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Syndicat Betteravier Yonne

Une fin des quotas qui soulève des interrogations

Réunis en Assemblée générale, les betteraviers de l’Yonne s’interrogent sur l’après quota, après une récolte 2015 marquée par des rendements à la baisse et une diminution de la durée de campagne.
Par Dominique Bernerd
Une fin des quotas qui soulève des interrogations
De gauche à droite : Emmanuel Pigeon, Directeur régional des Syndicats betteraviers Yonne, Aube, Nord-Est et Aisne, Eric Lainé, Président de la CGB, Didier Renoux, Président du Syndicat Betteravier de l’Yonne.
La campagne betteravière 2015 s’est soldée dans le département par un rendement moyen à l’ha ne dépassant pas 62 tonnes, avec une richesse de 18,5 (soit un rendement à 16 de 74 t). Un résultat en diminution de 20 tonnes par rapport à l’année précédente et de 13,4 t sur la moyenne quinquennale, qu’accompagne une grande hétérogénéité, avec des écarts pouvant aller, selon les parcelles, de 45 t à 110 t/ha. Dans le même temps, on note une diminution de la durée de campagne, en retrait de 3 jours pour l’usine de Corbeilles et de 4 jours pour celle de Souppes. Un constat encore plus marqué dans les usines de Champagne, avec 26 jours de moins pour Connantre et 20 jours pour Arcis. Conséquence de la baisse des rendements, mais aussi d’une diminution de 5 % des emblavements.
La campagne avait pourtant démarré sous les meilleurs auspices, avec des semis réalisés précocement et dans de très bonnes conditions, mais après un printemps favorable, le mois de juin aura été marqué par un déficit d’ensoleillement, suivi d’un été particulièrement sec. Seule note positive : des conditions d’arrachage exceptionnelles, avec très peu de pluie, ce qui a eu pour effet de diminuer la tare déchet à 8,2%. Des conditions météorologiques exceptionnelles, qui ont également permis à la betterave de connaître une progression constante et une bonne stabilité de la richesse et dans une moindre mesure, un développement des racines. L’année 2015 aura également été la seconde année à voir généralisée le forfait collet dans les usines (à l’exception de Souppes et Nangis). Un système qui donne satisfaction dans son ensemble, ne laissant que peu de place aux réclamations, mais le Syndicat Betteravier de l’Yonne a néanmoins constaté que 20 à 25% des betteraves sont surscalpées de 20 à 25% au delà de l’objectif théorique recherché dans la forfaitisation. Une anomalie qui pourrait se résorber à l’avenir, en affinant certains réglages de machines, afin d’éviter une perte directe de rendement et de matière première non travaillée dans les usines.

De nouveaux débouchés mais une concurrence plus rude
L’actualité betteravière, dans l’Yonne comme ailleurs, est bien sur marquée par la fin annoncée des quotas et du prix minimum, comme l’a rappelé le président du syndicat, Didier Renoux : «en reprenant les rapports des AG précédentes, je me suis aperçu qu’on avait souvent l’habitude de dire que l’année était exceptionnelle ! Alors cette année, je ne sais pas quel adjectif je pourrai utiliser pour décrire avec justesse ce que notre filière est en train de vivre». Un bouleversement qui, s’il offre certaines opportunités, comme l’ouverture sur plus de marchés, n’est pas sans lever nombre d’interrogations et d’incertitudes, notamment au regard de la concurrence entre opérateurs commerciaux : «chaque maillon, des planteurs aux fabricants, en passant par le Syndicalisme Betteravier, va devoir évoluer, se réinventer». D’où l’importance, a rappelé Didier Renoux, de respecter et conserver certains fondamentaux : «c’est bien l’organisation betteravière, avec au centre la CGB et l’interprofession, qui a permis la réussite de notre filière. Et dans le mot filière, j’intègre la partie betteravière, mais aussi la partie industrielle. Toutes deux ne réussiront rien sans cohésion, respect mutuel et intérêt général, avec le Syndicalisme betteravier comme cheville ouvrière. On ne construit rien sans respect de cet équilibre». Réclamant de fait des garanties durables, via des accords interprofessionnels débouchant sur des prix en lien direct avec la valorisation des produits finis sur les différents marchés et une plus grande transparence en matière de rémunération et de partage de la valeur ajoutée. La fin des quotas représente un tournant historique pour l’ensemble de l’économie sucrière, avec pour conséquence directe une augmentation de la production, mais aussi une diminution des débouchés au sein de la zone euro et une baisse des prix due au déséquilibre entre l’offre et la demande. D’autant que la concurrence sera rude entre tous les acteurs et le contexte difficile, du fait de cette volatilité plus forte des prix.

Un travail d’expertise à l’international
L’Assemblé générale 2016 avait pour thème cette année : «le Syndicalisme Betteravier au service des planteurs, aujourd’hui et demain». Avec pour principaux leviers mis en œuvre : le coût de production de la betterave, la quantité livrée et le prix payé. Un travail a été mené depuis plusieurs années par la Confédération Générale des Planteurs de Betteraves, à l’échelle de tout le bassin betteravier, sur les charges constituant le coût de production : semences, intrants, mécanisation, fuel, main d’œuvre, frais de structure, mais aussi les charges MSA, trop souvent «omises dans les analyses réalisées» rappelle son président, Eric lainé, pour qui le chiffre annoncé de 25,5 €/t de coût de production moyen doit rester une référence absolue : «ce montant est un phare au milieu de l’économie betteravière et plus personne n’ose parler de prix en dessous de 25 €, un prix qui se raisonne bien sur à nos yeux, hors pulpe». Plusieurs postes à optimiser pour améliorer la compétitivité des planteurs : le choix des variétés, la densité des semis, la gestion de l’azote et des engrais, ou encore, la charge des mécanisations. Alain Jeanroy, directeur de la CGB insiste sur ce point : «il faut se poser les bonnes questions car pour certains, 10 % du coût de production sont en jeu. En France, le travail en commun n’est pas assez généralisé, contrairement à ce qui se passe dans les autres pays européens». Autre élément important pour garantir au planteur un revenu : le tonnage de betteraves livré, avec cette spécificité propre à la filière, qui est le contrôle des réceptions. Une étape reposant sur un référentiel interprofessionnel comprenant 75 points de vérification, dans laquelle la CGB est là aussi partie prenante. Garantissant une «vraie assurance volume» et la «garantie d’un travail bien fait dans les achats».
Troisième élément de l’équation : les prix. Avec notamment l’analyse et le suivi effectués chaque semaine par la CGB sur les 4 marchés impactant directement le planteur : le sucre sur le marché européen, le marché mondial, l’éthanol et la pulpe. Au-delà de ces études de suivi de marché, est mené un travail d’expertise à l’international, au travers de l’engagement de la CGB au sein de l’Association mondiale des planteurs de betteraves et de canne à sucre. Un organisme regroupant 33 associations de 30 pays, dont elle assure aussi le secrétariat, qui favorise les rapprochements, permettant ainsi de mieux connaître la concurrence mondiale tout en collectant au passage des idées fonctionnant ailleurs.

Chiffres clés de la récolte 2015

90 planteurs
1 500 ha de surfaces betteravières
Rendement/ha : 62 t de racines à 18,3 de richesse, soit 73 t à 16°
109 000 tonnes de betteraves produites
11,3 tonnes de sucre blanc/ha