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AG de la caisse régionale du Crédit Agricole Centre Loire

Michel Godet veut rendre la confiance aux entreprises et aux territoires

économiste et professeur au Conservatoire national des Arts et Métiers (Cnam), chroniqueur récurrent à l’émission «C dans l’air» sur France 5 et auteur d’un récent ouvrage, «Libérez l’emploi pour sauver les retraites», Michel Godet était l’invité-vedette de l’assemblée générale du Crédit Agricole Centre Loire, le 26 mars, à la Maison de la culture de Nevers. Décalé et détonnant.
Par Propos recueillis par Emmanuel Coulombeix
Bien connu pour ses conférences et ses interventions médiatiques, Michel Godet n’a pas la langue dans sa poche et n’hésiter pas à se montrer provocant. S’il est venu à Nevers pour parler de redonner [I]«confiance aux entreprises et aux territoires»[i], c’est que sa réflexion l’amène à un certain nombre de constats sur la France. Premier d’entre eux, [I]«la France d’en bas va plutôt mieux, voire bien, si celle d’en haut lui laissait la paix»[i]. Intervenant entre les deux tours d’élections municipales aux résultats immanquablement [I]«nationalisés»[i], le professeur du Cnam n’y va pas avec le dos de la cuiller: [I]«Les élites vont très mal. Ceux qui nous gouvernent se servent avant de servir et ils brillent souvent par leur incompétence»[i]. Le décor est planté, tranchant et appelant des développements. [I]«Les problèmes financiers internationaux ne doivent pas masquer que, globalement, nous vivons dans un monde de rêve pour lequel nous avons fini par ne plus nous émerveiller par rapport à la vision des jeunes de 1968: les niveaux de vie ont augmenté de 50%, le mur de Berlin s’est effondré, les Démocraties se sont diffusées partout... »[i]

[INTER]Pour des politiques «business friendly»[inter]
Autre constat: [I]«il y a de grandes différences entre les pays, entre les territoires, et à l’intérieur de chacun d’entre eux... En Suisse, le chômage est de 4% grâce à l’alternance et l’apprentissage. Au Pays de Vitré (35), en Bretagne, il y a 6% de chômeurs. Ce qui fait la différence, ce sont les hommes. Les politiques qui y œuvrent sont là depuis longtemps et sont «business friendly» (ndlr: ils ont l’esprit entrepreneurial). Le taux des taxes sur les entreprises y sont parmi les plus faibles. Et le don du sang y est parmi les plus dynamiques, ce qui relève d’un sens aigü du collectif»[i]. Peu importe que les territoires n’aient pas tous les atouts [I]«la Vendée non plus n’a pas le TGV et pourtant...»[i], l’essentiel est de ne pas tomber dans le syndrôme [I]«Vendomite»[i] (ndlr: du nom de Vendôme, la sous-préfecture du Loir-et-Cher dont il est originaire), c’est-à-dire [I]«cette incapacité à se prendre en charge par soi-même»[i]. Et Michel Godet avance ses options: [I]«Je suis contre le RSA, qui favorise l’assistanat et pas le retour à l’activité, de même que les indemnisations du chômage qui ne doivent pas être trop longues et je suis pour un Smic territorialisé»[i], c’est-à-dire adapté aux réalités de terrain. Au passage, le professeur égratigne les syndicats, dont la représentativité lui semble douteuse et qui se conduisent [I]«comme une noblesse d’état»[i]. [I]«Je suis pour les Bonnets rouges, il faut faire sauter tous ces gens-là avec des fourches»[i] assène-t-il, un brin provocateur. [I]«Nous avons 95% de dette publique et nous maintenons notre train de vie en piochant dans les poches de nos enfants. J’espère que la notation de la France va de nouveau être déclassée»[i]...
[INTER]«Agriculture: I.N.N.O.V.E.R»![inter]
Et, pour ce qui est de rendre confiance aux territoires, il en va de l’agriculture comme des entreprises, selon Michel Godet: [I]«il faut innover, sinon on meurt! Il ne suffit pas de répondre aux besoins des consommateurs, il faut offrir des produits nouveaux, par exemple des légumes nains, tels que ceux que j’ai visité la semaine dernière»[i] avance l’économiste. Informé de la grande manifestation du 9 avril prochain à Nevers, Michel Godet fait encore un constat, froid et définitif: [I]«les éleveurs sont les grands oubliés du système! Ce métier est un sacerdoce, on l’exerce par passion mais cela ne permet pas d’en vivre. C’est pourtant de la présence humaine sur les territoires et ce n’est pas dans les villes que l’on peut absorber sans fin tous les actifs... ou inactifs! S’il n’y a plus de paysans, il n’y a plus de territoires donc plus de paysages alors que la France est la première destination touristique du monde. Quel paradoxe!»[i] Et de se lancer dans un plaidoyer viril: [I]«il faut aider les agriculteurs, que, personnellement, je préfère appeler les écoculteurs! Pas les gros mais les petits. Les aides doivent être moins un soutien à la production que la compensation d’une présence humaine sur les territoires. Economiquement, 1 Canadair, c’est 30 000 moutons. Moi, je préfère les 30 000 moutons !»[i]