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Main-d'œuvre

Des emplois très encadrés

Pour les vendanges, plutôt que d’embaucher des salariés par le biais d’un contrat vendange, certains peuvent être tentés de recourir à d’autres formes d’emploi de main-d’œuvre.


Il convient alors d’être tout particulièrement prudent, car ces autres types d’emploi de main-d’œuvre sont très encadrés réglementairement, voire impossible pour l’emploi de vendangeurs.


Le risque pour le viticulteur qui ne respecterait pas ces règles serait alors de se voir poursuivi pour le délit de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié.

Le bénévolat n’existe pas en agriculture

Le bénévole se définit comme « celui qui s'engage librement pour mener une action non salariée en direction d'autrui en dehors de son temps professionnel et familial ». Il en découle qu'à la différence d'un travail salarié, le bénévolat se caractérise par l'absence de tout lien de subordination juridique et de toute rémunération sous quelque forme que ce soit (ni en espèces, ni sous forme d'avantages en nature).

L’aide bénévole sur une exploitation agricole correspond à des cas d’urgence. Il s’agit donc de ce qu’on appelle le coup de main occasionnel ou bénévole qui peut être donné par un voisin, un ami, un cousin… Ce coup de main est par nature de très courte durée et ne peut pas s’appliquer aux vendanges.

Le véritable bénévolat n’est DONC admis que pour les associations à but non lucratif, dans le cadre de l’absence d’utilité économique : association humanitaire, caritative ou d’œuvre sociale, éducative, culturelle sans but lucratif. La jurisprudence exclut donc le recours à des bénévoles dans les structures économiques à vocation lucrative que sont nos exploitations agricoles qu’elles soient individuelles ou sous forme de sociétés (EARL, SCEA, SCEV…).

L’emploi de bénévoles n’est de fait pas possible pour les vendanges.

Le bénévole, victime d'un accident de travail, peut engager la responsabilité du bénéficiaire de l'aide. Ce dernier doit alors indemniser l'accidenté. Il appartient à chaque exploitant de se rapprocher de son assureur afin de s'assurer que sa responsabilité civile couvre bien les aides bénévoles et occasionnelles.

En cas de contrôle d’une exploitation agricole par des agents de l’inspection du travail, de la MSA ou de la gendarmerie, l’employeur ayant recours à des bénévoles pour vendanger ou n’ayant pas déclaré des vendangeurs préalablement à leur embauche encourt le risque de se voir condamné à 3 ans de prison et 45 000 € d’amende pour travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié (Art. L. 8221-5 et 8224-1 du Code du travail).

Entraide familiale

En dehors des coups de main occasionnels de très courte durée, l’entraide familiale ne peut exister qu’entre parents au premier degré. (Parents, enfants, frère, sœur)

Il s’agit d’une tolérance, sauf à ce qu’elle soit faite sous statut d’aide familial.

Aides familiaux (article L722-10 2° du Code rural). Ce statut est limité à 5 ans. Ce statut qui donne certains droits en termes de retraite doit être déclaré auprès de la MSA

Un ascendant, un descendant, un frère, une sœur ou un allié au même degré du chef d'exploitation ou d'entreprise ou de son conjoint ;
Âgé de plus de seize ans (les jeunes de 14 à 16 ans peuvent donner des coups de main) ;
Vivant sur l'exploitation ou l'entreprise et participant à sa mise en valeur sans y avoir la qualité de salarié (en principe non rémunéré).

L'aide apportée au titre de l’entraide familiale ne doit être ni durable ou régulière, ni accomplie dans un état de subordination, ni se substituer à un poste de travail nécessaire au fonctionnement normal d'une entreprise ou d'une activité professionnelle.

Ainsi, cette aide spontanée, désintéressée et libre pourrait être requalifiée par le juge en contrat de travail dès lors que les critères du salariat sont réunis.

Pour les vendanges, l’entraide familiale ne pourra donc être tolérée que pour les parents au premier degré.

Entraide entre agriculteurs

À la différence du coup de main occasionnel, l’entraide entre agriculteurs ne concerne pas les cas de coup de main occasionnels, mais peut être plus régulière. Ce système est prévu par le Code rural (article L325-1 du code rural) et correspond impérativement à des échanges de services entre personnes ayant le statut d’agriculteurs, et implique donc gratuité, réciprocité et équivalence des échanges.

Il peut ainsi exister une entraide avec le retraité qui possède une parcelle de subsistance, mais pas avec un exploitant forestier.

L’entraide entre agriculteurs est donc possible pour les vendanges.

Le recours à un autoentrepreneur est interdit

Suivre une équipe de vendangeurs, travailler en fonction de leurs horaires, et être sous la responsabilité hiérarchique de l’exploitant, excluent toute possibilité d’autoentrepreneuriat, d’autant plus que le statut d’autoentrepreneur n’existe pas pour le régime agricole.

Le recours à une entreprise de travail temporaire

Il est tout à fait possible de recourir à des salariés saisonniers (vendangeurs), mis à disposition par une entreprise de travail temporaire (agence d’intérim), reconnue comme telle par la loi.

Le travail temporaire est différent de la prestation de service en ce sens qu’il a pour objet exclusif de mettre à disposition de la main-d’œuvre salariée, à but lucratif.

Il convient d’être très vigilant, notamment s’agissant des entreprises étrangères qui se revendiquent entreprise de travail temporaire. En effet, si c’est une entreprise de travail temporaire étrangère qui met à disposition des salariés, il faudra alors respecter aussi les règles du détachement transnational.

Si l’entreprise de travail temporaire ne respecte pas les conditions réglementaires, l’utilisateur pourra se voir condamné, par ricochet, pour travail dissimulé.

Le salarié est ainsi recruté par l’agence d’intérim, et mis à disposition du viticulteur via un contrat de mission. Un contrat de mise à disposition est signé entre le viticulteur et l’agence d’intérim.

Cette solution permet au viticulteur de confier à l’agence d’intérim le soin de recruter à sa place les salariés dont il a besoin.

Il faut donc bien comprendre que le coût global du recours à un intérimaire est plus important qu’un recrutement direct, puisque l’agence d’intérim offre une prestation particulière.

L’emploi d’intérimaires est possible pour les vendanges, sous réserve du respect de l’application des dispositions réglementaires spécifiques à ce type d’emploi.

Il convient toutefois d’être très vigilant, notamment si les prix proposés sont anormalement bas par rapport au coût d’une embauche par CDD.

Le prêt de main-d’œuvre à titre gratuit

Également appelé « mise à disposition », le prêt de main-d’œuvre consiste, pour un employeur, à mettre à disposition un ou plusieurs de ses salariés au profit d’un autre professionnel (l’utilisateur).

Contrairement à l’intérim, l’employeur, qui n’est pas une entreprise de travail temporaire, prête son salarié à titre gratuit (sans but lucratif).

Un contrat de travail doit exister entre le salarié et l’employeur qui met à disposition le salarié.

Le prêt de main-d'œuvre doit obligatoirement être à but non lucratif pour l'entreprise qui prête la main-d'œuvre.

Celle-ci facture, pendant la mise à disposition, uniquement les salaires versés aux salariés, les charges sociales qui y sont liées et les frais professionnels remboursés au salarié.

• Accord du salarié concerné

Le salarié doit exprimer son accord explicite et, s'il refuse, ne peut pas être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire.

Il doit signer un avenant au contrat de travail, qui indique obligatoirement :

- les tâches confiées dans l'entreprise utilisatrice,

- les horaires et le lieu d'exécution du travail,

- les caractéristiques particulières du poste de travail.

À l'issue de la période de prêt, le salarié retrouve son poste de travail d'origine, sans que l'évolution de sa carrière ou de sa rémunération n'en soit affectée.

• Convention de mise à disposition entre les deux employeurs

L'entreprise prêteuse et l'entreprise utilisatrice doivent signer une convention qui précise les éléments suivants :

- la durée de la mise à disposition,

- l'identité et la qualification du salarié (la convention ne peut en aucun cas concerner plusieurs salariés).

- le mode de détermination des salaires, des charges sociales et des frais professionnels facturés à l'entreprise utilisatrice par l'entreprise prêteuse, et éventuellement la période probatoire, au cours de laquelle il peut y être mis fin à la demande de l'une des parties (période obligatoire lorsque le prêt de main-d'œuvre entraîne la modification d'un élément essentiel du contrat de travail).

Sous réserve de respecter les conditions ci-dessus (les agents de contrôle pourront vous demander les documents requis), le prêt de main-d’œuvre est donc possible pour les vendanges.

Le wwoofing ou l’œnotourisme

Le Wwoofing « World-Wide Opportunities on Organic Farms » concerne à la base un réseau de fermes travaillant en agriculture biologique et dans lesquelles des bénévoles viennent s’impliquer pour découvrir, au plus près du terrain, les modes de vie et de travail agricoles, en participant délibérément à des récoltes. Les hôtes fournissent alors gîte et couvert.

Il convient d’être très vigilant concernant ce mode de fonctionnement qui pourrait s’apparenter à du faux bénévolat et qui est peu compatible avec la réglementation française.

L’œnotourisme est une pratique qui consiste à proposer des formules « découverte de la région et du vin avec coupe du raisin de l’exploitation puis dégustation ». L’œnotourisme est donc un client, et c’est le viticulteur qui lui doit une prestation.

Le touriste ne peut donc en aucun cas fournir un travail subordonné. Cette pratique peut s’apparenter à de la fausse prestation de service ou du faux bénévolat.

Les agents de contrôle seront très vigilants sur ces pratiques, surtout dans la mesure où elles auraient pour objectif d’éluder l’application des règles du droit du travail.

En outre, l’attention des viticulteurs est particulièrement attirée sur les risques encourus au cas où l’une de ces personnes serait victime d’un accident du travail.

En résumé

Lors des vendanges, seules l’entraide familiale (avec parenté au premier degré) et l’entraide entre agriculteurs seront tolérées.

Quant aux entreprises de travail temporaire ou de prestation de services, quelques vérifications préalables seront à effectuer et il convient d’en respecter les règles spécifiques.

Enfin, restez très vigilant si un prestataire de services ou une entreprise de travail temporaire se permet de vous faire une proposition tarifaire en dessous des prix du marché ou si un prestataire de services se contente de vous fournir de la main-d’œuvre.