Quand les pigeons et les corbeaux passent à table…
Exploitant céréalier à Soucy, aux portes de Sens, Thierry Michon voit ses parcelles régulièrement envahies par des colonies de corbeaux et de pigeons ramiers, avec à la clé des dégâts culturaux récurrents

Pour Thierry Michon, les années se suivent et se ressemblent… Comme chaque années à pareille époque, les tristes volatiles sont de retour dans ses cultures de tournesols et colzas. La table semble bonne pour ces convives indésirables à l’appétit insatiable, «ils sont arrivés à la fin du mois d’août et j’ai compté dans mes tournesols jusqu’à 200 pigeons et une centaine de corbeaux, sans parler des tourterelles… ! Depuis quelques jours, ce sont les colzas qui sont à leur tour touchés. Sans oublier les semis de blés dévastés pendant l’hiver» Dans la région, le problème est récurrent et explique en partie le fait que de moins en moins d’agriculteurs plantent des tournesols. Thierry Michon a jusque là été patient, mais sa décision est prise : «près de 30 ans que j’en faisais, mais depuis une quinzaine d’années, le problème n’a fait qu’empirer et j’ai décidé d’arrêter. C’est dommage parce qu’en terme d’intrants, la plante ne demande que 40 unités d’azote là où l’on est entre 150 et 200 unités pour le blé, l’orge et le colza… Et puis c’est aussi une niche bien adaptée à la faune». Une première colonie avait déjà envahi les champs au printemps: «j’avais été obligé alors, de ressemer 5 à 6 ha, à cause des pigeons…» L’agriculteur de Soucy voit dans la proximité de l’agglomération sénonaise l’une des explications du phénomène: «nous ne sommes qu’à 10 km de Sens et ils semblent suivre un couloir pour arriver directement jusqu’ici. Par ailleurs, les oiseaux semblent ne plus émigrer comme autrefois, peut-être la conséquence du changement climatique… ?»
Un mail en attente de réponse
Le problème n’est pas que financier, il est aussi chronophage : «en période ressemis, je suis dans l’obligation d’aller plusieurs fois par jour dans mes parcelles jouer de l’effaroucheur et ce, dès 6h30 du matin, jusqu’à parfois 22 h ! La proximité des maisons du village rendant l’opération parfois délicate, compte tenu des nuisances sonores…» Elu Chambre au sein de différentes commissions dégâts gibiers auprès de la DDT et de la Fédération des chasseurs, Thierry Michon insiste sur l’importance à bien quantifier les dégâts lorsqu’ils se présentent, de sorte «que les services de l’administration soient dans l’obligation de maintenir certaines espèces comme nuisibles…» Dès l’apparition des corbeaux dans ses tournesols, l’exploitant avait alerté par mail les services de l’Etat, leur demandant notamment «d’avoir la possibilité d’intervenir ou de faire intervenir pour en diminuer la quantité en me donnant une autorisation de tir…» Envoyé lundi 1er septembre, le mail n’avait au jour de l’interview, (ndlr : vendredi 5 septembre), toujours pas reçu de réponse et Thierry Michon s’en émeut : «la DDT m’avait pourtant assuré qu’ils seraient désormais plus réactifs… Si c’est pour qu’ils me répondent deux jours avant l’ouverture de la chasse, ça ne sert à rien !» Avec l’honnêteté de langage qui le caractérise, Thierry reconnaît que la présence des oiseaux a aujourd’hui fortement diminué, du fait de la mise en place de «pétards à corbeaux», mais il n’est pas dupe : «je suis passé et repassé à multiples reprises avec le pistolet à fusées, ce qui les a fait fuir, mais sans doute pas plus loin que les terres d’un voisin… !»