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Orages des 17 et 19 juin dans l'Auxerois

Le temps des cerises ne chante plus

Les violents phénomènes orageux des 17 et 19 juin ont ruiné les espoirs des producteurs de cerises de l'€™Auxerrois. Devant l'€™ampleur des dégâts, le seul espoir des professionnels repose sur un classement en calamités de toute l'€™aire de production.
Par Dominique Bernerd
Le temps des cerises ne chante plus
Des stigmates de la tempête rendant toute cueillette illusoire...
Depuis mardi dernier, le téléphone ne cesse de sonner chez Alain Duruz, producteur à Jussy et responsable de la section arboricole à la FDSEA de l'€™Yonne. Des collègues, désemparés pour certains, après avoir mesuré l'€˜étendue des dégâts et qui s'€™interrogent sur la conduite à tenir. Les yeux rougis par les nuits sans sommeil, Alain, une semaine après la catastrophe, reste surpris par la violence des éléments déchaînés : «portée par des vents soufflant à près de 100 km/heure, la pluie tombait à l'€™horizontal, un véritable rideau liquide qui a tout emporté par son passage, du jamais vu ! C'€™est d'€™autant plus lourd à porter que l'€™on avait déjà connu le gel l'€™an passé et là, c'€™est le coup de massue. On était à genoux, ça va finir de nous mettre à terre et je crains que certaines exploitations ne s'€™en relèvent pas et cessent leur activité en fin d'€™année...»
Une première estimation évalue les pertes selon les finages, entre 60 et 95 % du potentiel. D'€™autant plus difficile à accepter que, contrairement à 2012 où le gel n'€™avait pas conduit les fruits à maturité, la récolte 2013 s'€™annonçait relativement bonne, en dépit d'€™une floraison tardive. Certaines variétés étaient même à la veille d'€™être cueillies. Et pas d'€™espoir à avoir en ce qui concerne des espèces plus tardives : «encore vertes, les cerises ont été impactées par l'€™eau tombant à l'€™horizontal, un phénomène encore plus perçant que la grêle et les points noirs que l'€™on voit aujourd'€™hui ne laissent rien augurer de bon. Quand à d'€™autres variétés comme la Celeste ou la Coralie, le brunissement s'€™est mis de la partie et la pourriture commence à apparaître...» Comment envisager rémunérer des cueilleurs s'€™ils passent leur temps à trier... : «j'€™ai fait l'€™expérience, entre 1 h et 1 h 15 pour remplir un panier, là où dans le même temps, on en faisait quatre !» Voisin d'€™Alain Duruz, Sébastien Mahoudeau est lui aussi producteur et ne cache pas son désarroi : «ça donne envie d'€™arrêter, deux ans de suite, c'€™est trop dur ! J'€™en suis rendu à faire du jardinage pour me vider la tête et pourtant, j'€™aime pas ça !» Mirabelles, pêches, nectarines..., c'€™est toute la production arboricole qui a été touchée, avec en perspective, des fruits non commercialisables une fois parvenus à maturité, comme l'€™explique Alain : «même si ça cicatrise, c'€™est comme une plaie, ça va laisser des traces et qui en voudra derrière ? Peut-être y aurait-il un travail de communication à faire auprès des consommateurs pour les sensibiliser au problème... ?»
Pour l'€™heure, les professionnels, avec l'€™appui de la FDSEA de l'€™Yonne ont entamé des démarches pour réclamer que les dégâts puissent être pris en compte dans les calamités, du fait de la non-possibilité d'€™accéder aux assurances et qu'€™un soutien leur soit apporté pour sauver une production qui fût un fleuron de notre département.
Une première visite diagnostic sur le terrain s'€™est déroulée en ce sens ce mardi, en présence de Philippe Emery, de la Direction Départementale des Territoires de l'€™Yonne et de représentants de la Commission d'€™expertise.

Les vignes du Coulangeois touchées également
Viticulteur à Migé, Jean-Luc Houblin est formel : «en 31 ans de métier, j'€™avais jamais vu ça... ! Pendant 15 minutes, tellement d'€™eau, tellement de vent, que l'€™on n'€™a même pas vu la grêle !» Si certaines parcelles ont été relativement épargnées, en fond de vallées ou protégées par une rangée d'€™arbres, c'€™est quasiment toute la zone d'€™appellation du Bourgogne -Coulanges qui a été frappée par la tempête et les dégâts sont là aussi considérables. «les hauts de plateaux notamment sont ravagés, comme ici à Nanteau où tout est criblé et c'€™est ce qui était attaché et palissé qui aura connu les plus gros dégâts, cassé net au niveau des fils par le vent...»
Fouettés par le rideau de pluie porté par le vent à l'€™horizontal et les impacts de grêle, certains bois ont été touchés également, rendant d'€™autant plus aléatoire la vendange prochaine : «dans certains cas, l'€™usage même de la machine risque d'€™être remis en cause. Avec du bon à ramasser en bas et que des feuilles et du verjus dans la partie haute, comment veux tu faire le tri... ?»
Nouvelle présidente des vins du Coulangeois, Odile Maltoff n'€™est guère plus optimiste : «il y a des coins où il n'€™y aura sans doute pas de vendanges cette année, c'€™est clair ! A certains endroits, le vent mêlé à la grêle et à la pluie a martyrisé les bois, du véritable mitraillage» Dans l'€™immédiat, elle souhaiterait qu'€™à partir d'€™un parcellaire, soit réalisé un état des lieux «réel et concret», regrettant au passage l'€™intérêt relatif porté aux dégâts subis par le Coulangeois : «à part les Caves de Bailly, peu de monde s'€™est intéressé à nous et c'€™est dommage...»