Les réponses d’Arvalis aux questions que vous vous posez
Agriculteurs et techniciens se posent de nombreuses questions liées à la qualité de la récolte 2014. Se basant sur les résultats 2000 et 2001 (années aux conditions proches de 2014), Arvalis-Institut du végétal, apporte des réponses, enrichies par les dernières recherches effectuées cette année.
Après être revenu sur les différents facteurs (excès de chaleur, suivis de basses températures contournant la dormance) qui ont abouti à une situation exceptionnelle de grains germés cette année, Arvalis répond à plusieurs questions qui découlent directement de la situation actuelle.
- Y-a-t-il une relation entre l’indice de chute de Hagberg et le pourcentage de grains germés ?
Il n’existe pas de relation stricte entre le pourcentage de grains germés (visible à l’œil nu) et l’indice de chute de Hagberg. Bien sûr, si le pourcentage de grains germés visibles à l’œil nu est important, l’indice de chute sera faible. En revanche, il peut n’y avoir aucun signe visible de germination et l’indice de Hagberg peut déjà être très bas (voire même égal à 61 secondes, ce qui est l’indice le plus bas qu’on puisse trouver compte-tenu de la méthode).
La dégradation de l’amidon, suite à un déclenchement de l’activité des alpha-amylases peut résulter de deux scénarios : une dégradation consécutive à une stricte entrée d’eau importante dans les grains, qui peut débuter dès les stades précoces et qui va se traduire par une réduction de l’indice de chute sans germination ou pré-germination. Une dégradation qui résulte de l’hydrolyse de l’amidon par les alpha-amylases, suite au déclenchement de la germination au champs. En ce cas, l’indice est très bas et l’incidence sur la qualité meunière est forte.
Pour les deux situations, la présence de grains verts constitue un facteur aggravant.
- Peux-ton utiliser des grains germés en alimentation animale ?
En 1992, des conditions climatiques très humides ont provoqué la germination de blé, à des niveaux très variables. Des échantillons ont alors été utilisés pour mesurer l’effet de cette germination sur la valeur énergétique de ce blé pour les porcs et les volailles.
Dans les deux cas, les valeurs énergétiques des blés germés sont restées similaires à celles des blés non germés.
- Les orges de printemps sont-elles (aussi) sensibles à la germination sur pied ? Si oui, le débouché est-il brassicole ? Autres ?
Les orges sont moins sensibles à la germination sur pied que le blé. La principale raison résulte du fait que les téguments de ces espèces sont davantage soudés aux parois de la graine. Cette caractéristique physique limite de ce fait les entrées d’eau à l’intérieur de la graine et réduit également les entrés d’oxygène à destination de l’embryon, nécessaire à la germination. Par ailleurs, les téguments des orges renferment davantage de quinones, molécules qui fonctionnent comme de véritables pièges à oxygène quand l’eau pénètre.
La germination de l’orge impacte sa qualité dans le sens où une orge germée (ou pré-germée), même stockée correctement, perdra sa capacité à germer au maltage. Or, en temps normal, une orge est brassicole si sa capacité germinative est de 95%, livrée au malteur. Toute baisse de cette capacité se traduit par une baisse de rendement au maltage, ainsi que la plupart des indicateurs de qualité. En France, en général, les 2% de grains germés à l’agréage sont un indicateur suffisant.
- Peut-on utiliser des lots à faible TCH pour faire des semences, y compris à la ferme ? Peut-on utiliser des lots faiblement germés pour faire des semences, y compris à la ferme ?
Il n’est pas impossible de se servir d’un lot faiblement germé ou à faible TCH pour faire des semences de ferme mais sous quelques conditions :
. Faire attention au stockage pour la conservation des lots de semences : récolter à humidité < 15% et ventiler le lot pour descendre à une température de 15-20°.
. Effectuer un test de germination à la récolte. Si la faculté germinative du lot de semences est inférieure à 80%, le lot n’est pas utilisable pour faire des semences et il faut prévoir obligatoirement des semences certifiées.
. Refaire un test de germination en septembre, après quelques temps de stockage.
. Adapter les densités de semis à la faculté germinative du lot.
. Si un traitement de semences est prévu, le faire au dernier moment, une fois que l’on aura vérifié la faculté germinative du lot une seconde fois.
- Le test de germination est-il indispensable ?
La faculté germinative d’un lot de semences est le nombre de plantules normales pour 100 grains. Il ne s’agit donc pas de la capacité germinative qui comptabilise le nombre de graines germées pour 100 grains.
La détermination de la faculté germinative (FG) doit se faire au plus près du semis, en pratiquant comme les professionnels dans les stations de semences :
. prélèvements de 200 à 400 graines (échantillonnage adapté au lot à tester)
. semis de graines dans du sable ou sur du papier buvard humide et mise au froid (4-5°) pendant 72h, pour lever une éventuelle dormance résiduelle
. mise en température ambiante (20°) puis comptage après une semaine.
Les causes de la dégradation de la FG sont multiples : présence de fusariose, embryon altéré à la récolte par la casse de grains, début de germination sur pied, mauvaises conditions de germination, histoire de la plante porte-graine (stress et nutrition), application du traitement de semence.
La densité de semis recommandée doit donc être corrigée de la façon suivante :
grains à semer/m2= objectif de plantes/m2/[(100 - pertes à la levée)/100*FG/100]
Le blé français, dégradé, va manquer d’acheteurs
La récolte française de blé pour la meunerie a été gâchée par une conjugaison exceptionnelle d’intempéries qui ont dégradé la qualité des grains, lui laissant peu d’espoir de trouver des acquéreurs sur le marché international. Le coup de froid du début juillet, qui a donné aux grains le signal de la germination, suivi d’une pluviométrie hors norme, qui l’a accentuée, font déjà que la majorité des blés récoltés ne pourront plus être écoulés qu’en fourrage, donc à moindre prix. Et ce, à condition de trouver preneurs, résument les observateurs. “Les producteurs devront faire un sacrifice sur les prix “ prévient François Luguenot, analyste des marchés de la coopérative In Vivo. Si le blé meunier se vend actuellement autour de 170 euros la tonne, le prix tombe à 120 euros pour le blé fourrager. Et, même à ce prix, le prix fourrager est pour le moment trop cher pour les marchés traditionnels du Moyen-Orient, du Maghreb, de la l’Afrique de l’Ouest et même sur le marché français. D’autant qu’il se trouve en concurrence directe avec le maïs, dont les prix sont particulièrement attrayants cette saison avec de nouveaux records entrevus aux États-Unis.