Accès au contenu
Portrait d

Un parcours forgé par la passion du vin

Le vignoble auxerrois n’a pas été épargné par le gel. Parmi les viticulteurs touchés, Edouard Lepesme, jeune vigneron installé hors cadre, à Vaux, depuis deux ans.
Par Dominique Bernerd
Un parcours forgé  par la passion du vin
Une passion du vin qui a conduit l’ancien commercial à se forger un nouvel avenir professionnel
Les coteaux surplombant la vallée de l’Yonne, de l’autre côte de la rivière, dessinent un panorama au format cinémascope dont Edouard Lepesme ne se lasse pas : «c’est quand même sympa de bosser là ! Le lieu est juste superbe…» Mais pour l’heure, son regard se limite aux bourgeons et premières feuilles victimes des gelées noires ayant touché le vignoble de l’auxerrois, en même temps que celui du chablisien. On est ici aux portes d’Auxerre et la ville se profile à l’horizon. Un parterre mosaïque rythmé par les vignes, les cerisiers et les parcelles de céréales ou colzas. «La première inconnue est de savoir comment les bourgeons vont repartir et s’ils vont bien réagir. Il y a des endroits, notamment en chardonnay, je sais déjà que tout est grillé»

Commercial dans un Domaine champenois, Edouard Lepesme s’est pris de passion pour le vin et en 2011, a entamé une formation à Beaune pour devenir viticulteur. Multipliant ensuite pendant trois ans, les expériences, que ce soit dans le chablisien, en Côte de Nuits ou en Nouvelle-Zélande. Avant de racheter en 2014, un vignoble planté dans les années 60, sur les coteaux de Vaux-Auxerre. Un domaine de 14 ha, conduit depuis une quinzaine d’années en viticulture biologique, où le jeune vigneron commence à apporter sa touche personnelle : «au moins, continuer sur le plan agronomique tout le travail fait par mon prédécesseur et commencer cette année, à travailler certains plants en phytothérapie, après avoir depuis l’an passé, remis en route des vendanges manuelles et retravaillé avec des fûts»

Installé depuis deux ans
Pas facile, après seulement deux années d’installation, de subir un coup de gel comme celui là : «je fais une moyenne de 40 à 45 hl à l’année par ha, si je perds 5 hl, je suis encore dans ma fourchette de viabilité et pense pouvoir tenir le coup, mais si ça devait se renouveler, c’est sûr que ce serait beaucoup plus difficile…» Même s’il a eu la sagesse de contracter une assurance récolte à son installation, faute de stocks suffisant pour pallier les coups durs, l’avenir pourrait s’en trouver assombri : «ma production annuelle s’établit à près de 550 hl, commercialisés essentiellement auprès de négociants mais je souhaiterais à terme développer la vente aux particuliers. En 2014, pour le premier millésime, j’ai commencé avec 8 000 bouteilles, 15 000 l’an passé et il y a encore un mois, j’avais la volonté de passer à plus de 25 000 bouteilles, mais il est vrai que les évènements ont un peu tout remis en cause». Les premiers retours sur ses vins sont encourageants et le portefeuille clients s’étoffe progressivement, mais le fait de s’installer hors cadre est loin d’être atout : «même si j’ai été bien accueilli par mes collègues vignerons, le premier stress est de savoir si l’on va réussir à maîtriser la plante et l’amener à produire des raisins qualitatifs pour la récolte. Après, au moment de vinifier, on ne peut qu’espérer que ça plaise, faute d’avoir l’historique et les repères pour à la fois se rassurer dans ses choix et se dire que tout va bien…»
Ses atouts, Edouard les place aussi dans ce lieu choisi, ouvrant les portes du sud-auxerrois : «j’a découvert l’histoire viticole d’Auxerre, une histoire fabuleuse, avec des vignes implantées par les Romains, cultivées ensuite par l’Eglise. La rivière, comme vecteur de commerce pour le vin, la pierre, le bois, qui s’achevait aux quais de Bercy. A mon avis une voie de développement sans pareil pour l’œnotourisme, à l’heure où l’on est un peu à la recherche d’un second souffle en matière économique, dans le secteur» Avant de voir édifiée sur les quais à Auxerre, la maison du vignoble qu’il appelle de ses vœux, le jeune Auxerrois d’adoption souhaiterait pour le moins qu’un panneau soit installé au dessus du village, sur l’ancienne voie romaine, aujourd’hui dévolue aux véhicules : «pour rappeler aux automobilistes, le patrimoine viticole existant à leurs pieds, que certains ne soupçonnent même pas» Une histoire qui s’est écrite au fil des siècles et à laquelle Edouard Lepesme espère bien rajouter quelques pages…