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Olivier Dauger, élu FNSEA en charge des questions climatiques et énergétiques

« Produire plus et mieux avec moins pour répondre aux défis posés par le changement climatique »

Un rapport du Giec, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, commandé lors de la COP21, alerte sur les conséquences d’une élévation des températures de 2 °C et les compare à une élévation de 1,5°C. Limiter le réchauffement à 1,5°C devrait permettre de limiter les effets néfastes. Les auteurs proposent donc des pistes pour atteindre cet objectif. Pour Olivier Dauger, élu FNSEA en charge des questions climatiques et énergétique, si l’agriculture participe au réchauffement climatique et en est une victime, elle est avant tout source de solutions.
Par Ma signature
« Produire plus et mieux avec moins pour répondre aux défis posés par le changement climatique »
( Crédit photo : Actuagri ) Olivier Dauger est en charge des questions climatiques et énergétique au sein de la FNSEA
- Quels enseignements tirez-vous du rapport publié par le GIEC le 8 octobre ?
Olivier Dauger : « Les conclusions de ce rapport, sont une demi-surprise. Elles ne font que confirmer les anciens rapports. Le rapport met tout de même en avant la rapidité de l’évènement. Il y un dérèglement climatique et un réchauffement climatique qui sont clairs. On pensait que le réchauffement climatique se déroulait sur un laps de temps plus long, entre 50 ans et un siècle, mais il semblerait qu’il soit plus rapide que prévu. L’objectif affiché de ce rapport est de limiter l’augmentation des températures à 1,5°C afin d’en limiter les effets sur la biodiversité, l’augmentation du niveau des océans… car ils seraient exponentiels au-delà de cette température. Si on dépasse cette augmentation de nombreuses vies humaines et la biodiversité seraient en danger. La machine semble s’accélérer, il est donc grand temps que les pays adoptent les accords de Paris signés lors de la COP21. Ce rapport, s’il met en avant des faits réels, a aussi comme objectif d’être un effet d’annonce, afin de pousser les politiques à appliquer ce qu’ils ont signés. Il a pour objectif de faire réagir les gouvernements. Ils doivent réfléchir à des solutions et les mettre en place rapidement ».

- Comment l’agriculture est-elle victime du changement climatique ?
O.D : « L’agriculture est avant tout victime, car elle subit depuis quelques années des épisodes climatiques extrêmes. En France il ne se passe plus une année sans avoir des dégâts dus au gel, aux excès d’eau, au déficit de précipitation… Cette année nous avons commencé l’année avec trop d’eau et là nous subissons une sécheresse que certains jugent sans précédent. Ces évènements impactent les rendements et la qualité des productions. Au niveau mondial la production agricole a tendance à baisser avec une irrégularité forte des rendements ».

- En quoi l’agriculture est source de solution pour limiter le réchauffement climatique ?
O.D : « Avant tout je tiens à préciser que l’agriculture en est aussi une cause, comme toute activité humaine, car elle est responsable de 15 à 20 % des émissions de gaz à effet de serre (GES). Mais elle est surtout source de solutions. Elle peut participer à la transition énergétique en fournissant de l’énergie verte via la photosynthèse. De plus, elle peut permettre de stocker le carbone dans les sols, en particulier dans les zones boisées, les pâtures mais aussi les terres cultivées. Pour renforcer le stockage il faut augmenter la matière organique présente dans les sols en mettant plus de couverts végétaux, en limitant le travail des sols et en produisant plus de biomasse. Elle est donc un outil pour obtenir la neutralité carbone à moyen terme, pendant que le reste de l’économie se décarbone. Comme elle est émettrice de GES elle peut aussi réduire ses émissions en diminuant sa consommation d’énergie, en isolant mieux, en diminuant le recours à la motorisation et en autoconsommant de l’énergie. 40 % de ses émissions sont imputables à l’élevage notamment bovin, il faut donc mettre en place des systèmes qui permettent d’émettre moins, notamment en changeant l’alimentation des animaux. L’épandage des engrais organiques et minéraux est responsable de 40 % des GES émit par le monde agricole. Nous travaillons donc pour produire des engrais moins émetteurs et moins volatils. Notre objectif est de produire plus avec moins, afin de limiter notre impact sur le réchauffement climatique. À la FNSEA nous pensons qu’il faut que l’agriculture soit plus résiliente pour produire mieux en répondant aux enjeux climatiques et en garantissant la sécurité alimentaire ».

L’agriculture en première ligne face au réchauffement climatique

Une hausse de 1,5°C de la température de la planète aura des conséquences en chaîne sur la production agricole, prévient le GIEC dans un rapport publié le 8 octobre. En Europe, les agriculteurs du bassin méditerranéen manqueront d’eau : le groupe d’experts prévoit que, dans cette région, les périodes sèches dureront en moyenne 5 mois par an, contre trois mois aujourd’hui. Les précipitations pourraient quant à elle diminuer de 10%. Au delà de 2°C de réchauffement, un «effet de seuil» pourrait être franchi en matière d’extrêmes climatiques. Grêles, inondations, sécheresses, orages : «ces événements rares deviendront la norme», prévient Joël Guiot, paléoclimatologue au CNRS, qui a contribué au rapport. Au rythme actuel, une hausse de 1,5°C par rapport à la période préindustrielle sera atteinte en 2040, soit 60 ans avant l’horizon 2100 fixé par l’Accord de Paris.

Le GIEC préconise le stockage du carbone dans les sols
Dans son sixième rapport d’évaluation publié le 8 octobre, le GIEC préconise de développer les techniques de stockage du carbone dans les sols afin de diminuer l’impact des émissions de CO2 sur le climat. Un rôle dévolu, entre autres, à l’agriculture, à condition de «supprimer les engrais chimiques» qui ne «permettent pas ce stockage», remarque Joël Guiot, paléo-climatologue au CNRS, qui a participé à la rédaction du rapport. Ces techniques doivent cependant «s’améliorer pour trouver des moyens d’empêcher totalement que le carbone ne se libère plus tard», complète-t-il. Une reforestation massive est également préconisée par le GIEC, les forêts étant, elles aussi, des puits à carbone efficaces.