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Cultures de printemps

Lutter contre les dégâts d’oiseaux

Maïs, tournesol et pois ont remplacé les colzas dans les parcelles cette année. Une augmentation de la sole qui remet en premier plan la lutte contre les oiseaux, pouvant occasionner de lourds dégâts aux stades semis-levée.
Par Orianne Mouton
Lutter contre les dégâts d’oiseaux
Les pigeons ramiers sont très friands des cotylédons des tournesols.
En 2019, contrairement à d’habitude, la campagne icaunaise n’a pas vu ses champs jaunir quand est venu le printemps. La sole en tournesol et maïs, notamment, a explosé à cause des problématiques de sécheresse empêchant le semis et la levée du colza dans de bonnes conditions. Mais voilà, les deux cultures alternatives au colza sont à peine semées ou pointent tout juste le bout de leurs cotylédons que les voilà identifiés comme buffet libre-service par les pigeons ramiers, corneilles noires et corbeaux freux. D’autant plus que le retour du froid ralentit la pousse des plantes et laisse une fenêtre d’appétence plus grande pour les ravageurs à plumes.

Des oiseaux friands de semences et jeunes pousses
Côté maïs, c’est la corneille noire et le corbeau freux qui sont les plus à craindre, ils sévissent du semis jusqu’au stade 4-5 feuilles. Aussi précis que le semoir, ces oiseaux peuvent causer des dégâts très importants, voire conduire à un resemis. Côté tournesol, c’est le pigeon ramier qui fait le plus de dégâts dans les cultures, à la phase semis-levée. Si les oiseaux occasionnent des dégâts sur la tige des jeunes pousses, la plante ne poussera pas, si les cotylédons sont abîmés, elle a de grandes chances de pouvoir pousser quand même. La pression des oiseaux est bien plus forte dans les parcelles isolées que dans les zones où de nombreux céréaliers ont semé en même temps.

Beaucoup de bruit pour pas grand-chose
Il existe différents systèmes de défense contre les oiseaux ravageurs, sans qu’aucun ne s’avère vraiment infaillible. Les traitements sur levée ne font pas vraiment leurs preuves, les effaroucheurs visuels comme les épouvantails ou les cerfs-volants en forme de rapace ne sont efficaces que sur une petite surface. Les effaroucheurs sonores eux, fonctionnent pour des parcelles plus grandes. Le problème perdure pour tous les effaroucheurs : pour les dispositifs visuels comme sonores, les oiseaux s’y habituent très rapidement et ils deviennent vite sans effet si on ne les déplace pas régulièrement. «Le mieux est de combiner les techniques pour avoir la meilleure efficacité possible» explique Marie-Agnès Loiseau, responsable Grandes cultures à la Chambre d’agriculture. Pour pousser la protection, des demandes d’autorisation de tirs de «destruction» peuvent être adressées à la DDT. Cela permet de limiter les populations d’oiseaux causant de graves dommages dans les parcelles.

Autour des villes et de la vallée de l’Yonne : la culture du tournesol a été abandonnée

Franck Pouillot est céréalier à Quenne, en périphérie d’Auxerre. «Il y a d’énormes soucis d’oiseaux dans la zone autour d’Auxerre et de la vallée de l’Yonne. Tous les pigeons et corbeaux de la ville viennent chercher à manger ici… C’est pour ça que plus personne ne fait de tournesol dans le coin, ce qui est vraiment dommage parce que c’est une plante qui pourrait être un vrai atout dans la rotation pour préserver la qualité de l’eau en zone de captage. Mais voilà, quand il y a des problèmes de fientes chez les particuliers, la municipalité agit rapidement sur les populations d’oiseaux. Mais quand ce sont les agriculteurs qui encouragent les responsables à s’occuper des très nombreuses corbetières présentes au bord de l’Yonne parce que leurs cultures sont ravagées, et aujourd’hui impossibles, les réactions se font attendre… C’est quand même dommage de se priver d’une espèce nécessitant peu d’intrants, donc idéale pour les bassins de captage, parce que les trop nombreux oiseaux des villes ravagent tout…
Chez moi, je fais du pois et du chanvre qui sont susceptibles d’être attaqués par les oiseaux. Je ne peux pas installer de dispositif sonore, puisque les voisins râlent, et que les canons finissent par disparaître… Et idem pour les épouvantails, étant en bordure de ville, je me les fais piquer… J’ai fait une demande d’autorisation de destruction à tir, donc les chasseurs viennent tirer les oiseaux… Mais encore faut-il en trouver ! Ils préfèrent chasser le sanglier plutôt que les corbeaux. Cette année, pour le moment, je n’ai pas eu trop de dégâts à la levée mais il y a une autre phase dangereuse : les jeunes graines qui sont très appréciées des oiseaux. Le problème c’est qu’ils cassent les plantes en venant manger les graines».

Des dégâts dans les tournesols
Thomas Torailler est céréalier dans le Sénonais, il a dû resemer 2 ha de tournesol à cause de dégâts d’oiseaux.
«Après un colza très compliqué, qu’il a fallu retourner au mois d’août à cause du manque d’eau et des insectes. J’ai semé du tournesol au 15 avril, et je viens de resemer 2 ha qui ont été détruits par les oiseaux : des pigeons ramiers et même un couple de perdrix dans les bordures. En plus avec les températures froides, la levée est très lente donc les oiseaux ont tout le temps de profiter du stade qui leur plaît… Pourtant, j’ai mis un tonnfort, des cerfs-volants en forme de rapace, des épouvantails avec des CD, mais ils s’y habituent. Je vais peut-être faire une demande d’autorisation de destruction mais il faut y aller pour les tirer… Et je n’ai pas vraiment le temps. C’est la première fois que je fais du tournesol, et je suis le seul à en avoir fait dans le coin alors ils se sont concentrés chez moi».