Accès au contenu
Filière porcine

«Le cochon, faut l’aimer pour l’élever… »

La visite à valeur pédagogique organisée à l’attention des associations de consommateurs et représentants du Coderst par Eric Saison, sur son exploitation porcine a été très appréciée des visiteurs.
Par Dominique Bernerd
«Le cochon, faut l’aimer pour l’élever… »
Dans les bras d’Eric Saison, un porcelet de quelques jours semblant faire l’admiration des visiteurs;
Président de la section porcine à la FDSEA de l’Yonne, Eric Saison est par nature consensuel, privilégiant avant tout le dialogue. C’est dans cette optique qu’il a organisé sur son exploitation une visite à l’attention des associations de consommateurs, ainsi que des membres du Conseil Départemental de l’Environnement et des Risques Sanitaires et Technologiques (Coderst) et des élus : «il m’a paru important d’essayer de réunir des personnes avec qui on a l’habitude d’avoir des relations pas toujours très détendues et parfois pas toujours bien comprises…» Une première en la matière, particulièrement appréciée des visiteurs.
Installé à Coulangeron, en polyculture élevage depuis 1994, Eric a succédé à ses parents, originaires du Pas de Calais, arrivés dans la région avec la dernière vague de migration qu’a connu le département de l’Yonne, classé alors «département d’accueil». «Ils ont amené avec eux dans leurs bagages l’élevage de porcs, mais avec le recul, on se dit que ce n’est pas du tout un coin à cochons par ici, du fait du relief et de l’excentricité du paysage…» A la tête d’un cheptel de 60 truies élevées en label rouge, sur 1200 m2 de bâtiments, l’éleveur nourrit ses animaux en grande partie avec les cultures de l’exploitation : «la moitié de la collecte de blé est utilisée pour l’alimentation, ainsi que les deux tiers des orges d’hiver, une céréale particulièrement appréciée des truies, car si elles ont besoin de peu d’énergie, elles réclament beaucoup de cellulose. Toute la récolte de pois part aussi pour l’élevage…» Une alimentation complétée par du soja non OGM, filière label rouge oblige : «la rémunération supplémentaire qu’on a, du fait du label, suffisant à peine à contrecarrer le différentiel de prix avec un soja traditionnel, de l’ordre de 100 à 150 €/tonne…»

Paille ou caillebotis ?
Les animaux sont nourris à l’aide d’une machine à soupe.. Un choix dicté plus par la raison que par choix personnel : «au début, c’était pas mon truc ! Mais l’avantage est que tout est pesé et programmé automatiquement, sans surprise à l’arrivée, par rapport aux performances de l’animal…» Premier bâtiment visité : celui des truies. Panique à bord face à l’intrusion ! «Le problème est que tous les stades de gestation sont mélangés, avec pour conséquence, pour les plus petites cochettes de se faire accepter…» Dans le futur, un allotement est prévu. Les truies sont les seules à être élevées sur paille : «à mon installation, j’aurais bien aimé n’avoir que des animaux sur paille mais j’ai du abandonner l’idée, faute de place. Je me suis résigné à élever les animaux à l’engraissement sur caillebotis. Avec le recul, je me dis que c’était la bonne décision, apportant, avec la machine à soupe, une bonne adéquation entre performance de l’animal et consommation d’aliments…» Une alimentation de plus en plus onéreuse, dépassant aujourd’hui 80 % du coût de production.
Les truies en maternité sont sur caillebotis en fonte et semblent à l’étroit, alimentant les débats, mais Eric Saison en explique la raison : «on fait en sorte qu’elle ait quelques difficultés à se coucher, afin de laisser le temps aux porcelets de se déplacer et de ne pas être écrasés…» Une truie pouvant peser jusqu’à 250 kg, contre 1 à 1,5 kg pour le porcelet ! Si certains éleveurs plébiscitent le meulage des dents, la pratique n’est pas utilisée ici, par contre, le bout de la queue des porcelets est coupé : «l’animal est jouer et aime bien mâcher ! Si on ne le faisait pas, il y aurait risque d’infection qui finirait en arthrose…» Même chose en ce qui concerne la castration : «si vous abattez pour la charcuterie, un mâle qui n’est pas castré a deux chances sur trois que sa viande ait un goût d’urine…» Le cochon est abattu à 6 mois, pesant alors aux alentours de 120 kg, mais Eric s’interroge : «avant, il ne faisait  que 105 kg, mais les abattoirs exigent de plus en plus de poids. Tout ce que je vois, c’est qu’en grande surface, les côtelettes sont toujours aussi petites!»
L’éleveur de Coulangeron a un credo : «le cochon, faut l’aimer pour l’élever!» Un message semble t-il bien perçu par la présidente de l’association Yonne Nature Environnement, nouvellement élue à la tête de la fédération régionale, Catherine Schmitt, pour qui : «l’homme est agréable et il est clair que l’éleveur est respectueux de ses bêtes et a du savoir faire. J’ai particulièrement  bien apprécié l’équilibre apporté par un maximum de nourriture en provenance de l’exploitation. On sait d’où ça vient, ça ne nécessite pas de transport, un bon point» Moins convaincue toutefois par l’usage de lisier dans les champs : «on préférerait le voir transformé en fumier, beaucoup plus intéressant sur nos sols karstiques».