Accès au contenu
Coopérative Cerepy

Une fusion qui fait débat

La coopérative qui fête cette année ses 25 ans est à un tournant de son histoire, mais le projet de fusion avec Capserval ne fait pas l’unanimité au sein du Conseil d’administration et les débats ont été parfois houleux, lors de l’Assemblée générale du 11 décembre dernier.
Par Dominique Bernerd
Une fusion qui fait débat
Etaient présents, les représentants des autres coopératives céréalières du département, parmi lesquels, Etienne Henriot et Jean-Luc Billard, président et directeur de Capserval.
Même si le projet de fusion était dans tous les esprits, la tradition a été respectée et l’assemblée générale de Cerepy a débuté par un rappel du bilan de la collecte 2014. Un exercice marqué par des volumes en hausse de 11 %, à 164 504 tonnes, par rapport à la moyenne des 10 dernières années, mais surtout, par un phénomène de germination inédit, avec pour effet le déclassement de la quasi totalité des blés en fourrager. La catastrophe a été évitée de peu, rappelle son directeur, Germain Bour : «nous étions dans l’épicentre du phénomène et notre coopérative la plus touchée en France, avec un temps de chute moyen d’indice Hagberg de 84 secondes sur 93 % de la collecte» il aura fallu revoir en un temps record tout le plan de stockage, la communication, le flux logistique et la gestion administrative des livraisons : «8 000 tonnes de blé ont été passés à la table densimétrique de janvier à juin 2015 et nous avons réussi à en valoriser 6 000 tonnes au prix de la meunerie». Mais certains débouchés historiques en blés panifiables n’ont pu être honorés et la coopérative de Saint-Julien-du-Sault a du résilier des contrats de vente et trouver de nouveaux débouchés en blé fourrager. Au final, avec 71 627 tonnes, la collecte est légèrement inférieure à 2013 (-1,5 %), avec une moyenne de rendement se situant à 72 q/ha, supérieure à la moyenne quinquennale, mais présentant de fortes disparités (de 40 à 105 q/ha).

Rendements en forte hausse pour les orges d’hiver, pénalisés néanmoins par une saturation du marché. Les orges de printemps, touchés eux aussi par la germination, connaissent des rendements très hétérogènes (de 25 à 85 q/ha) et une qualité médiocre (protéines élevées, grains germés et fusariés). Une très bonne année pour le colza, avec une collecte s’élevant à 23 713 t, en hausse de 41 % par rapport à l’année précédente et une moyenne de rendements à 40 q/ha. Même scénario pour les maïs, avec une récolte historique à 12 545 t et un rendement moyen record à 108 q/ha. Nouvelle déception en revanche, pour la 2e année consécutive, en tournesols, avec une moyenne de rendement à 26 q/ha. L’avoine nue pour sa part, continue sa montée en puissance, rappelle Germain Bour : «c’est un peu notre culture locomotive parmi nos cultures de diversification, avec 5 500 tonnes collectées, un rendement moyen de 45 q/ha et l’une des meilleures marges brutes». La coopérative Cerepy revendiquant «la 1ère place de producteur d’avoine nue en France».

Chiffre d’affaires en hausse de 3,12 %
Sur le plan de la commercialisation, grande amplitude des prix du blé au cours de l’exercice 2014/2015, avec un delta de 150 à 210 € de la tonne, fluctuant au rythme d’évènements climatiques, géopolitiques ou financiers. La baisse de l’euro, passé de 1,40 $ à 1,05 $ en l’espace de 10 mois apportant néanmoins un soutien aux exportations. Année atypique également en ce qui concerne le transport des céréales, avec une prédominance du fret fluvial(49 %) et des camions (44%), au détriment du ferroviaire (7%), conséquence de la déclassification des blés.

Sur le plan agronomique, ce petit rappel de Jean-Noël Herrgott, à l’heure de la COP 21 : «la dérive climatique est observée depuis plusieurs décennies. Les 25 dernières années sont régulièrement plus chaudes que les 90 années précédentes et les extrêmes deviennent à la fois plus extrêmes et plus fréquents. A propos du réchauffement climatique lié à l’effet de serre, nous avançons en territoire inconnu et la machine s’emballe à un rythme effrayant. Pour preuve : nous gagnons sur blé 1 jour de précocité au stade épi 1 cm, tous les 3 à 5 ans, à dates de semis égales. L’épiaison des blés ayant lieu 8 à 10 jours plus tôt qu’il y a 20 ans».
L’exercice se traduit financièrement par un chiffre d’affaires en hausse d’un peu plus 3%, à 49 670 842 €. Les ventes de céréales progressent de 8,3%, à près de 31 M€. L’activité approvisionnements, conséquence de la mauvaise récolte 2014, est pour sa part en régression de 5,9%, à 13,9 M€.

4 administrateurs élus pour 6 postes à pourvoir
«Nous avons l’opportunité de nous construire un avenir meilleur. Il suffit de le vouloir. L’avenir appartient aux audacieux, alors, ayons de l’audace !» Le président Laurent Poncet a dans son intervention, rappelé l’enjeu pour Cerepy : «nous avons aujourd’hui la possibilité de structurer notre territoire en gardant le centre décisionnaire dans notre département, d’optimiser nos moyens, nos flux logistiques et notre exploitation, d’optimiser aussi et renforcer nos compétences. De nouveaux leviers s’offrent à nous pour construire notre avenir». Au préalable, la question suivante avait été soumise au vote des administrateurs réunis en Conseil le 25 novembre dernier : «après analyse et discussion sur les intérêts de la fusion en co-construction de Cerepy et Capserval, approuvez-vous l’engagement de Cerepy dans le processus visant cette fusion ?» Un vote à bulletin secret, qui s’est conclu positivement, grâce à la voix prépondérante du président (elle compte double), comme le prévoient les statuts de la coopérative et le Code Rural, les 18 membres du Conseil s’étant partagés à égalité parfaite entre partisans et adversaires de la fusion. Un clivage qui s’est poursuivi dans les rangs de l’AG, au fil des interventions, à l’image de celle de Philippe Vié, Vice-Président de la coopérative : «je suis favorable dans un premier temps  à la création d’une union, plutôt qu’une fusion brutale. Les fiançailles avant le mariage, ça a du bon !» Se refusant à accepter le principe de la «double voix» du président : «un vote de droit c’est vrai, mais l’Assemblée peut-elle accepter que dans une décision si hautement stratégique, la voix d’un seul homme, fut-il président, engage l’avenir de toute la coopérative ?» Parmi les 6 administrateurs en lice pour le renouvellement de leur mandat, Marc Gaillot, du Gaec du Mont Régnier, avec un message ayant pour mérite celui de la clarté : «si vous votez pour moi, on fera la fusion, si vous ne votez pas pour moi, on ne fera pas la fusion !» Au total 11 candidats se sont présentés, pour 6 postes à pourvoir. Le dépouillement a été long et c’est seulement à l’heure du cocktail, qu’ont été promulgués les résultats. Sur 335 votants, 10 bulletins nuls et 325 exprimés. Ont été élus : Franck Bory (206 voix), Yves Erfort (210 voix), Marc Gaillot (198 voix) et Patrice Macaire (174 voix). Un vote qui, compte tenu des déclarations des uns et des autres, fait bouger un peu plus le curseur du côté de la fusion. Dans les prochains jours se tiendra un Conseil électif, avec pour Laurent Poncet, un nouveau challenge, celui de conserver la présidence de la coopérative.