Assurance prairies
Ça change tout

AG
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David Doyer, éleveur en Côte-d'Or et président de la caisse locale Groupama de Bligny-sur-Ouche/Pouilly-en-Auxois, aborde les changements assurantiels de la nouvelle Pac.

Ça change tout
« Le dispositif des calamités agricoles n'existera plus sous sa forme actuelle. Seuls les éleveurs assurés pourront espérer une indemnisation maximale en cas de pertes de production », souligne David Doyer, à Chaudenay-la-Ville.

Le changement, c’est vraiment maintenant. Les calamités agricoles vont disparaître pour laisser place à un nouveau dispositif présenté ici par David Doyer, qui a suivi le dossier de très près à Strasbourg, de par ses implications départementales mais aussi régionales à Groupama : « Jusqu’à présent, très peu d’éleveurs assuraient leurs prairies et pour cause : le dispositif des calamités agricoles était là pour compenser les pertes de productions en cas d’aléas climatiques. L’assurance ne concernait ainsi qu’1 % des surfaces ! La donne va sérieusement changer avec la réforme de la Pac. Car dès 2023, ce fonds des calamités agricole va devenir le fonds de solidarité nationale (FNS). Avec celui-ci, en cas de pertes supérieures à 30 %, les éleveurs assurés pourront prétendre à une indemnisation pouvant atteindre 100 %. En revanche, ce ne sera pas la même chose pour ceux qui n’auront pas souscrit une assurance : ils ne pourront toucher que 45 % de la partie du FSN, qui prendra en compte jusqu’à 90 % des pertes au-dessus du seuil des 30 %. Dès 2024 et 2025, ce pourcentage de 45 % tombera respectivement à 40 puis 35 %… La mesure est donc incitative : il faut désormais s’assurer. Chez Groupama notamment, les premiers tarifs devaient tomber autour du 15 novembre : nous nous attendons à beaucoup de contractualisations durant les semaines qui arrivent. Le calcul sera basé notamment sur les besoins fourragers de l’exploitation et sur un indice de référence qui devrait être connu très prochainement. L’intérêt est de taille pour nous, éleveurs : sur les cinq dernières années, un certain nombre de Côte-d’oriens spécialisés en élevage ont déclenché à quatre reprises les calamités agricoles, c’est énorme ».

« Au bout d’un système »

David Doyer voit d’un très bon œil cette évolution : « nous étions arrivés au bout d’un système avec, en plus, un dispositif des calamités qui était très complexe et qui ne permettait jamais d’être indemnisés rapidement. En plus, un nombre parfois non négligeable d’éleveurs passait à côté des soutiens si leur part de cultures était trop élevée. Désormais, nous pouvons compter sur le soutien de l’État, prêt à mettre 680 millions d’euros annuels dans le dispositif. Les services publics ont bien compris qu’il fallait agir et nous aider pour assurer la pérennité des exploitations, devant ces aléas climatiques se faisant de plus en plus récurrents. En pratique, l’agriculteur aura toujours sa franchise. Les pertes de production seront désormais calculées à l’échelle de l’exploitation, par satellite. Jusqu’à présent, le raisonnement se faisait par grandes zones, pour ne pas dire à l’échelle d’un département. L’agriculteur traitera désormais qu’avec son assureur, qui jouera désormais le rôle de gestionnaire. Même ceux qui prendront le risque de ne pas rentrer dans la démarche devront renseigner le nom d’un assureur, nommé interlocuteur agréé. Ce sera une obligation pour tout le monde ». L’éleveur de Chaudenay-la-Ville regrette un certain défaut d’informations sur le sujet : « Groupama organise plusieurs réunions pour y remédier, le premier rendez-vous se tient d’ailleurs ce lundi 7 novembre à Créancey. Il est important de clarifier les choses avec l’ensemble des éleveurs. Ce dossier en vaut largement la peine ».

D'autres évolutions

David Doyer aborde ensuite l’assurance multirisque climatique (MRC), sujette elle aussi à de nombreux changements : « Des évolutions majeures sont actées en grandes cultures, je pense notamment à la possibilité de contractualiser une franchise minimale de 20 %. Autre point : la prise en charge de la subvention assurance récolte passe désormais à 70 %. Le fonds de solidarité nationale interviendra à partir de 50 % de pertes sur les cultures et en viticulture, alors qu’aucun de ces secteurs n’avait pu bénéficier de quoi que ce soit depuis 2010 ! En grandes cultures MRC, les différences entre un assuré et un non-assuré seront les mêmes que dans le dispositif prairies. Un agriculteur assuré pourra ainsi déclencher une perte à partir de 20 %, jusqu’à 100 %. Un non-assuré ne pourra déclencher qu’à partir de 50 % de pertes, jusqu’à 90 %, mais seulement 45 % de cette perte sera prise en charge. La dégressivité s’appliquera les années suivantes : 40 % en 2024 puis 35 % en 2025. Toutes les cartes de l’assurance climatique sont donc rebattues. La notion de spécialisation n’existera plus pour activer ce nouveau mécanisme. Chaque hectare assuré est susceptible de bénéficier du FSN. Un non-assuré ne pourra bénéficier que partiellement de ce fonds. En conclusion, cette réforme est ambitieuse et vise à assurer le plus grand nombre de surfaces pour la ferme France, en rendant cette assurance récolte incitative. Groupama, créateur de cette assurance MRC, est un acteur majeur de l’assurance climatique en France puisqu’il représente plus de 50 % des surfaces assurées. Groupama souhaite conserver ce leadership, tous les moyens humains et techniques seront mis en œuvre pour assurer cette mutation de la réforme de la gestion des risques dans les meilleures conditions pour nos sociétaires ou futurs sociétaires ».