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De mauvaises nouvelles en déceptions…

Les JA 58 voient rouge

Une bonne partie des membres du bureau des JA 58 s’est retrouvée, le 4 mars, chez Benoît Michot, à Moulins-Engilbert, pour une conférence de presse improvisée. Les jeunes du syndicat agricole voient l’avenir en noir et le rouge monte à leurs joues...
Par Emmanuel Coulombeix
Les JA 58 voient rouge
Avant la conférence de presse improvisée, les JA 58 ont posé avec une banderole... pour faire monter la pression.
Pour Alexandre Lorré, le président des JA 58, «on assassine l’installation des jeunes agriculteurs   ! Toutes les mesures annoncées cette année vont à l’extrême opposée du bon sens pour aider à l’installation des jeunes. Et contredisent les engagements pris il y a un an et demi par François Hollande, lors du Sommet de l’élevage à Cournon, en faveur d’un rééquilibrage vers l’élevage». Autour du responsable, une dizaine de JA du département ne cachent pas leur dépitt et leur colère. Après avoir peint une banderole -   «aujourd’hui agriculteurs, demain si rien n’est fait, chômeurs»- à base de couleurs fluorescentes, l’équipe prend le temps de se poser dans le salon de la ferme de Benoît Michot, leur vice-président «élevage», à Moulins-Engilbert. Pour eux, dans un élan spontané commun, l’avenir apparaît bien noir et, décidés à ne pas se laisser faire, déclinent les motifs qui leur fait monter le rouge aux joues...

Catalogue de déceptions
Avant que de ne se livrer à un examen prospectif de l’avenir des jeunes dans le département, c’est Alexandre Lorré qui prend la parole pour dénoncer, cliniquement, la liste des décisions récentes qui leur hérissent le poil... «Depuis le 1er janvier, les JA ne bénéficient plus que de 5 ans de bonifications d’emprunt, dès l’anniversaire de l’installation, contre 9 années auparavant. Nous n’avons plus de souplesse pour échelonner l’emprunt à partir de la 3è année» commence-t-il. Puis «depuis le 1er janvier, les banques ne proposent plus des emprunts que sur 12 ans maximum, au lieu de 15 ans auparavant». Cela fait donc deux mauvaises nouvelles pour les JA qui menacent   : «aujourd’hui, certaines installations ne peuvent pas se faire. Il y a des projets en péril dans la Nièvre» déplore le président des JA. Il est aussitôt suivi par Jean-Charles Seutin qui s’agace   : «déjà que des emprunts sur 15 ans, c’était très délicat, là avec le PDE, çà ne passera plus !»  Troisième motif de colère   : «l’aberration qui consiste à délivrer 80% de la DJA à l’installation puis les 20% restant dans les 5 ans qui suivent, après contrôle que tous les engagements sont respectés»... Et ce n’est pas tout   : «toujours depuis le 1er janvier, le délai pour réaliser les mises aux normes a été abaissé à 2 ans, contre 3 ans en 2014 et alors que c’étaient 5 ans il y a 3 ou 4 ans». Là, ce sont des mesures concrètes qui ont déjà été décidées et annoncées mais un cinquième motif met les JA de la Nièvre hors d’eux : «le seuil de la PMTVA n’est pas défini mais on nous parle d’un quota de 50 droits maximum pour un jeune qui va s’installer» suppute Alexandre Lorré. Bref, le ton monte. D’autant que cela fait plusieurs mois, qu’à tous les niveaux, le syndicat agricole jeune faisait part de revendications bien différentes : «Nous, nous demandions un rallongement des emprunts pour l’installation, une aide à l’installation de 100% la première année, ce qui est une aide à la trésorerie et puis que le gouvernement, qui avait donné la priorité à l’élevage il y a 18 mois, n’impose pas un seuil de 50 vaches !»  Aux yeux des jeunes nivernais, en outre, l’Aide aux bovins allaitants (Aba, ex-PMTVA) était «la seule aide concurrente de la végétalisation et qui permettait aux éleveurs de conserver leurs vaches et de maintenir toute la filière... Ce n’est pas positif» insiste Alexandre Lorré qui espère encore une prise de conscience des élus sur ce sujet, encore en cours de négociation. Contrairement aux bonifications, aux emprunts et à la DJA pour lesquels «c’est déjà cramé!»

Actions coups de poing
Dans une séance d’auto-analyse collective, les aigreurs et les angoisses finissent alors par surgir. «Je suis installé depuis un an et d’ici quatre ans, il faudra que je prenne une décision» dit Benoît Michot, le regard perdu dans le vague... «Tout le monde est à bout» lance Clément Blandin, sans peur d’être démenti par ses voisins. «Nous lançons un pavé dans la mare, c’est un SOS du monde agricole» reprend Alexandre Lorré. Jean-Charles Seutin insiste sur un point qui le chagrine particulièrement : «la DJA actuellement est exactement du même montant que celle qu’ont touchée nos parents dans les années 80, alors que les charges, le coût de la vie, tout est parti en vrille depuis longtemps» poursuit Benoît Michot. Les autres jeunes, autour de la table, acquiescent, hésitant entre l’écoeurement et la vindicte. Et le président des JA58 reprend, le plus posément possible : «Nous sommes arrivés à un point où les agriculteurs, qui ont un tempérament calme et réfléchi, peuvent être tentés par des débordements. Les vestiges de la monarchie à l’Assemblée nationale et au Sénat nous dégoûtent. Les élus sont peut-être brillants intellectuellement mais nuls sur le terrain ! Notre crainte, c’est qu’en cas de contrôle, en l’absence des responsables syndicaux, certains d’entre nous finissent, de façon isolée, pas péter les plombs» prévient le président des JA58, qui, sans plus de précision, prévoit déjà des actions coups de poing, dans la Nièvre, d’ici quelques semaines voire quelques jours. Et il n’en faut pas plus aux jeunes agriculteurs du département pour déballer tout le ressentiment qu’ils disent éprouver   : «Nous sommes outrés par l’attitude de nos représentants professionnels nationaux qui ont généreusement déroulé le tapis rouge au président de la République et au ministre lors du dernier salon de l’agriculture. Ils ne tiennent pas leur promesses et c’est inadmissible ! Nous sommes à la veille des déclarations Pac et nous ne savons toujours rien sur les MAE, l’ICHN et l’Aba. Nous aurions dû les mettre dehors!»