La force du collectif
À Besançon, la conférence agricole régionale a réuni les acteurs du monde agricole autour du thème du collectif. Si 2024 a été marquée par des résultats économiques particulièrement difficiles, la rencontre a surtout mis en lumière des réussites collectives dans diverses filières, rappelant que la coopération reste un levier essentiel pour innover, s’entraider et préparer l’avenir.
Les acteurs du monde agricole de Bourgogne-Franche-Comté (BFC) étaient réunis à Besançon Micropolis le 9 septembre pour la conférence régionale : un tour d’horizon des différentes filières et une occasion de rencontre et d’échanges entre élus, responsables professionnels et administratifs des différentes OPA… Si les résultats économiques de 2024 – marqués par une météo calamiteuse et un résultat courant négatif pour 80 % des exploitations – ont été présentés, l’Observatoire prospectif de l’agriculture a surtout choisi cette année de mettre en lumière « la force du collectif ». Objectif : valoriser les expériences de coopération, du Gaec et de la Cuma à la filière, en passant par les groupes de développement, qui permettent de mieux affronter les défis d’aujourd’hui et de demain. En introduction, Vincent Lavier, président de la Chambre régionale d’agriculture, a rappelé le rôle de ce rendez-vous : « Un moment important de la vie de notre agriculture, mais aussi le moyen de pouvoir échanger entre nous. » L’occasion d’avoir une vision globale, de mesurer les difficultés mais aussi les réussites. Dans une conjoncture où les chiffres varient fortement selon les productions, le collectif apparaît comme un facteur clé pour s’intégrer, progresser et se soutenir. Philippe Dubief, président de Cerfrance BFC, l’a souligné : « Depuis 10 000 ans, les collectifs évoluent. Aujourd’hui encore, ils permettent d’investir, de réaliser des choses qu’on ne peut pas faire seul. On s’investit pour le groupe et on est surpris par tout ce que le groupe nous apporte en retour. C’est un cercle vertueux, un outil puissant pour limiter l’isolement, favoriser le renouvellement des générations et renforcer le lien social. »
Au cœur des dynamiques régionales
Les exemples projetés en courts-métrages ont illustré cette diversité : des exploitations maraîchères organisées en collectif pour leurs chantiers de récolte, un Gaec ayant recours à un salarié à temps plein pour améliorer le confort de travail et l’équilibre familial, une boucherie collective dans le pays beaunois (« Le goût d’ici ») en Côte-d'Or, ou encore une filière noix-noisettes dans l’Yonne montée par des céréaliers. Autant de démarches qui montrent que la mutualisation est aussi un moyen d’innover et de gagner en attractivité. Dans les témoignages, la question de la gouvernance revient comme déterminante : qu’il s’agisse d’une Cuma, d’un Groupement d'intérêt économique et environnemental (GIEE) ou d’une filière, la durabilité d’un projet collectif dépend de la capacité à organiser la décision et l’animation. Comme l’a résumé Ludovic Bonardot, qui s’est appuyé sur un collectif pour relancer la recherche technique dans la filière cassis : « Dans une conjoncture complexe, les stratégies collectives sont un gage de réussite, mais elles ne tiennent que si l’on apprend à gouverner ensemble. » Christian Morel, vice-président de la Région BFC, a insisté sur la nécessité de « recréer du lien et de la confiance », rappelant que « l’individualisme ne mène à rien ». Après trente ans de coopération, « ça marque, et ça donne des pistes pour l’avenir : retravailler ensemble le Feader, affronter le défi de l’eau, valoriser nos complémentarités de filières et aller vendre nos réussites auprès des jeunes et à l’extérieur ». Du côté de l’État, Christophe Blanc, directeur adjoint de la Draaf, a rappelé l’importance de la mobilisation collective pour relever les défis sanitaires, à l’image de la lutte contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) bovine. Les Gaec, Cuma, coopératives et associations d’éleveurs montrent la voie. La feuille de route régionale de planification écologique, notamment son axe « mieux se nourrir », s’appuie d’ailleurs sur ces dynamiques.
Préserver et transmettre
Au fil de la journée, un constat s’est imposé : l’agriculture de BFC est riche de ses diversités, mais sa vitalité passe par l’action collective. Que ce soit pour investir dans du matériel, s’organiser face aux crises sanitaires, développer une nouvelle filière ou tout simplement briser l’isolement, l’union reste une force. Comme l’a résumé Vincent Lavier : « Entrer dans un collectif quand on s’installe, agricole ou non, est extrêmement important. Les groupes de développement jouent un rôle déterminant pour s’intégrer, progresser et réussir. » La conférence 2025 a donc mis en avant cette conviction : au-delà des chiffres, souvent difficiles, c’est dans le « faire ensemble » que l’agriculture régionale trouve aujourd’hui ses plus beaux leviers d’avenir.