échantillons de toutes les cuves partent en laboratoire et en fonction des résultats des analyses, il peut être décidé de modifier, dans un sens ou dans l'autre, la composition des mélanges. « Nous devons avoir un suivi technique hyperprécis. On ne fait pas ce qu'on veut » insiste l'agriculteur. L'intérieur des méthaniseurs est chauffé à 40 °, afin de créer un milieu propice à la production d'énergie des bactéries qui dégradent les matières. Le biogaz est stocké sous quatre épaisseurs de bâches. Dans les digesteurs, la pression est très basse (0,5 millibar). Le seul moment où le gaz est mis en pression (à 15 bars) c'est lorsqu'il est introduit dans le réseau de GRDF pour alimenter la ville d'Avallon. Tout le site d'Avallon Bio Énergie est bâti en escalier, afin que, d'une étape à l'autre, on consomme le moins d'énergie possible, les déplacements de matière se faisant par gravitation. Il a représenté un investissement global de l'ordre de 10 millions d'euros. « On n'a pas le droit de s'arrêter, précise Christophe Rousseau, notre dispositif doit être fiable, parce que, financièrement, on peut aller très vite dans un sens, ou dans l'autre. On a donc une certaine pression ». Avallon Bio Énergie a contracté avec Engie pour une durée de 15 ans, avec un prix indexé sur le coût de la vie.

Deux utilisations pour le biogaz

Le biogaz est composé à 60 % de CH4 (méthane) et 40 % de CO2 (dioxyde de carbone). Le site d'Avallon peut utiliser ce biogaz de deux manières :
- de manière épurée, en séparant le CH4 du CO2, ensuite le CH4 est injecté dans le réseau de la ville d'Avallon. C'est ce qu'on appelle le biométhane.
- en cogénération : le gaz sert à faire fonctionner un gros moteur qui entraîne une turbine, cette dernière fabrique de l'électricité qui est vendue à EDF. Cela permet aussi de produire de la chaleur, avec le moteur qui tourne, qui est utilisée par exemple, pour chauffer les cuves du digesteur. Une partie du biométhane alimente également une turbine pour chauffer de l'eau à 92°, et elle produit également de l'électricité autoconsommée sur le site. Le site fabrique aussi du Bio GNV (Gaz naturel véhicule) qui peut servir de carburant pour des véhicules.